Togo: engouement et mystère autour d’une « pierre sacrée » en pays Guin
AFP–Glidji Kpodji 20/09/06 – « La pierre sacrée est bleu ciel: c’est un signe de bonheur, de paix et de réconciliation! », proclame solennellement le hounnon, un prêtre vaudou. Sur la place du petit village de Glidji Kpodji, non loin de Lomé, des milliers d’adeptes laissent éclater leur joie. Non loin du hounnon, des adeptes du culte, torse nu avec des feuilles nouées autour du cou, chantent et dansent en cercle autour d’une petite pierre tenue par un des leurs. Et cela fait 344 ans que chaque année en pays Guin, des initiés sortent de la forêt la petite pierre caméléon, lisse et grosse comme une souris d’ordinateur.
« Ils viennent de la grande forêt avec la pierre sacrée qui annonce une bonne nouvelle », explique à l’AFP une adepte, pagne blanc noué à la poitrine avec de longues perles multicolores au cou.
La pierre est sortie pour une seule journée et retourne pour un an dans les profondeurs de la forêt dans un lieu secret.
Pour tous les Guins d’Aného, deuxième ville du Togo à environ 45 km à l’est de Lomé, le rendez-vous annuel de septembre avec cette « pierre sacrée » est le plus important de l’année: la couleur dira ce que l’avenir leur réserve pour les douze mois à venir.
Des milliers de Togolais, mais aussi des adeptes du vaudou venus du Bénin, du Ghana, du Nigeria et d’Haïti se rassemblent alors à Glidji Kpodji pour la fête traditionnelle Epé Ekpé au cours de laquelle les grands prêtres présentent la pierre sacrée au peuple Guin, après des prières et sacrifices aux ancêtres.
« c’est le +Ekpessosso+ (la « prise de la pierre sacrée », en langue mina) qui marque le début de la nouvelle année », explique un hounnon.
« Seuls les grands prêtres de la divinité Maman Koley (la plus importante divinité Guin) sont autorisés à pénétrer dans la forêt de Glidji où se trouve la pierre sacrée. Ils invoquent tous les dieux et les ancêtres pour que sa couleur porte bonheur », précise doctement un grand prêtre vaudou, coiffé d’un bonnet blanc.
Chaque année, le Epé Epké attire une foule de « fidèles » mais aussi d’étangers. L’an dernier, le président Faure Gnassingbé avait lui-même fait le pèlerinage de Glidji.
Pour la 344e édition, la pierre est apparue cette année d’un beau bleu ciel, signe de bonheur, de paix et de prospérité, selon les grands prêtres.
Cette coutume a été instituée en 1663 par les premiers habitants d’Aného qui étaient venus de la Gold Coast voisine, l’actuel Ghana.
« La pierre peut prendre toutes les couleurs, mais le rouge et le noir sont à éviter. Le rouge annonce une année de tous les dangers et le noir la famine et la sécheresse », avertit Akakpo Kombey, fils d’un hounnon.
La couleur de la pierre varie surtout en fonction de ce qui s’est passée à Aného durant l’année écoulée, renchérit une « tassinon » (prêtresse vaudou).
« Mais grâce aux prières et aux offrandes, les ancêtres ont toujours été cléments envers le peuple guin », affirme Akakpo Kombey.
Pourtant l’année dernière, elle était verdâtre. Pour certains grands prêtres vaudou, c’était à cause des violences survenues au Togo au lendemain de la présidentielle d’avril 2005.
Des violences avaient éclaté dans les fiefs de l’opposition, notamment à Lomé et Aného où des manifestations avaient été réprimées, après l’annonce de la victoire de Faure Gnassingbé.
« Les dieux étaient vraiment en colère, parce que certaines de nos traditions n’avaient pas été respectées », affirme un notable guin.
LIRE EGALEMENT:
[Ekpéssosso, l’identité du peuple Guin->http://www.letogolais.com/article.html?nid=1083]
[Septembre, nouvelle année Guin->http://www.letogolais.com/article.html?nid=1073]
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