29/03/2024

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Incendies des marchés: Synregie-Togo lance un appel pour un règlement rapide selon le droit

AFFAIRE DES INCENDIES DE MARCHES AU TOGO : POUR QUE LE MONDE SE SOUVIENNE ET QUE JUSTICE SE FASSE !

Note de situation de Janvier 2015 : Appel pour un règlement rapide selon le droit

Incendies des marchés en janvier 2013, nouvelle calamité pour le peuple togolais

Le peuple togolais et les amis du Togo ont été durement frappés au cœur à l’orée de l’année 2013 par ce qui est désormais convenu d’appeler « affaire des incendies de marchés». Une des tragédies les plus monstrueuses de l’histoire de ce pays sous domination d’une minorité agrippée au pouvoir depuis un demi-siècle.

A l’incendie qui a ravagé le marché de Kara dans la nuit du 09 au 10 janvier 2013, suivit quelque 48 heures plus tard, celui du grand marché de Lomé, dans la nuit du 11 au 12 janvier 2013. D’autres incendies de marchés ont été également signalés dans des localités du pays.

Si l’on ne déplore aucune victime directe sur les lieux des incendies, en revanche, les dégâts matériels se chiffrent à plusieurs dizaines de milliards de CFA, avec des conséquences humaines désastreuses quand on sait qu’en Afrique au Sud du Sahara, les marchés sont les plus grands pourvoyeurs d’emplois et générateurs de ressources pour le plus grand nombre. Ces conséquences sont douloureusement vécues particulièrement par les femmes qui, comme l’on sait, occupent une place centrale dans la vie économique et sociale du pays. Et les violences qui leur sont infligées à cette occasion ne font que s’ajouter à une longue liste de brimades dont elles ont constamment été l’objet depuis qu’elles participent à la dénonciation des forfaits d’une dictature familiale qui régente le pays depuis 1963.

Ces événements douloureux ont été saisis comme prétexte à une chasse aux sorcières au sein de l’opposition togolaise. Pendant ce temps, les vrais auteurs et commanditaires de ces crimes courent toujours, du fait d’une institution judiciaire sous la tutelle d’un pouvoir qui cultive l’impunité et le partialité comme armes privilégiées de gouvernance. Pourtant dans les jours et semaines qui ont suivi, les enquêtes diligentées par des experts français mandatés par les autorités togolaises concluent à l’origine criminelle de ces sinistres.

Un faisceau d’indices, de témoignages et de contre-enquêtes établissent clairement les origines et les responsabilités de ces forfaits, notamment l’utilisation du kérosène (jet fuel) comme accélérateur de feu. Rappelons que le « jet fuel » est l’accélérateur de feu qui avait été utilisé dans l’incendie du Goethe Institute, incendie survenu dans la nuit du 28 au 29 avril 2005. L’analyse des canaux d’approvisionnement en « jet fuel » aurait dû fournir des pistes sérieuses permettant d’identifier les auteurs présumés de ce crime et leurs mobiles.


Désolation, manifestations et répression

Dans ces circonstances de profonde désolation nationale, à travers des manifestations pacifiques au Togo et en dehors du pays, les organisations de la société civile, les partis politiques de l’opposition et la diaspora togolaise n’ont cessé de réclamer que justice soit faite. Ils ont régulièrement interpellé la communauté internationale pour qu’une enquête internationale soit diligentée afin de faire toute la lumière sur ces événements, en toute indépendance. A ces revendications pour connaître la vérité, les réponses du pouvoir sont à son image : répression des manifestations, vague d’arrestations et incarcérations dans les rangs de l’opposition, inculpations de nombreux responsables, le tout en violation des règles et des procédures élémentaires requises dans ces circonstances. Deux ans après ces événements, encore aujourd’hui, plusieurs personnes sont incarcérées ou inculpées, abusivement ! Qui plus est, le corps du délit a été rasé avec empressement, empêchant toute possibilité de contre-expertise ou de démarche de reconstitution des faits.

Devant les pressions nationales et internationales, le pouvoir a consenti à procéder à une indemnisation partielle des victimes. Il s’agissait davantage d’une opération de communication menée dans le plus grand cafouillage et à la déception totale des vrais sinistrés, tandis que des projets de reconstruction des marchés sont annoncés à grand fracas par le pouvoir.

Depuis 2013, Synergie-Togo n’a eu de cesse de solliciter l’attention des acteurs de la société civile et des partis politiques ainsi que des partenaires internationaux pour que chacun contribue au règlement de cette affaire dans l’intérêt à la fois de toutes victimes directes et collatérales de cette tragédie nationale.

Deux ans après

Et, deux ans après la survenue de ce drame national, Synergie-Togo ne peut que constater l’absence de réponses juridiques, judiciaires et économiques satisfaisantes à la mesure de ce désastre national.
Deux ans après la survenue de ce drame, il est étonnant que la procédure judiciaire qui a démarré depuis janvier 2013 n’ait pas réussi à fixer l’opinion nationale et internationale sur les auteurs de ce crime. Depuis plusieurs mois le dossier est comme suspendu avec un silence intolérable de la part des juges en charge de ce dossier. Ce silence accentue la profonde blessure des victimes et au-delà, de toute la société togolaise. Il contribue à abîmer encore davantage l’image de la justice togolaise au service du pouvoir exécutif.

Depuis la libération circonstancielle, quelques semaines avant la tenue d’élections législatives de juillet 2013, de certains hommes politiques incarcérés, une chape de plomb entoure en effet l’affaire des incendies de marché. Ce silence tend à confirmer le faisceau d’indices selon lequel ces incendies relèveraient d’un acte de terrorisme d’Etat. C’est le lieu d’interpeller les organisations internationales pour l’ouverture, dans les meilleurs délais, d’une enquête internationale qui puisse permettre aux victimes de saisir des juridictions sous régionales, régionales ou internationales afin qu’elles fassent, de manière impartiale, la lumière sur ce crime qu’une institution judiciaire nationale aux ordres de l’exécutif risque de laisser impuni.

Par ailleurs la situation des victimes reste préoccupante, alarmante et ne semble interpeller personne. Les victimes continuent de porter le deuil des années de durs labeurs étalée sur plusieurs générations et réduites à néant dans les flammes, en une nuit. Beaucoup de ces victimes ont perdu la vie, d’autres sont toujours hospitalisés et tous les sinistrés restent traumatisés à vie.


APPEL SOLENNEL DE SYNERGIE-TOGO

En ce triste deuxième anniversaire de ces tragédies, dans le contexte de traumatisme toujours vécu par les Togolais, Synergie-Togo réitère son exhortation à tous les acteurs nationaux et aux partenaires internationaux pour que soit trouvée dans les plus brefs délais une solution définitive selon les règles de droit.

• Tout particulièrement, Synergie-Togo salue vivement l’engagement continu et déterminé des commerçantes et des commerçants des marchés du Togo à faire valoir leurs droits et les exhorte à rester debout pour continuer à assumer pleinement leurs responsabilités, comme ils l’ont toujours fait, de tout temps, à travers l’histoire du pays. Synergie-T ogo exhorte les commerçants et les commerçantes de ne pas baisser les bras, à se battre pour que les responsabilités soient situées et qu’ils puissent rentrer effectivement dans leur droit et redonner un tant soit peu un nouveau sens à leur vie.

• Synergie-Togo invite les autorités togolaises qui détiennent la clé du règlement de cette affaire, à un courage politique fondé sur le bon sens et les principes éthiques pour mettre fin aux souffrances des Togolais par des décisions courageuses et dans l’intérêt national.

• Synergie-Togo demande instamment à la justice togolaise d’exercer enfin le pouvoir juridique et judiciaire que lui confère la constitution de manière impartiale en prenant en compte tous les éléments des enquêtes et contre-enquêtes ainsi que des témoignages accumulés dans cette affaire.

• Synergie-Togo sollicite la contribution des partenaires internationaux pour qu’ils puissent diligenter une enquête internationale d’établissement des faits et aussi pour qu’ils fassent bon usage de leur influence auprès des autorités togolaises afin que ne soit pas définitivement perdue de vue, comme c’est souvent le cas dans les affaires judiciaires au Togo, l’affaire des incendies des marchés où l’expertise de spécialistes français a été sollicitée par les autorités togolaises au plus haut niveau.

A l’occasion des vœux exprimés pour la nouvelle année 2015, Synergie-Togo a souligné les menaces qui pèsent sur les processus de démocratisation en Afrique. Ces menaces sont essentiellement liées à la volonté de gouvernants résolus à se maintenir au pouvoir en passant outre les dispositions constitutionnelles et la volonté des peuples. Elles viennent s’ajouter à la longue liste des problèmes de mal-gouvernance qui continuent de plomber le développement économique et social de plusieurs pays africains.

Au Togo, l’affaire des incendies des marchés illustre parfaitement ce déficit démocratique et cette mal-gouvernance.

Au terme de cette note de situation, Synergie-Togo confirme son engagement auprès des femmes et des
hommes de bonne volonté du Togo et d’ailleurs pour faire triompher les valeurs de la démocratie, des libertés et des droits humains, conditions sine que non d’un développement inclusif.


Mémorandum sur les incendies des marchés au Togo

Ce mémorandum, est un rappel succinct des séquences qui ont marqué le sombre dossier des incendies des marchés de Kara et de Lomé de janvier 2013 à ce jour.

L’année 2013 est marquée après l’euphorie des fêtes de fin d’années par deux drames qui ont endeuillé le peuple togolais. D’abord l’incendie qui a ravagé le marché de Kara la nuit du 09 au 10 janvier 2013 suivi quelques 48 heures après, par celui du grand marché de Lomé communément appelé le marché d’Adawlato la nuit du 11 au 12 janvier 2013. S’il est avéré que ces incendies sont d’origines criminelles, les auteurs et les commanditaires ne sont toujours pas connus de l’opinion nationale et internationale car la procédure judiciaire sensée tirer cette affaire au clair est viciée dans un pays où le pouvoir judiciaire est loin d’être indépendant.

LES FAITS

Le 10 janvier 2013 : Incendie du marché de Kara

Aux environs de 2h jusqu’à 8h du matin, le marché de Kara a pris feu. Faute de moyens, les sapeurs-pompiers aidés par la police locale n’ont pas pu maîtriser la situation à temps. Le Togo dispose de deux unités de sapeurs-pompiers l’une à Lomé, la seconde à Kara ; mais ces services n’ont pas les moyens pour faire face à ces drames. L’enceinte du marché, le bloc administratif, la station radio appartenant au député Kpatcha Gnassingbé, demi-frère du chef de l’Etat, les magasins, sont partis en fumée.

Le 11 janvier 2013 : déclarations rassurantes de la Directrice de l’EPAM

Recevant une délégation des commerçantes du marché de Lomé, la Directrice de l’Etablissement Public Autonome pour l’Exploitation des Marchés de Lomé (EPAM), décrit le dispositif de sécurité en place au marché de Lomé et tient des propos rassurants tendant à faire croire qu’après l’incendie du marché de Kara, toutes les dispositions sont prises pour qu’un tel drame ne survienne pas au marché de Lomé. Ses déclarations sont diffusées sur la 1ère chaîne de la télévision togolaise (TVT) quelques heures avant le début du drame.

Vendredi 11 au samedi 12 janvier : Incendie du grand marché de Lomé

Dans la nuit du 11 au 12 janvier 2013 c’est au tour du grand marché de Lomé d’être ravagé par un incendie. Le feu n’a été maîtrisé qu’à la mi-journée, le samedi par les sapeurs- pompiers du Ghana appelés en renfort par les autorités togolaises dont les services n’ont pas eu les moyens de faire face à la situation. Les bouches d’incendies situés aux abords du marché ne sont pas fonctionnelles. Les deux étages du bâtiment central du grand marché ont entièrement brûlé, Il n’y a pas de victimes mais les dégâts matériels sont importants et chiffrés à plusieurs milliards de francs CFA.

Plusieurs commerçants ayant eu accès au bâtiment au début de l’incendie pour aller y retirer leur argent disent avoir retrouvé leur casier vide ou leur coffre fracturé et soupçonnent une « main criminelle » d’avoir mis le feu après cambriolage des stands.

Incendies de marchés dans d’autres localités du Togo

Dans d’autres localités du pays comme à Adidogomé au nord-est de Lomé, des marchés ont aussi été touchés par cette série d’incendies criminels.


LES SUITES JUDICIAIRES

12 janvier 2013 : Les incendies sont d’origine criminelle.
Dès le 12 janvier, les premières interpellations et arrestations ont commencé dans les rangs de l’opposition. Il faut noter que quelques jours après les sinistres, le gouvernement togolais qui a attribué l’origine de l’incendie de Kara à un fou s’est ravisé après celui du marché de Lomé pour avancer la piste criminelle. Pour ce faire, le ministre Yark Damehane a, au cours d’une conférence de presse, présenté le nommé Mohamed Loum, alias Toussaint Tomety à la presse comme le principal témoin. Ce dernier a soutenu que c’est l’opposition notamment le Collectif Sauvons le Togo (CST) qui est l’auteur des incendies. Au final, une trentaine de personnes, toutes des responsables et militants de l’opposition, ont été interpellées, détenues et inculpées.

18 janvier 2013 : mission de deux experts français dans le dossier des incendies
A la demande des autorités togolaises, deux agents Français de la Police Scientifique ont séjourné à Lomé du 18 au 25 janvier 2013 avec pour mission d’élucider le modus operandi dans les incendies qui ont ravagé les marchés de Kara et de Lomé et d’établir formellement leur origine. L’enquête était dirigée par monsieur Hervé BAZIN, Ingénieur, Chef de la section Ingénierie du feu au Laboratoire central de la Préfecture de Police de Paris (France) et expert près la Cour d’Appel de Paris. Mr Francis DEBLASI responsable de la cellule investigations au sein de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris est le deuxième membre de la mission d’expertise.

Le 16 avril 2013 : Le CST écrit au ministre français des affaires étrangères
le Collectif Sauvons le Togo (CST) saisit par correspondance monsieur Laurent Fabius pour que la France demande au pouvoir togolais la publication du rapport des experts scientifiques.

Le 24 avril 2013 : le procureur de la république du Togo délivre sa version des rapports de deux missions d’expertise, dont celle des experts français
Le procureur de la république sous la pression des médias et des partis politiques de l’opposition qui n’ont cessé de réclamer la publication du rapport des experts français, a fini par communiquer une partie du rapport scientifique des experts Hervé Bazin et François Deblasi. Selon le procureur Blaise Essolizam Poyodi, « il s’agit pour les experts français, Hervé Bazin et Major François Deblasi et pour l’expert israélien, Shlomo Maor, de donner leurs avis sur l’origine et la cause de ces incendies. Il leur était également demandé de procéder aux prélèvements et analyses pouvant intéresser l’enquête ». En bref, les experts concluent que les incendies sont d’origines criminelles. Avec l’utilisation du kérosène (jet fuel) selon les experts français.

Le 03 juin 2013, Laurent Fabius répond au Collectif Sauvons le Togo, dans cette réponse on peut lire en extrait, « nous espérons que l’avis technique de nos experts contribuera à l’établissement de la vérité. Leur rapport a été remis aux autorités togolaises, qui l’ont versé au dossier d’instruction. Monsieur Essolissam Poyodi, procureur de la république du Togo, a fait état des conclusions de ce rapport le 24 avril dernier. Nous attendons de la commission d’enquête qu’elle rende ses conclusions dans le respect du droit. Je puis assurer votre collectif que nous continuerons à suivre avec attention l’évolution de la situation au Togo ».

28 mars 2013 : Mohammed Loum « le principal témoin » se rétracte.
Revirement de situation avec le principal témoin Mohamed Loum. Alors que la procédure judiciaire conduite aux antipodes des règles de droit est décriée par un certain nombre d’acteurs, Mohamed Loum en confrontation avec l’ancien premier ministre Agbéyomé

Avec ces éclairages, l’opinion est fixée sur l’origine criminelle des incendies et les moyens utilisés, mais ne connait toujours pas les réels auteurs de ces actes criminels.

Kodjo également inculpé, soutient en présence du procureur de la république qu’il a été torturé par les services de renseignements du Togo pour mettre en cause les responsables de l’opposition regroupés au sein du Collectif Sauvons le T ogo. La réaction du gouvernement face à ce revirement reste tardive et timide. Le ministre de l’emploi, Yacoubou Hamadou qui répondait au nom du gouvernement s’est caché sous le secret de l’instruction et le principe de la séparation du pouvoir. Laquelle séparation n’a jamais été respectée dans la procédure judiciaire.

Le soir du 28 mars 2013, la réaction de l’opposition ne s’est pas fait attendre. Elle demande que toute la procédure, bâtie sur le témoignage de Loum tombe car nulle et de nul effet. Elle exige l’ouverture d’une enquête internationale du fait que la justice togolaise est disqualifiée pour mener cette procédure en toute indépendance.

Le 12 novembre 2013, Le Collectif Sauvons le Togo(CST) publie son rapport sur les incendies. le Collectif Sauvons le Togo, mis en cause dans les incendies des marchés par le pouvoir togolais contre-attaque en publiant un rapport d’une vingtaine de page dans lequel huit personnalités du régime sont accusées d’avoir planifié et commandité les incendies. Le CST dans son rapport dénonce une machination politique orchestrée par le pouvoir pour décapiter l’opposition.
Le pouvoir en réaction dit n’accorder aucune valeur juridique à ce rapport et menace à cet effet les auteurs d’autres poursuites.

INDEMNISATION DES VICTIMES

Le 22 février 2014, soit un peu plus d’un an après la tragédie, la direction générale du trésor et de la comptabilité publique annonce l’indemnisation des victimes.

Du 25 février au 1er mars 2014, l’indemnisation des victimes des deux marchés démarre dans le plus grand cafouillage à la déception totale des sinistrés qui n’ont pas manqué de relever que les fonds que le gouvernement leur a attribués ne représentent rien face aux préjudices subis. Si pour le gouvernement il s’agit juste d’un appui financier, les victimes perçoivent ce geste comme un manque d’égard à leur endroit et dénoncent le manque de transparence dans la liste des personnes indemnisées.

Fait à Paris, le 27 Janvier 2015
Pour Synergie-Togo,
La Présidente
Brigitte AMEGANVI