18/04/2024

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Togo : Historique de l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC)

«On peut s’entendre avec l’adversaire sur des broutilles; mais l’on ne saurait s’accorder avec lui sur des questions de vie ou de mort» Léon Trotsky

Portée sur les fonts baptismaux par son congrès constitutif en date du 10 octobre 2010, l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC) est fille d’une scission de l’Union des Forces de Changement (UFC). Au fait, l’ANC, c’est la véritable UFC sous un autre … vocable. Or, l’UFC plonge, elle-même, ses racines profondes dans le mouvement patriotique togolais qui vit le jour avec la naissance du Togo lui-même. Il s’ensuit que l’ANC est une authentique et incontestable résurgence du vieux mouvement patriotique togolais.

Parlons donc un peu de l’UFC. Elle a été créée le 1er février 1992, en tant que fédération de huit partis politiques : UTR (Unité Togolaise et Réconciliation), MTD (Mouvement Togolais pour la Démocratie), PDU (Parti pour la Démocratie et l’Union), UDS (Union pour la Démocratie et la Solidarité), PFC (Parti des Forces de Changement), ATD (Alliance Togolaise pour la Démocratie), SDT (Social-Démocratie Togolaise), FCDDT (Front pour la Conquête et la Défense de la Démocratie au Togo). Huit organisations se réclamant de l’héritage des partis de l’Ablodé, en premier lieu du Comité de l’Unité Togolaise (CUT), qui avaient conduit notre pays à l’indépendance.

Cette fédération devint un parti unitaire, avec la même appellation, suite aux divergences qui ont surgi entre les partis membres, au sujet de la participation de la soi-disant « mouvance présidentielle » et de l’opposition togolaise à la « Commission Mixte Paritaire » (constituée le 26 août 1992) et de la signature de l’Accord de Ouagadougou le 11 juillet 1993.

La fédération fut donc dissoute et l’UFC se transforma en un parti unitaire, bénéficiant, entre autres choses, d’adhésions collectives et individuelles de membres des anciens partis fédérés. M. Gilchrist Kwami Sylvanus Olympio aura assumé les fonctions de président national de l’UFC de la création de ce parti jusqu’au 26 mai 2010. Á ce titre, dans son livre (à vrai dire de la plume de M. Eric Armerding) ‘’Mon combat avec et pour le Peuple togolais’’. (Ed. Balance, Charleroi, 1998, pp. 10), Gilchrist Olympio dit : « Quand je vis la foule immense et enthousiaste qui vint m’accueillir à mon retour au pays le 7 juillet 1991 après plus de vingt années d’exil, une question pressante m’arracha à la profonde émotion qui m’étreignait : ‘’Que veut le peuple togolais de moi et que puis-je lui apporter ?’’ La réponse était pourtant simple. J’y avais souvent réfléchi. Mais à cet instant précis, au contact de la foule pleine d’allégresse, elle devint exigence. C’était le CHANGEMENT. »

Plus loin, pp. 125-127, s’agissant du projet de société de l’UFC, le même auteur écrit : « Ainsi, dès sa création, l’UFC montra une volonté manifeste de rassemblement, d’union et de changement qui se dégage de ses statuts, à savoir :
– regrouper, unir et organiser tous les citoyens de la République togolaise appartenant au courant politique fondé sur la liberté de pensée, la démocratie politique et la démocratie sociale ;
– mobiliser tous les citoyens de la République togolaise en vue du triomphe de la pensée démocratique, des idées de liberté, de justice sociale, d’égalité de droit, de tolérance, de défense des intérêts tant des individus que des masses ;
– développer le sentiment national, ceux de la solidarité, du patriotisme, le sens du travail, de la probité et de la dignité au sein de ses membres ;
– contribuer à la promotion, à l’instauration et à la défense de la démocratie en République togolaise, à la promotion et à l’instauration d’un gouvernement fondé sur les lois et l’équilibre social ;
– contribuer à la défense de la forme républicaine de l’Etat ;
– contribuer à la promotion et à la sauvegarde des droits de l’homme en République togolaise, en Afrique et partout ailleurs dans le monde ;
– contribuer à la défense de la souveraineté nationale, à la sauvegarde de l’intégrité territoriale et de l’unité nationale ;
– étudier et proposer la mise en place de mesures de développement économique les plus appropriées pour le progrès harmonieux des différentes régions du Togo et la coopération internationale, le tout dans le cadre d’une stratégie d’intégration sous-régionale et régionale ;
– rechercher l’unité d’action avec toutes les organisations nationales et étrangères qui poursuivent des buts similaires ;
– l’Union des Forces de Changement (UFC) proscrit en son sein et combat en République togolaise, en Afrique et partout ailleurs dans le monde, l’intolérance, le tribalisme, le régionalisme, le racisme, tout fanatisme, l’incitation et le recours à la violence sous toutes ses formes ;
– le parti Union des Forces de Changement (UFC) combat en son sein toutes idées de sectarisme, de népotisme, de corruption et de féodalisme.

« L’action prioritaire de l’UFC étant d’œuvrer pour un changement vrai et profond, le parti veut poursuivre les objectifs cité en s’appuyant sur un code éthique de comportement et de développement qui doit devenir la norme et le fondement du redressement de la nation togolaise. Cette nouvelle éthique politique doit inspirer l’attitude de l’homme public face à l’argent, au bien public, à ses responsabilités vis-à-vis de la patrie et au respect des personnes. Ce code éthique doit permettre aux Togolais de s’engager tous ensemble à œuvrer pour la moralisation de la vie politique et pour l’avènement d’une nouvelle société où le mot politique ne sera plus synonyme de duperie, de mensonge, de vils calculs électoralistes ou de non-respect de la parole donnée. Ce sont précisément ces statuts et ce code de comportement qui sous-tendent l’action politique et le programme économique et social du parti, pour former le Projet de société que nous proposons au peuple togolais.

« Un projet de société est aussi, et d’abord, un projet de développement. Mais qu’est-ce que celui-ci ? C’est toute une dimension éthique et humaine que les statuts de l’UFC ont pris en considération pour fonder leur ambition de réconciliation nationale. L’indépendance avait certes constitué un grand dessein, mais elle ne pouvait être que l’étape initiale, la première condition de la formulation et de la mise en œuvre d’un véritable projet d’avenir commun à tous les citoyens et citoyennes de notre pays.
« Il est question d’un projet de développement, et non pas uniquement d’un objectif de croissance exprimant les seuls progrès économiques. Depuis maintenant plusieurs dizaines d’années, la notion de développement correspond à un processus tant politique que social et culturel, elle correspond aussi à une évolution positive des personnes et de tous les groupes auxquels elles appartiennent : villages, communautés plus larges, qu’elles soient éthiques, professionnelles, religieuses, et aussi de la nation.

« Un projet de développement, c’est aussi le mouvement d’une société vers l’avenir. Il s’inscrit naturellement dans une conception élargie de l’environnement du Togo, comprenant les pays voisins, le continent africain en son entier et, plus largement, la communauté internationale.

« Les principes et les grandes lignes de la politique proposée par l’UFC étant ainsi définis, il convient de préciser les divers éléments de la stratégie permettant sa mise en œuvre, c’est-à-dire les objectifs d’un processus de changement social négocié. Cette négociation démocratique s’impose comme une urgence si nous voulons éviter à l’avenir les dérèglements et les contestations. »

Pour ce qui concerne le programme d’actions de l’Union des Forces de Changement, le lecteur est invité à consulter le document confectionné et abondamment diffusé par le parti à l’occasion des élections présidentielles togolaises de juin 1998. Document intitulé : TOGO DEBOUT UNISSONS-NOUS POUR LE CHANGEMENT

Ce programme a été édité sous la forme d’un MANIFESTE. En tout état de cause, en voici les points clés, la quintessence :

« Favoriser l’expression politique et l’alternance au pouvoir en redonnant la parole au peuple souverain à travers l’organisation d’élections libres et démocratiques.

Ré-établir la sécurité, notamment en renforçant le rôle de la police citoyenne et d’une armée républicaine.

Mettre en œuvre une réforme à long terme des forces armées, dans le but de réduire les effectifs, d’équilibrer leur composition ethnique, de développer l’esprit de citoyenneté chez le soldat et son adhésion aux valeurs républicaines et de réduire le poids des dépenses militaires dans le budget national.

Promouvoir l’Etat de droit, à travers une séparation réelle entre les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire.

Mettre en œuvre un plan de sauvetage de l’économie, visant à rétablir les grands équilibres macro-économiques et budgétaires, à endiguer la criminalité économique, à favoriser l’investissement productif, à créer des emplois et à stimuler la production agricole à travers une meilleure rémunération des planteurs, et améliorer la production vivrière pour assurer l’autosuffisance alimentaire.

Mettre en œuvre un plan de réhabilitation sociale à long terme, visant à répondre aux besoins socioculturels élémentaires de la population, notamment en matière d’accès à la santé et à l’éducation, à l’information et à un habitat décent.

Mettre en œuvre un programme d’éducation de masse, soutenu par l’Etat et la société civile, visant à développer le sens de responsabilité des citoyens, condition préalable au développement et à tout véritable changement démocratique. »

(Cf. Dossier de presse sur www.ufctogo.com.)

Très tôt, l’UFC renoua avec le patriotisme togolais, avec l’Ablodé de nos pères, mères et aîné(e)s. Elle devenait, de ce fait, le principal parti sur la scène politique de la Terre de nos Aïeux : le parti le plus menaçant… pour le régime rptiste.

Alors, le 05 mai 1992, le terrible attentat de Soudou allait coûter la vie à Marc Messan Atidépé et à d’autres valeureux militants, et blesser grièvement Gilchrist Olympio et autres compagnons de route.

Mais ce cynique attentat allait, dialectiquement, booster la Cause et la marche militante de l’UFC. Alors, telle la chouette de Georg Wilhelm Friedrich von Hegel – au crépuscule – l’Union des Forces de Changement va maintenant prendre son envol, et, très vite, atteindre la cime de popularité qu’avaient atteinte le Comité de l’Unité Togolaise (CUT) et la JUVENTO dans les années 1946 / 1960.

Tant et si vrai que l’UFC gagnera, haut la main, toutes les élections auxquelles elle prendra part de 1998 à 2010 ; cependant que le RPT lui refusera systématiquement l’accession aux rênes du pouvoir d’Etat. Et ce, par la force d’armes modernes de guerre…

L’UFC n’avait, toutefois, jamais perdu l’espoir. Malheureusement, à partir de l’élection présidentielle de 2003, une pernicieuse crise commença à couver à la tête de ce parti. D’abord anodine, cette crise allait s’aggraver et déboucher sur un irrémédiable clash le 26 mai 2010 : date à laquelle Gilchrist Olympio signa, avec le RPT, un accord contre-nature qui mit le feu aux poudres…

Á ce sujet, et à juste raison, Léon Trosky dit : « On peut s’entendre avec l’adversaire sur des broutilles ; mais l’on ne saurait s’accorder avec lui sur des questions de vie ou de mort ».

Et, de fil en aiguille, naîtra, le 10 octobre 2010, l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC). L’ANC dont l’actuel président national n’est autre que l’ex-Secrétaire général de l’UFC : M. Jean-Pierre Fabre.

En abandonnant l’UFC, l’ANC en a emporté la substantifique moelle, l’esprit éclairant, l’âme vivante, l’éclatant dynamisme… En tournant le dos à l’UFC, l’ANC est partie avec le gros – véritablement avec le gros – des troupes combattantes de l’Union des Forces de Changement…

Les projet de société et le programme de gouvernement de l’ANC sont les mêmes que ceux de l’UFC, mais aujourd’hui en voie de réorientation, de réajustement, d’actualisation…

En tout état de cause, l’idéal de l’ANC se décline par le cri du tam-tam ancestral de ralliement : Ablodé !

« Le mot d’ordre d’Ablodé qui, dès les premières heures de la lutte a motivé et mobilisé les combattants de la liberté, avait pour finalité : la démocratie, la justice et la paix. La démocratie, parce que nous voulons décider de notre propre destin d’hommes libres. La justice, parce que nous aspirons à une société de partage et de solidarité. La paix, parce que nous voulons créer une nation de non-violence où tous les citoyens se sentiront en sécurité pour participer à l’œuvre de construction nationale.
C’est cela l’Ablodé, héritage qui nous a été légué par les Pères fondateurs de la Nation togolaise et que nous voulons et devons perpétuer par notre combat contre nos tyrans et les adversaires de notre indépendance. » (Eric Armerding).

Á présent, avec des ailes délestées…, l’ANC vole allègrement comme la force centrale, motrice, de l’opposition togolaise rassemblée au sein du FRAC (Front Républicain pour l’Alternance et le Changement), d’une part, et du CST (« Collectif SAUVONS LE TOGO ! », d’autre part. L’ANC est devenue, à présent, tout simplement, la force motrice de la vie politique sur la Terre de nos Aïeux…

Combattants de la grande Alliance Nationale pour le Changement ! Toujours en avant !

Par notre Foi, notre Courage et nos Sacrifices, la Démocratie vaincra au Togo !

Lomé, le 10 avril 2012
Par Godwin Tété

Ainsi donc, à mon sens, faire l’historique de l’ANC revient à revisiter, en raccourci, l’historique de l’UFC. Quant au dit patriotisme togolais, le lecteur est instamment convié à consulter les ouvrages suivants :
(i) Têtêvi Godwin Tété-Adjalogo : ‘’De la colonisation allemande au Deutsche-Togo Bund’’. Ed. L’Harmattan, Paris, 1998.
(ii) Divine Edem Kobla Amenumey : ‘’Le mouvement de la réunification des Ewé’’- Une histoire politique’’. (Traduit de l’anglais par Godwin Tété). Ed.L’Harmattan, Paris, 2009.
(iii) Têtêvi Godwin Tété-Adjalogo : ‘’Histoire du Togo. La Palpitante Quête de l’Ablodé (1940 – 1960)’’. Ed. Auteurs du Monde, Paris, 2006.
(iv) Têtêvi Godwin Tété-Adjalogo : ‘’Histoire du Togo. La longue nuit de terreur (1963 – 2003). Editions A. J. Presse, Paris, 2006, (en 2 volumes).