28/03/2024

Les actualités et informations générales sur le Togo

RAPPORT OMCT: Violence à l’égard des femmes en Togo

Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT)Case postale 21- 8, rue du Vieux Billard, CH 1211 Genève 8, SuisseTél. : 0041 22 809 49 39 – Fax : 0041 22 809 49 29 – E-mail : omct@omct.org Violence à l’égard des femmes en Togo(Texte intégral)

Rapport préparé par: l’OMCT pour la 76ème session du Comité des droits de l’homme des Nations Unies à Genève en Octobre 2002. Rédaction et recherche par Inyeza Koffigan Bigah. Edition par Carin Benninger-Budel

Pour tout renseignement complémentaire veuillez contacter le desk « femmes » à l’OMCT à l’adresse email suivante: jb@omct.org

TABLE DES MATIERES

1. OBSERVATIONS PRELIMINAIRES 2
1.1 Présentation du pays 3
1.2 Etat des conventions ratifiées et situation générale des droits de l’homme 3

2. OBSERVATIONS GENERALESSUR LE STATUT DES FEMMES AU TOGO 4
2.1 Initiatives Nationales Relatives au Statut de la Femme 5
2.2 Le Statut des Femmes au sein de la Famille 6
2.3 Les Droits de Succession des Femmes 8
2.4 Opportunités Educationnelles 9
2.5 Opportunités d’Emploi 10
2.6 Représentation Politique 10

3. VIOLENCE AU SEIN DE LA FAMILLE 11
3.1 Femmes battues 11
3.2 Le viol conjugal 12
3.3 Violence contre les employés domestiques 12

4. PRATIQUES TRADITIONNELLES DANS LA FAMILLE QUI VIOLENT LES DROITS HUMAINS DES FEMMES ET DES FILLES 12
4.1 Violence liée à la dot : enlèvement des filles pour le mariage 12
4.2 Le mariage précoce 13
4.3 Les mutilations génitales féminines 13
4.4 Le veuvage 14
4.5 Le lévirat / sororat 14
4.6 Les rites du couvent 14

5. VIOLENCE AU SEIN DE LA COLLECTIVITE 15
5.1 Viol et autres formes de violence sexuelle 15
5.2 Violence faite aux femmes sur leur lieu de travail 16
5.2.1 Harcèlement sexuel 16
5.2.2 La situation des femmes travailleuses dans les usines de zones franches 16
5.2.3 Violence faite aux travailleuses migrantes internes 16
5.3 Le trafic des enfants 17

6. VIOLENCE FAITE AUX FEMMES PAR L’ETAT 17
6.1 Les femmes en détention 18

7. VIOLATIONS DES DROITS GENESIQUES ET REPRODUCTIVES DES FEMMES 18

8. OBSERVATIONS CONCLUSIVES ET RECOMMANDATIONS 19

Violence à l’égard des femmes en Togo

1. OBSERVATIONS PRELIMINAIRES
La présentation au Comité des Droits de l’Homme des Nations Unies d’information spécifiquement liée a la violence contre les femmes fait partie intégrante du programme de violence contre les femmes de l’OMCT qui se concentre sur l’intégration d’une perspective de genre dans le travail des cinq organes de surveillance des traités des droits de l’homme. Les analyses et rapports de genre de l’OMCT entraînent une étude sur l’effet que le genre a sur les formes dans lesquelles on viole les droits de l’homme, les conséquences de telles violations et l’accès aux recours disponibles.

Bien qu’étant exhaustif sous de nombreux aspects, L’OMCT remarque que le troisième rapport périodique du gouvernement du Togo (UN Doc. CCPR/C/TGO/2001/3), hormis les mutilations génitales féminines, garde le silence sur les autres aspects de violences à l’égard des femmes. En outre, à part son étude sur l’application de l’article 3 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui traite de la scolarisation des jeunes filles et des femmes, de la position des femmes dans la famille, de leur participation au secteur du travail et à celui de la politique, le rapport du gouvernement ne se réfère à aucun moment à la discrimination à l’égard des femmes.

L’OMCT voudrait réitérer le fait que l’article 3 du ICCPR souligne l’importance de la garantie pour les hommes et les femmes de l’égalité dans la jouissance de  » tous les droits civils et politiques dans le pacte présent.  »
Le Comité des Droits de l’Homme a considéré le concept de discrimination a l’égard des femmes dans plusieurs de ses recommandations générales. Déjà en 1981, dans le commentaire général 4, le Comité des Droits de l’Homme souligna que l’on avait négligé l’article 3 du Pacte dans la majeure partie des rapports des Etats et rappela que la prévention des diverses formes de discrimination, et particulièrement celles fondées sur le sexe, requérait  » (…) non seulement des mesures de protection mais aussi des actions positives destinées à garantir une jouissance positive de ses droits  » . Ce commentaire général fut mis à jour en mars 2000 quand le Comité des Droits de l’Homme adopta un nouveau commentaire général exhaustif sur l’égalité des sexes.

Les implications du commentaire général 28 sont évidentes a la lumière du paragraphe 4 qui se réfère explicitement au fait que les Etats parties devraient  » prendre toutes les mesures nécessaires, y compris interdire les discriminations fondées sur le sexe, mettre fin aux discriminations aussi bien dans les secteurs publics que privés, qui empêchent la jouissance égale des droits « . L’intensification de la part des acteurs non-étatiques des actions visant à combattre la discrimination est très importante, étant donné l’ampleur de la violence à l’égard des femmes qui a lieu dans la sphère familiale et dans la communauté. Dans ce sens, le paragraphe 11 du commentaire général est d’une importance primordiale car il souligne que  » Pour évaluer le respect des articles 7 et 24 du Pacte qui prévoient une protection spéciale pour les enfants, des informations relatives à la législation nationale, à la situation de la violence domestique et des autres formes de violences à l’égard des femmes, y compris le viol, doivent être fournies au Comité. Le Comité devrait aussi savoir si dans l’Etat partie, les femmes qui contractent la grossesse à la suite d’un viol ont le droit de recourir à l’avortement. Les Etats parties devraient aussi fournir au comité, des renseignements sur les mesures prises pour prévenir les avortements ou stérilisations forcés. Dans les Etats parties ou l’on pratique encore les mutilations génitales féminines, des données relatives à son étendue devraient être fournies et les mesures prises pour l’éliminer. L’information fournie par les Etats parties devrait inclure les mesures de protection, les recours au niveau interne, pour les femmes dont les droits ont étés violés d’après l’article 7 « . Dans le même sens, en 1992, le commentaire général 20 concernant l’article 7 du Pacte sur l’interdiction de la torture et les mauvais traitements, prévoit que l’Etat a le devoir de  » prévoir des mesures législatives et toutes les autres qui sont nécessaires pour assurer à tous, la protection contre les actes interdits par l’article 7, que ces actes soient perpétrés par des personnes agissant dans le cadre de leurs fonctions, de leurs attributions, de leurs compétences ou dans le privé. » Le commentaire général 28 se réfère également à d’autres formes de violence à l’égard des femmes telles que le trafic des femmes et des enfants, la prostitution forcée dans le paragraphe 12, les conditions d’emprisonnement des femmes dans le paragraphe 15, la pornographie dans le paragraphe 22.

Apres avoir examiné l’application du Pacte International Relatif aux Droits Civils et Politiques en 1994, le Comité des Droits de l’Homme exprima son regret au sujet du fait que  » l’Etat partie n’avait pas encore abordé tous les facteurs et obstacles empêchant l’égalité entre les hommes et les femmes de façon à appliquer entièrement l’article 3 du Pacte.  » Ensuite, le Comité déclare que  » les cas signalés de trafic des femmes, les conséquences de certaines traditions et coutumes, de même que le manque de mesures gouvernementales efficaces en vue de promouvoir l’égalité des sexes constituent des sujets de grande préoccupation.  »

A la lumière des éléments ci-dessus évoqués et en relation avec les objectifs du programme de violence à l’égard des femmes de l’OMCT, ce rapport alternatif sur la violence à l’égard des femmes au Togo donnera dans un premier temps, un bref résumé du statut des femmes au Togo, avant de présenter aussi bien du point de vue de jure que de facto, les violences et les discriminations subies par les femmes et les jeunes filles, tant dans la sphère familiale qu’à l’échelle de la communauté. Enfin, la dernière partie de ce rapport sera consacrée aux conclusions et recommandations.

1.1 Présentation du pays
Protectorat allemand depuis 1884, le Togo était administré par les Allemands jusqu’au Traité de Versailles, où il fut partagé en deux parties placées sous mandat de la Société Des Nations et confiées à la Grande Bretagne et à la France. La partie sous mandat français accède à l’indépendance le 27 avril 1960. L’autre, la partie anglaise fut rattachée au Ghana.
Le Togo indépendant est une étroite bande dont la longueur avoisine 600km, la largeur comprise entre 50 et 150 km pour une superficie de 56600 km2. La population togolaise en 2001 est estimée à 4,7 millions d’habitants avec un taux d’accroissement annuel se situant présentement autour de 2,6 %. C’est une population extrêmement jeune. Conformément au rapport gouvernemental de 1999 sur le Développement Humain Durable au Togo, 70% des Togolais ont moins de 30 ans et près de 55% ont moins de 15 ans. Dans cette population, on dénombre environ 51,3% de femmes au niveau national et 75% en milieu rural.
Le Togo est habité par une mosaïque de peuples appartenant à des souches différentes et comporte une quarantaine d’ethnies.
L’économie togolaise est essentiellement dominée par l’agriculture et le commerce. Le Togo fait partie des PMA(Pays les Moins Avancés) et de ce fait reste beaucoup tributaire de l’aide extérieure ; cependant, en raison de la situation socio-politique -caractérisée par la lenteur de l’instauration d’un système de gouvernement réellement démocratique – que connaît le pays, les principaux bailleurs de fonds depuis pratiquement une décennie maintenant ont suspendu leur coopération avec le Togo, ce qui rend les conditions socio-économiques des populations très précaires et fragiles.
Sur le plan politique, le Togo est constitutionnellement régit par un système semi-présidentiel avec un parlement à une chambre dont les membres, de même que le Président de la République, sont élus au suffrage universel direct. L’actuel président Gnassingbé Eyadema, arrivé au pouvoir en 1967 à la faveur d’un coup d’état s’est fait réélire par deux fois en 1993 et 1998 à la tête du pays. Si l’on se réfère à la loi fondamentale du pays, il doit quitter le pouvoir à la fin du mandat en cours, soit en 2003.
Sur le plan judiciaire, la Constitution togolaise consacre l’indépendance de la magistrature, cependant les magistrats subissent souvent l’influence du pouvoir dans l’exercice de leurs fonctions surtout lors des procès de nature politique.

1.2 Etat des conventions ratifiées et situation générale des droits de l’homme
Le Togo est partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (CCPR) depuis le 24 mai 1984. Le Togo a ratifié le 30 mars 1988 le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui offre aux Etats parties l’option supplémentaire d’habiliter le Comité des droits de l’homme à recevoir et à examiner des communications émanant des particuliers. Nous regrettons cependant que le Togo n’ait pas encore ratifié le Deuxième Protocole facultatif au Pacte ci-dessus cité visant à abolir la peine de mort.
Le Togo a également ratifié sur le plan international d’autres conventions qui protègent la femme et ses droits, interdisent la violence qui leur est faite et prônent l’égalité entre les sexes. Le Togo est partie à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) depuis le 26 septembre 1983 sans émettre aucune réserve. Cependant, le Togo n’est pas partie au Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes qui a pour objectif de permettre à des particuliers ou groupes de particuliers qui ont épuisé tous les recours internes de présenter directement au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, des communications au sujet des violations de la CEDAW qui auraient été commises par leurs gouvernements. Ce protocole permet également au Comité d’effectuer des enquêtes sur des violations graves ou systématiques de la Convention dans les pays qui sont parties à la Convention et au Protocole facultatif.
Le Togo est également partie au Pacte international relatif aux droits économiques et sociaux, à la Convention contre la Torture (le Togo a fait une déclaration sur la reconnaissance de la compétence du Comité (articles 21, 22)), à la Convention relative aux droits de l’enfant (CRC) et à la Convention pour l’élimination de la discrimination raciale.
Sur le plan régional, le Togo a adhéré le 5 novembre 1982 à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples (CADHP), une charte qui est entrée en vigueur quatre ans plus tard, le 21 octobre 1986. Cette charte à l’image des autres instruments internationaux des droits humains promeut et protège les droits de l’homme en général, protège tous les individus (y compris les femmes) contre la violence, la torture ou les traitements cruels, inhumains ou dégradants et prône l’égalité entre l’homme et la femme. Ainsi l’article 2 de la présente charte garantit à  »toute personne [le] droit à la jouissance des droits et libertés reconnus et garantis dans la présente Charte sans distinction aucune, notamment (…)de sexe (…) ». L’article 3 garantit à toutes les personnes  »une totale égalité devant la loi » et  »le droit à une égale protection de la loi. ». L’article 4 quant à lui protège le droit à la vie, à l’intégrité physique et morale de tout être humain suivi de l’article 5 qui interdit la torture physique ou morale, et les peines ou les traitements cruels, inhumains ou dégradants.
En ce qui concerne la place qui est réservée à ces différentes conventions vis-à-vis de la Constitution togolaise qui est la loi fondamentale du pays, la Constitution dans son article 50 dispose que  »les droits et devoirs, énoncés dans la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et dans les instruments internationaux relatifs aux Droits de l’Homme, ratifiés par le Togo, font partie intégrante de la présente Constitution ». Plus loin, l’article 140 de ladite Constitution précise que  »les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, (…) » ; et il est même précisé à l’article 58 que le chef de l’Etat est le garant du respect des traités internationaux.

Bien que le Togo soit partie à ces différents traités et mécanismes internationaux de défense, de promotion et de protection des droits humains, la situation des droits de l’homme au Togo est peu reluisante. Les violations des droits humains sont monnaies courantes au Togo et elles sont perpétrées par les agents de l’Etat – notamment les forces de sécurité qui se livrent à des abus de tout genre dans l’exercice de leur fonction – et également au sein de la famille et dans la communauté. Ces violations des droits humains sont renforcées par l’impunité inhérente à de tels actes qui caractérise le Togo, de même que les intimidations et menaces de représailles subies par les victimes qui osent en parler et leurs familles.

2. OBSERVATIONS GENERALES SUR LE STATUT DES FEMMES AU TOGO
Sur le plan juridique des efforts sont consentis en vue de garantir aux femmes la plénitude de l’exercice de leur droit. Le Togo dispose d’un arsenal juridique pour l’épanouissement et la promotion de la femme. Ces dispositions sont contenues sur le plan de la législation nationale dans la Constitution de la 4ème République promulguée le 14 octobre 1992 ; le Code des Personnes et de la Famille découlant de l’ordonnance n° 80-16 du 31 janvier 1980 qui est actuellement en cours de révision; le Code du travail suivant l’ordonnance n° 16 du 08 mai 1974 qui dans son article 88 garantit une rémunération égale à conditions égales de travail, de qualification professionnelle et de rendement sans distinction aucune entre autres de sexe ; puis dans son article 112 protège les droits professionnels de la femme enceinte.
La Constitution togolaise, la loi fondamentale du pays comme le précise son article 159 prône l’égalité entre l’homme et la femme, le droit à la liberté et à la vie, la protection et le respect de l’intégrité physique et morale des individus y compris la femme. L’article 2 de ladite Constitution dispose que  »la République Togolaise assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race, de sexe, de condition sociale ou de religion. (…) » ; l’article 5 reconnaît le droit de vote aux individus des deux sexes remplissant les conditions fixées par la loi. L’article 10 en disposant  »tout être humain porte en lui des droits inaliénables et imprescriptibles. La sauvegarde de ces droits est la finalité de toute communauté humaine. L’Etat a l’obligation de les respecter, de les garantir et de les protéger (…) »reconnaît à tous les individus, leurs droits. L’article 11 pour sa part garantit à tous les individus sans distinction aucune, l’égalité des droits et leur égale protection par la loi en disposant que  »tous les êtres humains sont égaux en dignité et en droit. L’homme et la femme sont égaux devant la loi. (…) » En outre, l’article 13 protège le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité des individus en disposant :  »l’Etat a l’obligation de garantir l’intégrité physique et mentale, la vie et la sécurité de toute personne vivant sur le territoire national. Nul ne peut être arbitrairement privé ni de sa liberté ni de sa vie ». Un peu plus loin, l’article 21 de la Constitution togolaise interdit formellement la torture et les autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants et demande même la punition des coupables quels que soient les motifs, sans l’observation d’aucune circonstance atténuante. Cette punition au-delà de la torture est applicable à tout individu coupable d’avoir porté  »une atteinte grave et manifeste au respect des Droits de l’Homme et des libertés publiques. Cet article in extenso dispose :  »La personne humaine est sacrée et inviolable. Nul ne peut être soumis à la torture ou à d’autres formes de traitements cruels, inhumains ou dégradants. Nul ne peut se soustraire à la peine encourue du fait de ces violations en invoquant l’ordre d’un supérieur ou d’une autorité publique. Tout individu, tout agent de l’Etat coupable de tels actes, soit de sa propre initiative, soit sur instruction, sera puni conformément à la loi. Tout individu, tout agent de l’Etat est délié du devoir d’obéissance lorsque l’ordre reçu constitue une atteinte grave et manifeste au respect des droits de l’Homme et des libertés publiques. »
L’Etat à travers l’article 31  »a l’obligation d’assurer la protection du mariage et de la famille. » Cet article garantit également aux  »enfants, qu’ils soient nés dans le mariage ou hors du mariage » la même protection familiale et sociale. L’article 32 pour sa part permet l’attribution de droit de la nationalité togolaise aux enfants nés de père ou de mère togolais. L’article 35  »reconnaît le droit à l’éducation des enfants » et rend  »l’école obligatoire pour les enfants des deux sexes jusqu’à l’âge de 15 ans. » Enfin, à travers l’article 37, il est demandé à l’Etat d’assurer à chaque citoyen, l’égalité de chance face à l’emploi et de garantir à chaque travailleur une rémunération équitable :  »Nul ne peut être lésé dans son travail en raison de son sexe (…) »

2.1 Initiatives Nationales Relatives au Statut de la Femme
Les mesures prises en vue de renforcer le statut juridique de la femme et de faire d’elle l’égale de l’homme en matière de respect des droits humains et de protection devant la loi sont renforcées par les initiatives du Gouvernement togolais en faveur de la cause de la femme. Ces initiatives gouvernementales contenues dans le rapport de la Direction Générale du Plan et du Développement sur le Développement Humain Durable au Togo en 1999 portent notamment sur:

– la création d’un ministère chargé de la promotion et de la protection de la Femme. Ce ministère est appelé à promouvoir le bien-être des femmes et des enfants et à prendre en compte leurs préoccupations dans les processus de développement.

– l’adoption des stratégies globales et sectorielles de promotion de la femme comme:
 » les stratégies relatives à l’amélioration du statut juridique de la femme se traduisant par une révision du Code des Personnes et de la Famille, l’intensification des activités IEC (Information, Education, Communication) en faveur des femmes, l’intégration de l’approche genre dans la conception, l’élaboration, le suivi et l’évaluation dans tous programmes de développement socio-économique.
 » les stratégies relatives à la promotion de la femme dans le cadre de la lutte contre la pauvreté axées sur la scolarisation obligatoire des jeunes filles jusqu’à l’âge de quinze (15) ans, la réorganisation des appuis à la scolarisation des jeunes filles, la sensibilisation des parents sur la nécessité de l’éducation de la jeune fille, la multiplication des centres d’alphabétisation dans les milieux où les taux d’alphabétisation sont bas. Le gouvernement pratique même en ce moment en terme des frais d’inscription aux études, une discrimination positive à l’égard des filles qui pour un même niveau d’instruction paient un peu moins que les garçons.
 » la planification de la gestion des ressources naturelles selon l’approche de gestion des terroirs privilégiant la démarche participative en associant la femme aux prises de décisions en ce qui concerne surtout le renforcement de ses capacités en matière d’organisation et de gestion.
Comme nous pouvons le constater, les initiatives du gouvernement sont louables et il ne reste plus que toutes les dispositions soient prises pour leur mise en application effective, ce qui pour le moment n’est pas encore le cas. Par exemple, la révision du Code des Personnes et de la Famille souhaitée depuis 1999 dans le rapport sur le Développement Humain Durable au Togo est toujours en cours d’élaboration. C’est dans ce contexte que le rôle des organisations de défense, de protection et de promotion des droits humains en général et ceux des femmes en particulier ont tout leur sens.

2.2 Le Statut des Femmes au sein de la Famille
Le Code des Personnes et de la Famille (ci-après dénommé CPF) du Togo est en cours de révision et nous attendons toujours la finalisation des travaux devant conduire à la promulgation du nouveau Code. Celui qui est actuellement en vigueur comporte un certain nombre de dispositions qui protègent les droits de la femme en tant qu’être humain sur un même pied d’égalité que les hommes, instituent et régissent les rapports familiaux, notamment la liberté du choix de l’époux par la femme, le bénéfice de la réciprocité dans les rapports entre époux, la capacité juridique de la femme mariée au même titre que l’homme, la participation de la femme à l’exercice de l’autorité parentale… ; Ces dispositions se retrouvent dans les articles suivants du CPF : l’article 100 du présent code dispose que  »les époux se doivent mutuellement fidélité. Ils se doivent soins et assistance réciproques pour la sauvegarde des intérêts moraux et matériels du ménage et des enfants. » ; l’article 238 dispose que  »pendant le mariage, les père et mère exercent en commun leur autorité » ; l’article 371 autorise à la femme d’ouvrir librement un compte courant en son nom.
Ce Code comporte même quelques dispositions qui protègent principalement la femme notamment l’article 44 qui invalide tout consentement au mariage extorqué par violence, et de ce fait conformément à l’article 86(1) conduit à l’annulation du mariage. Nous pensons que ces dispositions protègent plus les femmes car dans notre pays c’est elles qui sont soumises au mariage forcé. En outre, au nombre des dispositions du CPF du Togo protégeant la femme, on peut citer entre autres, les articles 368, 378, 379. En effet, l’article 368 dispose – en cas de la communauté des biens – que  »lorsque le désordre des affaires du mari compromet les droits de la femme, celle-ci peut obtenir que lui soit confiées, par justice, l’administration et la disposition de ses biens acquis dans l’exercice de son activité professionnelle. » ; l’article 378 lu concomitamment avec l’article 379 permet à la femme en cas de dissolution de la communauté, d’exercer en premier avant le mari, le prélèvement de ses biens sur les biens de la communauté.
S’il est vrai que le CPF de 1980 consacre dans plusieurs de ses articles l’égalité de l’homme et de la femme, il n’en demeure pas moins vrai qu’il contient un certain nombre de dispositions qui sont vecteurs de discriminations à l’égard des femmes et les relèguent au second plan après les hommes. Ainsi, l’OMCT note que nombreuses sont les dispositions contenues dans la législation nationale togolaise qui de jure comme de facto, constituent de sérieuses discriminations à l’égard des femmes, des entraves à leur épanouissement et à la jouissance de leur droit au même titre que les hommes. Entre autres nous pouvons citer, en nous référant au CPF, l’article 16(1) qui dispose que la femme mariée est domiciliée chez le mari ou dans la demeure qui lui a été fixée par celui-ci ; l’article 42 qui reconnaît la polygamie et la monogamie ; cependant, conformément à l’article 52 du présent Code,  »la déclaration d’option de monogamie ou de polygamie est souscrite par les futurs époux devant l’officier de l’état civil au moment de la célébration du mariage (…) ». L’article 51 du même code autorise  »l’homme qui a opté pour le régime de monogamie de contracter un nouveau mariage en cas de stérilité définitive médicalement constatée de la femme. » Même si l’article 65 permet à la femme mariée sous le régime polygamique de s’opposer à la célébration d’un nouveau mariage par son mari si elle rapporte la preuve qu’elle-même et ses enfants sont abandonnés par le mari, en reconnaissant la polygamie, le CPF du Togo pose un handicap sérieux à la promotion des droits des femmes car de nombreuses études ont révélé que ce régime matrimonial expose la femme à la violence et à de sérieuses violations de ces droits.
L’OMCT soutient que le mariage polygamique perpétue les concepts de domination masculine, en créant des atmosphères domestiques ou les femmes sont vulnérables a des violences. La pratique de la polygamie est par essence, en conflit avec les libertés économiques, sociales et personnelles des femmes. La Recommandation Générale 21 du Comité sur l’Elimination de la Discrimination a l’égard des femmes déclare que  » les mariages polygamiques sont en opposition avec les droits des femmes a l’égalité et ces mariages peuvent avoir de graves conséquences émotionnelles et financières pour les femmes et ceux qui dépendent d’elles si bien qu’ils devraient être découragés et interdits.  »
L’article 43 fixe l’âge minimum pour contracter le mariage à vingt ans pour l’homme contre dix sept ans pour la femme, il dispose même que  »(…) Néanmoins, le Président du tribunal ou le Juge de Section, peuvent accorder des dispenses d’âge pour des motifs graves. » Une conséquence de l’application du présent article peut amener la jeune fille à arrêter son éducation beaucoup plus vite que le jeune garçon pour des raisons de mariage. En outre, la disposition prévoyant la dispense d’âge pour des motifs graves – des motifs qui n’ont pas été énumérés et que la loi ne précise pas – cela peut conduire à des mariages précoces qui par-dessus le marché, exposent davantage les femmes a la violence, y compris au viol conjugal et aux grossesses précoces qui peuvent constituer de graves atteintes a la santé des femmes.
Dans le volet des dispositions du CPF ayant un caractère discriminant à l’égard des femmes, on peut noter l’article 359, qui fait du mari, dans le régime de communauté des biens, l’administrateur des biens communs et des biens personnels des époux, sous réserve toutefois de l’article 360 qui autorise la femme qui exerce une profession commerciale séparée, de posséder l’administration et la disposition des biens qu’elle a acquis dans l’exercice de cette profession, et de l’article 361 qui autorise la femme, lorsque le mari ne s’acquitte pas dans les conditions prévues par la loi des obligations résultant du mariage, d’ester une action en justice afin d’obtenir que lui soit confiée par la justice pendant le mariage, l’administration et la disposition des biens acquis par elle dans l’exercice de son activité professionnelle. Mais combien sont les femmes, pour des raisons ci-après énumérées, – méconnaissance des droits, pesanteurs sociologiques, absence de ressources financières – sont capables d’engager une action pour faire valoir le droit qui leur est reconnu en cas de dérive de leur mari. Même en cas de décès du mari, contrairement à ce que prévoit le CPF qui demande à ce que seul le conjoint survivant exerce l’autorité parentale sur les enfants, les frères du mari défunt se refusent toujours à reconnaître et accorder à la femme l’exercice de cette autorité. En milieu rural comme urbain, toutes les couches sociales confient la tutelle et l’administration des biens du mari défunt et ses enfants à un membre de la famille du mari qui en profite souvent pour s’accaparer des biens devant servir à la prise en charge et à l’éducation des orphelins. Cette situation est la conséquence du poids de la tradition qui conçoit mal l’attribution de la responsabilité familiale à la femme. Il faut également faire cas sous cette rubrique, des difficultés rencontrées par les veuves dans la perception des pensions de veuve et d’orphelins contrairement aux dispositions de la loi fixant le régime des pensions civiles et militaires de la Caisse des retraités du Togo et l’ordonnance n° 79 du 12 novembre 1973 portant le code de sécurité sociale qui reconnaissent à tous les citoyens y compris les femmes, le droit à l’allocation familiale et à la pension (de veuve, d’orphelins…) Ces difficultés sont inhérentes au fait qu’en conseil de famille, les femmes ne sont pas directement désignées comme administrateur des biens de leur conjoint décédé.
Au nombre des dispositions qui dans la pratique sont discriminantes à l’égard des femmes, on peut noter l’article 101 du CPF qui fait du mari le chef de la famille. Bien que cet article dans les lignes qui suivent fait de la femme le remplaçant du mari dans sa fonction de chef de famille en cas d’empêchement de celui-ci et reconnaisse que le mari exerce ce pouvoir dans l’intérêt commun du ménage et des enfants et avec le concours de la femme, la réalité dans la plupart des cas s’écarte des précisions contenues dans le présent article et le mari devient très vite dans le foyer, le chef qui s’arroge le privilège d’imposer ses décisions et points de vue, ce que beaucoup de femmes en raison des croyances liées aux us et coutumes trouvent normal.
En ce qui concerne le divorce, l’article 119 du CPF autorise l’un des époux à demander le divorce lorsqu’il est soumis entre autres à des sévices et injures ; ou en cas d’impuissance ou de stérilité définitive médicalement constatée de l’un de l’autre. Bien que le CPF du Togo garantisse indifféremment aux hommes et aux femmes le droit au divorce et précise même à l’article ci-dessus cité, les raisons – dont les violences – pour lesquelles il peut être demandé, on constate que les femmes font l’objet de divorces et de répudiations abusives de la part de leur conjoint et du coup ne bénéficient d’aucun avantage lié au mariage légal. Souvent, les femmes sont aussi confrontées au non-respect par le mari de l’obligation de contribuer aux charges du ménage et à l’éducation des enfants telle que recommandée par le CPF.
Dans le volet des articles du CPF ayant un caractère discriminant à l’égard des femmes, on peut également citer l’article 109 qui permet à la femme d’exercer une profession séparée de celle de son mari à moins que celui-ci ne s’y oppose et cette opposition devra être justifiée par l’intérêt de la famille ; sinon la femme peut-être autorisée par la justice à passer outre l’opposition du mari. Dans la réalité, l’obstacle légal du mari – reconnu par le Code – à l’exercice d’une profession séparée par la femme mariée fait également partie des pratiques discriminatoires récurrentes dont les femmes sont l’objet, encore que très peu sont les femmes qui savent que la justice peut-être saisie d’une telle affaire, et même pour celles qui le savent, les réalités culturelles les empêchent de sortir une telle affaire du cadre familial. Cette disposition qui peut empêcher la femme d’exercer une profession séparée, lui permettant de disposer des revenus propres n’est pas de nature à favoriser son épanouissement et sa participation à la vie publique, économique et politique de la nation.
L’article 76 qui dispose  »seul le mariage célébré par l’officier de l’état civil a des effets légaux » et l’article 84(7) qui prononce la nullité du mariage lorsque celui-ci n’a pas été célébré par un officier de l’état civil contiennent des dispositions qui viennent contredire ou du moins affaiblir celles contenues dans l’article 75 qui dispose que  »le mariage est obligatoirement célébré par un officier de l’état civil ou un chef traditionnel qui, en matière de mariage, est investi de cette qualité. » En n’attribuant pas des effets légaux inhérents au mariage à un mariage qui aurait été célébré par un chef traditionnel, ce Code porte une atteinte grave au droit des femmes togolaises, – surtout celles des milieux ruraux qui représentent 75% des populations de ce milieu, – qui n’ont recours qu’au mariage coutumier célébré devant leurs autorités traditionnelles. En outre, l’article 95 en précisant que  »nul ne peut réclamer les effets civils du mariage s’il ne présente un acte de mariage (…) » pénalise davantage les femmes, – car ce sont elles qui sont le plus souvent exposées aux aléas du mariage – celles des zones rurales surtout étant donné que dans ces zones, très peu sont les unions qui sont attestées par un acte officiel dûment rédigé.

2.3 Les Droits de Succession des Femmes
En matière de succession, le CPF du Togo prône de jure, l’égalité entre les héritiers sans aucune distinction entre autres liée au sexe : l’article 421 par exemple dispose que  »les ascendants au même degré succèdent par tête, et par égales portions. » Ce Code reconnaît également le droit à la succession des enfants nés hors-mariage à travers l’article 413 qui dispose  »les enfants ou leurs descendants succèdent à leur père et mère, aïeux et aïeules (…) qu’ils soient issus de différents mariages ou nés hors mariage.(…) ». En outre, l’article 430 reconnaît même au conjoint survivant (y compris la veuve bien sûr) contre lequel il n’existe pas de jugement de divorce, ou de séparation de corps prononcé contre lui et passé en force de chose jugée, les droits successoraux. Cet article précise même que  »(…)lorsqu’il existe plusieurs veuves les parts fixées par lesdits articles se partagent entre elles par tête. » Les articles 421, 432 et 433 du présent Code précisent les parts qui reviennent au conjoint survivant et celles-ci vont du quart à la totalité de la succession suivant que le défunt aura laissé ou non des descendants ou des parents ascendants ou autres collatéraux (frères, sœurs, cousins…)
Il faut cependant reconnaître que de facto, la force de toutes ces dispositions du CPF en matière de succession se trouve atténuée par celles de l’article 391 qui précise que  »les dispositions du présent Titre [Des successions] ne sont applicables qu’à la succession de ceux qui auront déclaré renoncer au statut coutumier en matière de successions. Cette déclaration peut résulter soit d’un testament, soit d’une option devant l’officier d’état civil. » Au Togo, que ce soit en milieu rural ou urbain, très peu sont les personnes qui laissent à leur mort un testament ou prennent une option devant un officier d’état civil pour voir appliquer à leurs successeurs éventuels à leur mort, les dispositions du CPF en matière de succession. Cela dit, la succession continue par être régie par des règles coutumières qui en l’état, comportent de sérieuses discriminations à l’égard de la jeune fille et de la femme. Entre autres on peut citer le fait que la coutume ne permette pas aux jeunes filles ou aux femmes d’hériter de la terre ou d’autres biens immobiliers (des maisons par exemple). En milieu rural surtout, La veuve peut continuer par exploiter la terre de son mari défunt pour assurer la prise en charge et l’éducation de ses enfants jusqu’à ce que ces derniers puissent être eux-même en mesure de mettre en valeur la terre qui a été laissée par leur père ; ce qui veut dire dans ce cas que la terre n’appartient pas à la veuve, encore moins à ses enfants de sexe féminin, elle est la propriété exclusive des garçons. La jeune fille ou la femme ne peut hériter des biens immobiliers que dans le cas où elle succéderait à sa maman, et étant donné les conditions socio-économiques (que nous verrons après) de la femme renforcées par les pesanteurs des traditions et coutumes, très peu sont les femmes qui possèdent des biens immobiliers auxquels leurs filles peuvent avoir accès. Même dans le cas des biens auxquels les filles peuvent succéder en même temps que les garçons, le partage est inégalitaire et se fait toujours au détriment de la fille. Dans certaines régions du Togo par exemple, le garçon hérite deux fois plus de parts que la jeune fille et les enfants nés hors mariage ne sont pas autorisés à succéder. Parfois même -dans les milieux où le lévirat continue par être pratiqué – la femme au lieu de succéder constitue elle-même un bien de ladite succession.
Pour finir ce volet, on peut évoquer l’article 397 qui en disposant  »le refus de la veuve de se soumettre à des rites de deuil de nature à porter atteinte à son intégrité corporelle ou à sa délicatesse peut en constituer une injure envers le défunt constitutive d’indignité successorale. Le caractère non injurieux du refus sera apprécié au regard de la coutume du défunt », empêche ainsi la veuve qui refuserait de se soumettre aux rites du veuvage en raison de leurs aspects humiliants, avilissants et des traitements dégradants que ces rites véhiculent, de succéder aux biens de son époux.
2.4 Opportunités Educatives
La jeune fille togolaise n’a pas les mêmes opportunités d’étude que le jeune garçon. Même dans le cas où elle a accès à l’éducation, elle y consacre moins de temps que le garçon du fait qu’elle soit appelée quotidiennement, après les cours, à vaquer aux occupations ménagères aux côtés de sa maman pendant que son frère s’occupe lui de ses devoirs. Cette discrimination se traduit par un écart considérable entre le taux d’alphabétisation des filles par rapport à celui des garçons.
Les statistiques scolaires du gouvernement donnent pour l’année académique 1998-1999 au premier degré, 75,3% de garçons inscrits contre 69,5% de filles. Au deuxième degré, elles sont de 47,69% pour les garçons contre 32,04% pour les filles. Au niveau du troisième degré, elles passent à 22,69% pour le sexe masculin contre 6,16% pour le sexe féminin. Les statistiques sur l’éducation tirées du rapport mondial du PNUD de l’an 2002 sur le Développement Humain Durable donnent, en ce qui concerne le Togo, pour l’an 2000, un taux d’alphabétisation de 42,5% pour les femmes adultes (15 ans et plus) alors qu’il est de 63,7% pour les femmes dont l’âge est compris entre 15 et 24 ans. En outre, les mêmes sources estiment en 1998, la scolarisation nette des filles à 78% dans le primaire et à 14% dans le secondaire. Le taux brut d’inscription des femmes en 1998 dans le supérieur est estimé au Togo à 1%.
2.5 Opportunités d’Emploi
Sur le plan de l’emploi, les femmes se retrouvent essentiellement dans le commerce, l’agriculture et l’artisanat. En milieu urbain, elles sont 43% à exercer ces tâches.
70% des activités commerciales du secteur informel sont occupées par les femmes. On retrouve également une forte proportion de femmes dans l’agriculture, surtout en milieu rural où elles constituent une forte proportion de la main d’œuvre et représentent 57% des exploitants actifs. Elles assurent également des tâches secondaires telles les labours (40%), les semis (80%), les sarclages et récoltes (70%), la commercialisation des produits vivriers (90%)
Selon le rapport de 1999 sur le Développement Humain Durable au Togo publié par la Direction Générale du Plan et du Développement, l’Indice Sexospécifique de Développement Humain (ISDH) qui mesure l’importance des inégalités sociologiques entre hommes et femmes est de 0,45 faisant du Togo le 118ème pays sur les 143 classés par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) En outre, l’Indice de Participation des Femmes (IPF) – qui est établi par le PNUD pour mesurer la part des femmes à l’assemblée nationale, dans l’enseignement supérieur, les postes de direction, dans l’encadrement, les fonctions techniques et dans le revenu salarial – est très faible bien qu’ayant connu une légère progression entre 1996 et 1999 où il est passé de 0,182 à 0,185 faisant du Togo en 1999, le 100ème pays sur les 102 classés par le PNUD.
Les femmes sont les premières victimes de la pauvreté. Même sur le plan de l’agriculture et du commerce où elles représentent une proportion importante, elles connaissent généralement des situations financières précaires et fragiles en raison de l’absence des services de soutien nécessaires à la production agricole, de la discrimination dont elles font l’objet quant à leur accès à la terre, de leurs difficultés d’accès au crédit, ce qui ne leur permet pas de réaliser des investissements générateurs d’importants revenus.
L’analyse des activités non agricoles où se concentrent les femmes montre que leur travail est faiblement rémunéré et qu’elles ne peuvent en tirer qu’un revenu insuffisant. Quand elles accèdent à un emploi salarié, c’est souvent pour occuper des postes subalternes en raison de leur faible niveau d’instruction.

2.6 Représentation Politique
Sur le plan politique, très peu sont les femmes qu’on retrouve dans les instances dirigeantes et de prise de décisions du pays. Dans les différents gouvernements togolais, les femmes ont toujours été cantonnées à des postes de peu d’envergure. Elles ont souvent occupé les postes du ministère du bien-être social et de la condition féminine auquel sont parfois joint soit la santé, soit le commerce et les prix, soit l’artisanat. Dans le gouvernement actuel, on dénombre deux (2) femmes sur vingt trois (23) ministres et celles-ci détiennent les portefeuilles du ministère des Affaires Sociales et de la Promotion de la Femme et du ministère délégué auprès du Premier ministre pour la promotion du Secteur privé. Au niveau du pouvoir central, trois (3) femmes ont été nommées préfets (dirigeants de préfecture) en octobre 1991 à l’avènement du renouveau démocratique, seules deux (2) ont pu effectivement exercer leur fonction, lesquelles ont d’ailleurs été démises au bout de quelques mois sans que leur compétence n’ait été mise en cause. Présentement, on ne dénombre aucune femme sur les 30 préfets et 4 sous-préfets que compte le Togo. Au niveau municipal, seule une femme est maire au Togo. La chefferie traditionnelle au Togo ne compte que deux (2) femmes responsables de villages.
Au sein des partis politiques, les femmes se contentent de jouer les seconds rôles. Dans les années 90, à l’avènement du pluralisme politique, deux partis dont les responsables sont des femmes ont fait leur apparition sur l’échiquier politique. Elles n’ont pas pu faire leur preuve sur le terrain, elles sont apparues dans de rares prises de position publique comme des appendices des autres partis dirigés par des hommes et qui ont plus d’envergure. Dans les corps électifs, la représentation des femmes a rarement dépassé 7% de la composition. Le plus fort taux de représentation est de 7,57%, et il a été enregistré dans l’assemblée nationale de la 3ème République de 1979 à 1984. La première assemblée Nationale de la 4ème République comptait une (1) femme parlementaire sur 81 soit 1,23% de la composition, l’actuelle qui se trouve être la deuxième compte cinq (5) femmes parlementaires sur 81 soit 6,17% de la composition du parlement.
3. VIOLENCE AU SEIN DE LA FAMILLE
Dans le cadre de ce rapport, en raison de l’absence des statistiques relatives à la violence faite aux femmes, une étude nationale portant sur un échantillon de 1020 femmes âgées de 16 ans et plus a été réalisée par l’ONG Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT-TOGO) Ce sont les résultats de cette étude qui constituent la source des données statistiques fournies dans cette partie du rapport.

3.1 Femmes battues
La violence domestique est un problème grave au Togo qui n’épargne aucune couche socio-économique ou niveau d’éducation. 85% des personnes interrogées connaissent au moins une femme qui en été victime et 52% d’entre elles en l’ont été elles-mêmes.
Au Togo, cette forme de violence est traitée comme un délit ordinaire en ce sens que le Code pénal ne prévoit aucune disposition qui traite spécifiquement d’elle. Cela dit, la sanction applicable à l’auteur d’une violence faite à une femme ne diffère pas de celle qui s’applique à l’auteur du même type de violence commise sur un homme. A ce jour, il n’existe aucun projet d’élaboration d’une loi spécifique sur la violence domestique.
Certaines dispositions même du Code pénal, notamment celles de l’alinéa c de l’article 56, en excusant  »les violences volontaires et homicide commis par un époux sur son conjoint et le complice de celui-ci au moment où il les a surpris en flagrant délit d’adultère »- bien qu’ils concernent les époux indifféremment de leur sexe – dans la pratique exposent plus les femmes, car la mentalité populaire et les considérations des us et coutumes font croire que seules les femmes sont coupables d’adultère.
Au Togo, l’étude a révélé que 93% de la violence domestique commise sur la femme le sont par leur époux et elle est pratiquement réglée dans le contexte familial. En effet, seulement 28% des victimes osent dénoncer le phénomène et la quasi-totalité des plaignants (86%) ont recours au chef de famille ou au chef traditionnel. Les raisons qui conduisent à la non-dénonciation de ce phénomène sont multiples. On peut citer entre autres, l’ignorance par les femmes de leur droit, le manque de moyens financiers pour le suivi des affaires, les traditions qui dès leur plus tendre enfance éduquent les femmes à accepter la supériorité de l’homme et à voir en lui le chef de famille qui peut user à loisir de son autorité. Il faut également ajouter que les pesanteurs sociologiques, notamment la crainte des représailles et les réactions de la société vis-à-vis d’une femme qui porterait plainte contre son époux jouent un grand rôle dans l’entretien du silence autour de ce phénomène qui pourtant au regard des statistiques est d’une ampleur non négligeable.
Quand ces cas arrivent au niveau de la police, l’étude nous a montré que les agents de la police ont généralement deux types de réaction : certains sont disposés à enregistrer la plainte normalement ; d’autres sans toutefois refuser formellement l’enregistrement de la plainte conseillent plutôt à la victime d’essayer d’abord la résolution au niveau du noyau familial. Les tenants de cette ligne de conduite l’expliquent par le fait qu’habituellement, eu égard à leur expérience, ces genres de plainte sont souvent retirées après ou abandonnées sans suite par le plaignant. C’est souvent sous la pression des membres de la famille, de la belle-famille, et des amis, que les rares plaignants, – qui ont le courage de porter, au niveau de la police ou de la justice, les cas de violences domestiques – sont poussés à retirer leur plainte.
Les agents de sécurité de même que ceux de l’administration judiciaire ne reçoivent pas de formations spécifiques, adaptées au traitement de la violence domestique.

3.2 Le viol conjugal
La violence physique perpétrée par un partenaire peut inclure le viol et la violence sexuelle. Près de 22% des enquêtés ont déclaré avoir été victimes du viol conjugal. Les statistiques sur ce phénomène sont pratiquement inexistantes et celles que nous disposons ne traduisent qu’une infime partie de la réalité, étant donné que dans pratiquement toutes les sociétés togolaises, les relations sexuelles entretenues sous la contrainte, lorsque les conjoints sont mariés ou vivent ensemble, ne sont pas assimilées à un viol. En outre, les pesanteurs sociologiques et les tabous culturels qui pèsent sur les relations sexuelles font que la plupart des victimes éprouvent d’énormes difficultés, même de façon informelle, à dénoncer ce type de violence.
La législation togolaise ne met aucune différence entre le viol conjugal et le viol, c’est ce qui fait d’ailleurs qu’on ne parle nulle part dans les lois de viol conjugal. Même certains praticiens du droit ont du mal à accepter qu’on puisse taxer de viol, les relations sexuelles entretenues sous la contrainte, lorsque les conjoints sont mariés ou vivent ensemble.

3.3 Violence contre les employés domestiques
Ce type de violence touche plus de 60% des employés domestiques. Dans la plupart des cas, ces employés qui sont pratiquement des jeunes filles et femmes sont soumis à de pénibles et longues heures de travail. Par-dessus le marché, elles sont privées de salaire, de nourriture, de soins en cas de maladie. Parfois, elles font l’objet de harcèlement ou d’abus sexuels de la part du mari ou des enfants de leur patronne.
De même que pour la violence au foyer, cette forme de violence n’est pas souvent dénoncée par peur surtout pour les victimes de perdre leur emploi, mais également en raison du fait qu’ils méconnaissent leur droit et passent la quasi-totalité de leur temps au cours de la journée à vaquer aux occupations domestiques. Elles ne sortent que pour des tâches ponctuelles, ce qui les isole de leur communauté et de leur famille, encore que la plupart des victimes proviennent des zones rurales.
Malgré l’ampleur du phénomène, le Code pénal togolais ne prévoit pas spécifiquement de dispositions relatives à cette forme de violence. Lorsque, ces cas de violence sont portés au niveau de la justice – ce qui est rare au Togo bien que cette violence se produise souvent – ils sont traités comme les autres formes de violence et ce conformément aux dispositions prévues aux articles 45 à 49 et 51, 52 du Code pénal togolais (CPT)
Le gouvernement ne prend aucune mesure particulière pour combattre le phénomène de la violence faite aux domestiques. Cela pourrait s’expliquer par le fait que les autorités publiques ne se rendent pas compte de l’ampleur du phénomène, étant donné qu’il n’y a pratiquement pas de données statistiques sur celui-ci et qu’en outre, très peu sont les victimes qui osent porter plainte pour dénoncer cette forme de violence.
4. PRATIQUES TRADITIONNELLES DANS LA FAMILLE QUI VIOLENT LES DROITS HUMAINS DES FEMMES ET DES FILLES
L’OMCT remarque avec inquiétude que certaines pratiques traditionnelles au Togo entravent l’application efficace du Pacte en ce qui concerne les femmes et les filles.

4.1 Violence liée à la dot : enlèvement des filles pour le mariage
Au Togo, dans la quasi-totalité des communautés, la famille de l’époux doit payer à celle de la fille, un prix communément appelé  »dot » qui se compose des biens matériels et financiers. Même en cas de dissolution de mariage, au regard de la coutume, la femme continue d’appartenir au précédent mari tant que le montant qu’il a versé pour la dot ne lui a pas été remboursé.
Dans certaines contrées du Togo encore, bien que ce phénomène est en voie de disparition, les parents perçoivent sur les jeunes filles, – dès leur naissance ou bien avant qu’elles aient atteint l’âge de pouvoir prendre une décision en ce qui concerne leur mariage -, la dot. De nos jours, il arrive souvent que ces filles refusent plus tard le mari qui leur est proposé ; alors, les parents, soucieux de faire respecter leur image et la parole donnée passent par tous les moyens pour contraindre leur fille au mariage. C’est là que survient la violence, car généralement, dans ces cas, les filles sont enlevées et conduites de force au foyer du mari. Dans ces cas de figure, même au foyer, les filles continuent par subir diverses formes de violence – physique et psychologique – de la part de leur époux et de leur belle-famille jusqu’à ce qu’elles acceptent leur mari.
Le Code des Personnes et de la Famille (CPF) du Togo fait allusion au mariage forcé, en précisant dans son article 44 que  » chacun des futurs époux, même mineur doit consentir personnellement au mariage. Le consentement n’est point valable s’il est extorqué par violence ou s’il n’a été donné que par suite d’une erreur sur l’identité physique, civile ou sur une qualité essentielle telle que l’autre époux n’aurait pas contracté s’il avait connu l’erreur. »
Bien que la violence liée à la dot avec pour corollaire, les mariages forcés ait encore lieu dans certaines communautés togolaises, aucune disposition administrative ou pénale dans la législation togolaise ne prévoit les sanctions à appliquer aux auteurs de cette forme de violence ou encore moins les réparations dont peuvent bénéficier les victimes.

4.2 Le mariage précoce
Dans certaines contrées du pays, dans les communautés musulmanes et villageoises surtout, il arrive que des filles soient données en mariage dès l’âge de 12 ans, à des hommes qui sont parfois quatre fois au moins plus âgés qu’elles. Divers motifs d’ordre traditionnels, religieux et économiques sont souvent avancés pour expliquer ce type de mariage. Entre autres on peut citer le fait que les parents pensent qu’en mariant tôt leur fille, ils garantissent sa virginité – qui dans certaines religions, est un facteur déterminant dans le mariage-, soulagent la famille de la charge d’une bouche en plus à nourrir…
Bien que le CPF dans son article 43 fixe l’âge minimum pour contracter le mariage à dix sept ans pour la femme, aucune disposition administrative ou pénale dans la législation togolaise ne prévoit les sanctions encourues par les contrevenants qui se livreraient à des mariages précoces et forcés. En outre, aucune mesure de réparation n’est prévue à l’endroit des victimes.

4.3 Les mutilations génitales féminines
Les mutilations génitales féminines qui consistent en l’ablation totale ou partielle des organes génitaux externes de la jeune fille ou en d’autres mutilations infligées à ces organes, constituent une violence extrême parce que pratiquées sans anesthésie avec des instruments qui en fonction de leur état rudimentaires sont des vecteurs de diverses maladies.
L’action concertée du gouvernement et des ONG de même que l’adoption récente, le 17 novembre 1998 d’une loi – portant interdiction des mutilations génitales et punissant ceux qui les pratiquent ou les favorisent – votée par l’Assemblée nationale togolaise le 29 octobre 1998, a fait considérablement reculer le phénomène. Avant l’adoption de la loi, un travail de fond en matière de sensibilisation a été entrepris par le gouvernement et les ONG en direction de la société civile, notamment les chefs traditionnels, les pratiquants de ces rites, les parents des enfants etc… pour leur expliquer les méfaits de cette pratique et les raisons qui poussent à son abandon.
De nos jours, ces mutilations ne se pratiquent plus que dans quelques contrées éloignées à dominance musulmane. Cependant, l’OMCT remarque avec inquiétude que le gouvernement a observé une relâche dans la prise de mesures visant à l’éradication des MGF dans les zones où cette pratique continue par avoir droit de cité.

4.4 Le veuvage
Le veuvage constitue une pratique discriminatoire en ce sens que dans certaines communautés, les hommes n’y sont pas soumis et même dans les cas où ils se soumettent, contrairement aux femmes, ils ne subissent que des cérémonies très brèves et symboliques.
Dans pratiquement toutes les communautés togolaises, la femme qui perd son mari doit se soumettre aux rites du veuvage. Bien que les pratiques liées à ce rite connaissent des améliorations, il faut tout de même noter que le veuvage continue par être réalisé dans des conditions inhumaines et dégradantes dans certaines régions du pays. Enfermée dans la chambre et privée de lumière pendant une durée variant suivant les régions et comprise entre 7 et 21 jours, la femme qui subit les rites du veuvage se voit le crâne rasé, elle doit être de torse nu – parfois pour tout vêtement, elle n’est autorisée qu’à porter un cache-sexe – et dormir à même le sol. Au cours de cette période, dans certaines contrées, elle n’est pas autorisée à manger de cuire dent ou se laver les mains après avoir mangé.
Certaines communautés perçoivent également le veuvage comme une pratique destinée à établir la preuve de l’implication ou non de la femme dans le décès de son mari. A cet effet, les membres de la famille du défunt se basent sur certains faits qui peuvent survenir au cours du veuvage pour situer, conformément à des considérations traditionnelles, la responsabilité de la femme dans le décès de son conjoint. Ainsi, dans certaines régions, on croit que la veuve qui pendant les cérémonies du veuvage, va aux besoins (selles) plus d’une fois dans la journée a une responsabilité dans la mort de son époux. Il en est de même de celle qui ne parvient pas à trouver des larmes lors des cérémonies préalables au rasage de sa tête. Le veuvage pour certaines communautés permet également de vérifier si la femme du vivant de son mari lui a été fidèle et n’a pas commis d’adultère.
Il faut préciser qu’avec l’action des ONG et de certains responsables traditionnels notamment les chefs, les pratiques du veuvage connaissent des améliorations portant essentiellement sur les conditions déshumanisantes, la réduction du temps des cérémonies surtout pour les femmes exerçant une profession publique. Tout récemment, les autorités traditionnelles d’une région située au sud-ouest du pays (préfecture de Kloto) ont décidé de ne plus soumettre leurs populations aux pratiques du veuvage.

4.5 Le lévirat / sororat
Une pratique dans certaines communautés – surtout villageoises – du pays, qui somme toute est en voie de disparition, veut qu’après la période de deuil, la femme choisisse, pour son remariage, entre ses beaux -frères, celui qu’il souhaite épouser s’il a chance que ce dernier ne lui est pas imposé. La femme est alors considérée comme un constituant de la propriété de son époux et de sa famille. Parfois, dans les couples polygames, c’est à l’aîné de la famille qu’on demande de prendre en mariage la veuve, c’est-à-dire la coépouse de sa maman ou encore c’est à la sœur d’une femme qui vient de décéder qu’on demande d’épouser le mari de la défunte.
Les tenants de cette pratique pensent que le nouvel époux ou la nouvelle épouse appartenant à la famille du défunt, il sera plus disponible à se consacrer à la garde et à la prise en charge des orphelins.
A priori, ces pratiques n’ont rien de contraignant, mais la crainte pour les femmes – qui représentent la quasi-totalité des victimes de ces pratiques – de se voir retirer la garde de leurs enfants, le droit à la succession des biens de leur époux ; mais aussi les pesanteurs sociologiques font qu’elles sont souvent obligées – surtout en milieu rural – de s’y conformer.

4.6 Les rites du couvent
Dans la pratique, les rites du couvent varient d’une localité à une autre et ont des fonctions diverses. Dans certains milieux, elles servent à préparer les jeunes, surtout les filles, à la vie d’adulte et au mariage. Dans d’autres localités, elles contribuent beaucoup plus à former des adeptes des fétiches et ces derniers sont alors préparés à les servir. A leur sortie du couvent, les adeptes portent un nouveau nom qui leur aura été donné par le fétiche et ne doivent plus répondre à leur ancien nom.
Le critère de sexe n’intervient pas de facto dans le choix des personnes qui doivent entrer au couvent ; cependant, on constate que le nombre des filles qui y entrent dépasse largement celui des garçons. Les couvents ne sont pas mixtes.
Généralement, ces rites se font hors du village et durent au minimum 3 mois. Les initiés et les maîtres du couvent pensent que ces rites ont un caractère sacré et de ce fait ne veulent pas aller en détail dans la description des pratiques qui y ont cours. A cet effet, bien que certaines de ces pratiques puissent êtres dégradantes et déshumanisantes, il est difficile de dire avec précision sur quoi porte leur aspect inhumain et dégradant.
Cependant, ces pratiques ont quand même un caractère violent car, avec la modernité et l’influence des religions monothéistes, de plus en plus  »d’appelés » ne sont plus disposés à entrer au couvent. Ils sont alors contraints d’y entrer et ceux qui tentent de s’échapper sont enlevés et conduits par force au couvent. En outre, la menace de la colère du fétiche qui pourrait accabler de conséquences graves – telles que la folie, les maladies incurables – quiconque oserait lui désobéir oblige certaines personnes à accepter d’entrer au couvent.

5. VIOLENCE AU SEIN DE LA COLLECTIVITE
5.1 Viol et autres formes de violence sexuelle
L’article 87 du Code Pénal définit le viol comme le fait  » [d’]imposer par fraude ou violence des relations sexuelles à autrui contre son gré. » Cette définition ne précisant pas ce qui peut être entendu par  »relations sexuelles », il est difficile de savoir pas si elle prend en compte les actes sexuels qui vont au-delà de la pénétration du vagin par le pénis tels que, la pénétration d’une femme avec d’autres parties du corps ou avec des objets, le sexe oral, le rapport anal. Conformément aux dispositions du même article,  » Tout auteur ou complice du viol sera puni de cinq à dix ans de réclusion. » La peine est portée à 20 ans  » (…) si les auteurs ont imposé à la victime plusieurs relations sexuelles ou encore si les violences exercées ont occasionné soit une grossesse, soit une maladie ou incapacité de travail excédant six semaines. Il en sera de même si la victime était âgée de moins de 14 ans. »
L’attentat à la pudeur est défini sous l’article 84 du Code Pénal comme  » (…) tout attouchement opéré contre son gré sur le corps d’autrui dans le but d’exciter les sens. » Conformément à l’article 86, toute personne coupable d’attentat à la pudeur  »(…)sur une personne de plus de 14 ans sera punie d’un à cinq d’emprisonnement. » La peine sera portée de 5 à 10 ans de réclusion  »(…) si l’attentat a été accompagné de violences exercées par plusieurs, ou s’il est résulté des violences une maladie ou une incapacité de travail excédant six semaines. » L’article 85 du même code punit l’auteur de  »(…) l’attentat à la pudeur commis sans violence sur un enfant âgé de moins de 14 ans (…) d’un à cinq ans d’emprisonnement » La peine est portée de 5 à 10 ans de réclusion si l’enfant victime a été l’objet de violence ou de menace de la part du coupable.
Bien que ces violences infligent d’indicibles souffrances physiques et psychologiques à la victime, cette dernière, tout comme pour le viol conjugal, réagit par le silence, ce qui rend difficile l’appréciation de l’étendue du phénomène au Togo. Ce silence est entretenu