29/03/2024

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Obasanjo à Paris, avec dette et pétrole

Partenaire incontournable, le président nigérian espère un geste de ses créanciers.

Par Virginie GOMEZ
lundi 23 mai 2005 (Liberation)

«Surtout ne tirez pas en l’air, vous pourriez toucher l’avion du Président.» Cette boutade traduit l’agacement des Nigérians face à l’intense activité diplomatique de leur Président. Après Washington il y a trois semaines, Olusegun Obasanjo est attendu à Paris aujourd’hui, où il restera jusqu’à jeudi. Avec l’Afrique du Sud, le géant nigérian est devenu l’autre pilier d’une diplomatie française de plus en plus contestée en Afrique, notamment au Togo et en Côte-d’Ivoire.

Cercle vicieux. Entre Paris et Abuja, l’échange de bons procédés est évident. Derrière la Grande-Bretagne, la France est le deuxième créancier du Nigeria (dont l’énorme dette extérieure avoisine les 35 milliards de dollars). Pour le gouvernement nigérian, l’enjeu est de taille. L’annulation partielle de la dette aurait des effets politiques immédiats. Récemment, une délégation de parlementaires nigérians en visite à Londres a menacé de faire voter une loi interdisant purement et simplement le remboursement des échéan-ces ; les députés ont indiqué que le Nigeria dépense quatre fois plus pour le service de la dette que pour l’éducation et quinze fois plus que pour la santé. Sans cesse en défaut de paiement, le Nigeria accumule les pénalités, il ne parvient pas à se sortir du cercle vicieux. La presse nigériane ne manque pas une occasion d’enfoncer le clou. «Malgré le pétrole, nous ne sommes pas un pays riche, notre PIB est de 320 dollars par habitant», martèle l’énergique ministre des Finances, Ngozi Okonjo Iweala.

Autre problème, le Nigeria reste classé troisième au hit-parade des pays les plus corrompus établi chaque année par Transparency International. Mais, depuis quelques mois, les têtes tombent au sommet : ministres, amiraux, gouverneurs, sénateurs, chef de la police démis de leur fonction ou sous le coup d’une procédure. Si plusieurs observateurs jugent la lutte partiale et partielle, elle n’en est pas moins inédite dans un pays considéré comme le champion toutes catégories de la fraude.

Médiations. De son côté, la France a quelques raisons d’être à l’écoute du Nigeria. Ces dernières années, la diplomatie d’Obasanjo, également président en exercice de l’Union africaine, est devenue incontournable. Togo, Côte-d’Ivoire, Soudan, Liberia, toutes les médiations passent par Abuja, le plus important pourvoyeur de soldats de maintien de la paix pour les opérations africaines. Candidat finaliste à la présidence de la Banque africaine de développement, le Nigeria brigue au nom de l’Afrique un siège permanent au Conseil de sécurité dans le cadre de la réforme de l’ONU.

Le pétrole est l’atout maître d’Olusegun Obasanjo. La production du Nigeria passera dans les prochaines années de 2,5 à 4,1 millions de barils par jour. Total est le quatrième producteur derrière l’anglo-néerlandaise Shell et les américaines Chevrontexaco et Exxonmobil. La semaine dernière, pour la première fois, un ministre français délégué au Commerce s’est rendu au Nigeria. La visite de François Loos avait des allures d’opération «pétrole contre annulation de la dette».

Le pétrole n’est pas le seul marché juteux dans ce pays de 130 millions de consommateurs. Construction, télécommunications, transport aérien, les entreprises françaises se positionnent sur les créneaux porteurs