28/03/2024

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Les remous de l’affaire Agbéyome Kodjo

Nouvelle République(n° 52 du 18 juillet 2002), proche du RPT, annonce à la une « la leçon du voleur qui crie au voleur au RPT : Agbéyomé menace de porter plainte ».
En effet, ce journal écrit : « Depuis qu’il a été limogé, l’ex Premier Ministre ne cesse d’aller de surprise en surprise. Après sa fracassante sortie médiatique sur RFI où il promettait une  » riposte  » depuis son exil, il vient par le biais de son avocat de monnayer sa mauvaise foi. Dans une diatribe de 14 pages, le sieur Agbéyomé Kodjo a cru  » dénoncer  » des malversations financières de tout genre qui ont eu cours sous son règne à la Primature. Il n’a cependant pas mentionné sa responsabilité dans l’une ou l’autre des malversations  » dénoncées « .
La Commission anti-corruption, citée d’être partisane dans la diatribe de l’ex premier ministre est montée au créneau pour faire de troublantes révélations sur le sieur Agbéyomé Kodjo, Directeur Général du Port Autonome de Lomé puis premier ministre.
Dans sa dénonciation, la Commission anti-corruption a fait allusion à un audit international qui a révélé l’existence de malversations financières se chiffrant à des milliards de francs CFA au Port Autonome de Lomé pour la période où Agbéyomé Kodjo était le Directeur Général.
Plus loin, la Commission anti-corruption a révélé les manœuvres du sieur Agbéyomé Kodjo dans sa tentative de détruire les fichiers comptables du Port Autonome de Lomé, et dans sa tentative d’empêcher la Commission à exercer librement sa mission.
Mais chose curieuse, c’est l’ex Premier ministre Agbéyomé Kodjo, qui menace aujourd’hui de porter plainte.
Prenant toutes ces dénonciations comme de la calomnie et de la diffamation, l’ex Premier ministre Agbéyomé Kodjo nie en bloc toutes ces dénonciations et par le biais de son avocat, le Bâtonnier Mario Stasi fait savoir au Premier Ministre Koffi Sama qu’il « entend dès à présent envisager des actions à entreprendre pour la réparation du préjudice subi et pourrait porter plainte contre les auteurs de cette entreprise de calomnie et de diffamation « .
C’est donc par une lettre N/Ref : MS/BB-302063 en date du 10 juillet adressée au Premier Ministre que le Bâtonnier Mario Stasi a signifié au Premier Ministre Sama, que son client M. Agbéyomé Kodjo  » est libre de tout engagement avec le Port Autonome de Lomé et ne saurait donc répondre d’aucun acte de gestion… « .
C’est décidément le monde à l’envers. L’ex Premier Ministre est en train donc de donner au régime RPT la leçon du  » voleur qui crie au voleur « .

Ils sont nombreux aujourd’hui au RPT qui se disent  » intouchables  » malgré les prouesses de la Commission anti-corruption initiée par le Président Eyadéma.
Il est donc impérieux que la Commission anti-corruption s’active davantage afin de descendre de leur piédestal ceux des barons du régime RPT qui se sentent  » intouchables  » si le régime RPT veut éviter que des cas  » Agbéyomé Kodjo  » se répètent demain.

La dépêche (n°193 du 17 juillet 2002), autre hebdomadaire proche de la mouvance présidentielle, souligne : « le RPT dans la tourmente ». L’éditorialiste estime que « le RPT est en crise…. Il s’agit d’une crise d’identité née probablement de l’usure d’un pouvoir. .. Nous assistons à un douloureux déchirement entre les conservateurs et les rénovateurs, c’est – à – dire les jeunes loups qui veulent avoir voix au chapitre mais qui se sentent étouffés et pratiquement privés d’initiative au sein du parti.
Inutile de chercher, comme on tente de le faire, à minimiser la portée des déclarations de l’ancien premier ministre en les qualifiant « d’allégations mensongères » ou d’organiser de gigantesques marches de soutien pour dire n’importe quoi sans apporter de preuves contraires aux allégations de l’ancien premier ministre hier fidèle parmi les fidèles du chef de l’Etat. »
S’agissant du gigantesque système de prévarication mis en place par le chef de l’Etat et son clan, le journal fait le constat suivant, de façon on ne peut plus pertinente : « La mise au point faite par la Commission nationale de lutte contre la corruption n’a fait que confirmer les déclarations de M. AGBEYOME KODJO. Ç’aurait été mieux de se taire. Ainsi donc nos sociétés d’Etat, en l’occurrence l’OTP, sous couvert de cadeaux, se sont livrées à des détournements de fonds estimés à des milliards de francs. Mais curieusement la Commission anti-corruption estime que « l’acquisition des boissons comme cadeaux de fin d’année ne constitue pas en somme une malversation financière ».
La mise au point grossière de la commission anti-corruption appelle plusieurs questions :
– Pourquoi après enquête à l’OTP la Commission n’a pas rendu public son rapport comme elle le fait avec fracas dans les autres sociétés d’Etat ? Que cachait ce silence? Ce qui montre que le peuple a été toujours trompé. Au moment de l’enquête, la Commission a été amenée à constater qu’une forte somme d’argent a été débloquée pour la construction d’un stade dénommé « Stade 2 Février » à Hahotoé et que l’architecte continue à recevoir ses honoraires pour la surveillance des travaux. Mais jusqu’ici point de stade. Qu’en est-il exactement ?
– Pourquoi la Commission n’a pas non plus rendu public son rapport sur le fonctionnement de la Caisse de Sécurité Sociale? Que cachait un tel secret ? Il fallait se taire au lieu de prendre les 5.000.000 de Togolais pour des salauds.
Dire qu’après de telles malversations, on va taper devant la porte de l’Union Européenne pour qu’elle reprenne sa coopération avec le Togo sans aucune condition ? Mais la générosité a des limites. Elle ne peut plus aller sans condition. Nos malheurs ne viennent plus de l’Occident mais de nous-mêmes. »

Motion d’Information(n°185 du 15 au 22 juillet 2002), s’interroge pour sa part : « Affaire Agbéyomé Kodjo :
Va-t-on vers un  » cessez-le-feu  » entre Eyadéma et Agbéyomé Kodjo ? »
Cet hebdomadaire, semble informé d’une « une initiative d’intermédiation entre l’ex Premier ministre Agbéyomé Kodjo et son ancien mentor, le Général Eyadéma en vue d’obtenir immédiatement un  » cessez-le-feu  » entre les deux hommes en attendant d’envisager une éventuelle réconciliation. Cette initiative émanerait d’hommes d’affaires étrangers qui avaient été, en leur temps, introduit auprès du Chef de l’Etat togolais par un certain Agbéyomé Kodjo, alors au plus haut de sa grâce dans le cercle restreint des  » hommes du Président « . »
D’après notre informateur qui a requis l’anonymat, le Chef de l’Etat togolais qui aurait été indirectement sondé à ce sujet, n’aurait pas dit un  » oui  » franc à une telle éventualité ; il se serait simplement contenté de dire que, Agbéyomé n’est pas le premier et ne sera pas le dernier à le trahir, » Cependant, analyse Frisco de Souza, « le plus dur ne fait que commencer . Agbéyomé Kodjo a de l’ambition ; une ambition présidentielle, surtout après avoir occupé les fonctions de Président de l’assemblée nationale et de Premier ministre ; mais il n’avait sans doute jamais envisagé la réalisation de cette ambition sans la bénédiction et le parapluie d’Eyadéma. Agbéyomé Kodjo découvre donc aujourd’hui la vie d’opposant radical, qui plus est, en exil, c’est-à-dire, exactement dans la même situation qu’il reprochait il n’y a pas si longtemps, à ceux qui, naguère, avaient dû se replier à l’étranger pour échapper à la mort. Agbéyomé Kodjo est-il capable de se forger un destin d’homme d’Etat ? Aujourd’hui, la réponse est  » non « . Pour nombre de Togolais, l’ancien Premier ministre n’est qu’un criminel, un pur produit d’un régime né par le crime et qui s’est conservé par le crime et la barbarie. Quoi qu’il fasse, Agbéyomé restera aux yeux de ses compatriotes, comme un  » clone  » d’Eyadéma auquel son destin est lié.
Il ne lui sera pas facile de se départir de cette image fortement négative, à moins qu’il prenne demain la tête d’une rébellion armée contre le système dont il a été l’un des plus fidèles serviteurs. Une telle option demandera du temps et des moyens financiers importants que l’on ne rassemble pas en un jour.
Si les deux camps sont en guerre ouverte, aucun n’a encore pris un avantage véritablement décisif sur le terrain. Pour les initiateurs du projet de  » cessez-le-feu  » entre Agbéyomé et son  » père politique « , ces arguments suffiraient à persuader les deux protagonistes de l’intérêt mutuel qu’ils tireraient d’une pause dans leur passe d’armes.
Mais, il semblerait que de part et d’autre, la crise de confiance soit très profonde. Agbéyomé Kodjo dit connaître les méthodes expéditives de son camp ; on peut lui faire confiance sur ce point ; en tant qu’ancien exécutant des basses œuvres, il sait de quoi il parle.
Il sait combien le régime RPT est vindicatif à l’image de son président fondateur. Agbéyomé Kodjo faisait partie de ceux qui se délectaient à Lomé II à chanter à Edem Kodjo, alors, Premier ministre d’Eyadéma, le chant de ralliement  » Woa bé lamé tou ! Woa bé lamé gban  » que chantait l’actuel président de la CPP dans les meetings du COD II.
Autre exemple, après la conférence nationale souveraine, on avait cru assister à une décrispation des tensions entre Gilchrist Olympio et le régime Eyadéma ; rien ne laissait entrevoir le guet-apens de Soudou. Marc Attidépé et trois autres militants de l’UFC y avaient laissé leur vie. Gilchrist Olympio lui-même était à deux doigts de la mort.
C’est dire donc que le régime du RPT n’a pas changé d’un pouce dans sa conception de l’exercice du pouvoir d’Etat. L’Etat togolais continue de se confondre avec la personne d’Eyadéma. Pour Eyadéma et les siens, le pouvoir n’est ni dans la rue, ni dans les urnes, mais au bout du fusil. Lorsqu’on a eu une fois, le courage de la dissidence contre le régime, on devient un ennemi à abattre. Toute tentative de cessez-le-feu ou de réconciliation n’est qu’un marché de dupe visant à apprivoiser l’ennemi pour mieux l’écraser. Le coup fatal est généralement porté au moment où l’ennemi s’y attend le moins.
Délibérément ou contraint par les circonstances, Agbéyomé Kodjo a choisi la voie de la dissidence après plus de vingt ans passés dans les sérails du pouvoir RPT. Les paroles et les écrits que l’on publie, sont comme des balles qui sortent d’un fusil ; on ne peut plus les rattraper. Agbéyomé Kodjo n’a pas d’autre alternative aujourd’hui que d’aller jusqu’au bout de sa logique de guerre politique contre le régime RPT. Se prêter à quelque initiative de  » cessez-le-feu  » ou de réconciliation équivaudrait pour l’ancien Premier ministre, à creuser lui-même la tombe dans laquelle il serait enterré vivant. Désormais, le salut pour Agbéyomé Kodjo ne pourra venir que de la victoire des forces démocratiques sur les forces du mal.
Dans sa livraison n° 581, du 11 au 17 juillet, Crocodile évoque le sort de la famille d’Agbéyomé Kodjo, à travers une interview de son épouse. Mme Kodjo y déclare entre autres : « je vis une vie de recluse qui m’a été imposée.»
Le Regard ( n°289 du 15 juillet ) relève avec dépit, que le sabotage économique et le pillage de l’OTP par son ancien directeur Kpanlou PATASSE ont été recompensés par la nomination de ce dernier comme Président de la commission des privatisations au Ministère de l’économie et des finances. Reprenant les révélations de l’ancien Premier ministre sur le passif de l’OTP ( 12 milliards à 80 milliards en 5 ans ) et ses confirmations par la Commission nationale de lutte contre le sabotage économique, le journal s’interroge sur l’impunité sidérante dont jouit M. PATASSE. Doit-on considérer que l’ex-directeur de l’office togolais des phosphates s’est livré au pillage de la société au profit de Lomé2 et avec la complicité du timonier.