19/04/2024

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Pleins feux sur le chorégraphe ASS-AYIGAH

Profession : orfèvre de l’expression corporelle.

Par Franck EKON

Dans son pays le Togo, il a prouvé l’essentiel de sa passion pour la danse. Depuis quelques années le chorégraphe togolais a repris à son compte un défi à la mesure de son engagement artistique : imposer également ailleurs ce qu’on a si bien démontré chez soi. En Angleterre où il vit actuellement, cette figure de la danse togolaise explose….

Le titre de la dernière création d’Ass-Ayigah, présentée au théâtre de Town Gate à Basildon-Essex, est « I am hungry » ( « j’ai faim »). Un intitulé assez parlant au regard du cheminement de ce jeune homme toujours pris en flagrant délit d’insatisfaction par rapport à son œuvre ou plus généralement par rapport au statu quo de l’art quel qu’il soit.
Cette « faim » et ce désir de nourrir la chorégraphie, Ass-Ayigah les exprime de la manière la plus simple qui soit : le travail dans l’humilité. La précocité de son intérêt pour la danse ainsi que le côté finalement hargneux du bonhomme ne gâtent rien à l’affaire. La conjonction de ces « qualités basiques » ne tardera pas à se traduire par des résultats assez probants sur la scène nationale. C’est surtout dans les années 80 que la griffe « ayigahenne » émerge au Togo et tranche d’avec la commodité et le confort des lieux communs dans lesquels se vautrent souvent ceux qui ont trop vite tendance à s’affubler du titre ronflant d’artiste.

Dans un contexte où la création et la gestion des groupes de chorégraphie n’ont pas encore connu l’inflation que l’on observe aujourd’hui, le jeune Assou Ayigah, de son vrai nom, lance « Ayigafrik », une troupe de danse qui allie la maîtrise du répertoire chorégraphique traditionnel africain avec les valeurs d’une modernité en pleine effervescence. Ce diplômé en danse et théâtre se présente d’abord comme un acteur de la synthèse artistique : s’il n’hésite pas à associer à son œuvre des contributions venues d’autres horizons, il n’en demeure pas moins conscient que c’est essentiellement de la danse que viendra la reconnaissance et par voie de conséquence, sa présence dans le chemin tortueux qu’il s’est choisi. Témoin de cette quête de la proximité avec d’autres zones de création, il assure en 1987 avec un rare talent, la chorégraphie de « la tortue qui chante », la célèbre pièce théâtrale de Sénouvo Agbota Zinsou, comme pour proclamer la fin d’un règne : celui de la rigidité des frontières entre les chapelles artistiques.

La consécration suivra tout naturellement et la sauce chorégraphique d’Ass-Ayigah prend visiblement puisque au-delà du Togo où on le qualifie de véritable phénomène, les récompenses ne tardent pas à saluer sur le plan international le travail qui a été accompli durant toutes ces années : médaille d’or en arts chorégraphiques aux 1ers jeux de la Francophonie au Maroc en 1989 avec son œuvre « et la femme découvrit l’homme » ; diplôme d’honneur de danse obtenu en 1994 à Dakar( Sénégal) ; Grand prix américain de chorégraphie en 1996 aux Etats-Unis sans compter les nombreuses manifestations de la spécialité auxquelles l’artiste togolais a pris part. Mais ce sont surtout les grandes messes d’expression corporelle au Centre culturel français de Lomé qui consacreront la tenacité de ce créateur atypique : toujours saluées comme des moments de profonde communion entre l’artiste et son public, ces rencontres riches en couleurs et en mouvements élaborés resteront dans les mémoires comme le sommet de la symbiose entre Ass-Ayigah et son milieu.
Membre depuis 2002 de la prestigieuse Hub network pour le développement de la danse africaine parrainée par la Arts Council of England, Ass-Ayigah célèbre aujourd’hui le rythme et la gestuelle vers Londres et ses environs, alternant spectacles et manifestations avec les nécessaires périodes de « pause » indispensables à la production digne d’un artiste de sa carrure.

« La perfection de la démarche chorégraphique doit être un objectif et doit participer au combat pour le développement culturel et social de l’Afrique », soutient-il avec l’assurance de ceux qui ont quelque chose à dire dans le débat sur les connexions entre l’art et le progrès social. La profession de foi en les potentialités du continent et de son pays ainsi qu’un engagement à « y mettre du sien » sont largement perceptibles dans le cheminement personnel du personnage. C’est le contraire qui eut été étonnant…

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