25/04/2024

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Togoano Nox (1) : Les accords de Ouaga IV

Beaucoup de commentaires et de critiques ont été faits sur ces accords où ont été soulevées leurs insuffisances notoires, notamment leur caractère très élastique d’où n’émerge aucune clause précise imposant des obligations explicites claires aux « parties prenantes ». Il n’y a aucune garantie probante qui permet de saisir telle instance en cas de conflit d’interprétation ou d’exécution si ce n’est « la bonne volonté » et « la bonne foi » des « signataires » comme n’a cessé de le marteler Léopold Gnininvi face à des journalistes dubitatifs au cours d’une émission retransmise à Lomé.

On se prend la tête entre les mains à se demander, songeur, comment des leaders politiques, pourtant aussi avisés que madrés les uns les autres, ont pu signer en grande pompe ce véritable torche-cul dont ils sont apparemment fiers et heureux. Qu’est-ce qui a bien pu se passer au « Pays des hommes intègres » pour qu’ils signent leur propre reddition dans des chants d’allégresse et les froufroutements arrogants de boubous scintillants ? Et où sont passés les amendements qui auraient dû être intégrés à l’accord paraphé à Ouagadougou avant signature à Lomé selon ce que rapportent les clabauderies ici et là ? Le silence assourdissant des « signataires » à cet égard et la confusion dans leurs propos laissent un dégoût total dans la gorge du Togolais de base fatigué et lassé d’espérer. De toutes les manières, avant même qu’il ne débute, Ouaga IV était pipé. Il était un gros jarre pestilentiel où est déposé le poste empoisonné de Premier ministre pour allécher les jobards que sont devenus nos « leaders de l’opposition » qui s’y sont précipités la tête la première, et il a fallu une photo finish au laser pour insculper le vainqueur, tant étaient nombreux les concurrents qui se bousculaient à Ouagadougou pour arracher la place.

Remettons pêle-mêle les choses en mémoire: 1) récusation par Faure, Agboyibor et Gnininvi du facilitateur, le diplomate algérien Lakhdar Brahimi, proposé par le secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, au lendemain du passage à Lomé, en janvier dernier, de Monsieur Afrique de l’Elysée, Michel de Bonnecorse, 2) convocation précipitée et unilatérale du dialogue par le Clan, 3) absence d’un minimum de concertation au sein des partis dits d’opposition, 4) composition des délégations dominées par les démembrements du RPT tels que le gouvernement, le RFAMPT, la CPP, le PDR, que rejoindront plus tard dans une alliance objective, sur la pointe des pieds, le CAR dans le jeu assez troublant de son leader et la CDPA du professeur Léopold Gnininvi, le moins inattendu dans ce lupanar politique. En proposant dans un consensus déroutant le françafricain Blaise Compaoré comme facilitateur, le piège est prêt à fonctionner avec une redoutable efficacité. Y a-t-il matière à s’étonner vraiment quand on voit la même domination du pouvoir RPT et de ses prostaglandines au sein de la CENI issue de Ouaga IV, chargée, nous dit-on, d’organiser des législatives « sincères » et « transparentes ». Sa composition révèle pratiquement les mêmes acteurs erpétistes qui ont été de grands fabricants de fraudes électorales depuis les années 1990.

Il faut le dire et crier fort urbi et orbi, quitte à crever des tympans sensibles, Ouaga IV n’a pas eu pour finalité de résorber la longue et douloureuse crise politique togolaise, mais de régler deux problèmes techniques très ponctuelles : la nomination d’un nouveau Premier ministre et accessoirement l’organisation des législatives, avec deux conséquences induites : d’une part l’obtention de la signature de l’UFC (ici, on tire chapeau au RPT qui a si bien manœuvré et manipulé son « impérial » leader, Gilchrist Olympio !) et d’autre part la levée de la plus que décennale suspension des aides de l’Union européenne. Mais tout accord politique dit global qui ne prendra point en considération l’hypothèque militaro-milicienne sur la vie politique du pays, en considération les différents contentieux électoraux, dont celui notamment de la présidentielle d’avril 2005 qui a été la plus meurtrière que le pays a connue jusqu’à ce jour, en considération la question de l’impunité politique, les crimes économiques et le problème crucial des réfugiés, etc., cet accord politique dit global ne sera que tromperie sur la marchandise qui fera du Togo un grand bordel politique où démocrates et bandits copuleront joyeusement entre eux sur le dos de la population, avec ses propres complicité et indifférence actives ou passives, sous le regard voyeur de la France et de la « communauté internationale ». Le gouvernement de Me Agboyibor n’est-il pas le révélateur de ce grand bordel ?

Bordeaux, le 9 novembre 2006
Comi M. Toulabor
CEAN- Sciences Po Bordeaux

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On évoquera quatre points pour mettre en exergue le grand bordel politique qu’est devenu le Togo sans toutefois rentrer dans des détails :
1) les accords de Ouaga IV
2) le gouvernement de Me Agboyibor
3) les législatives annoncées de 2007
4) les prochaines présidentielles de 2010.

Prochaine publication le 10/11/06 de la 2° partie de Togoano Nox:
Le gouvernement de Me Agboyibor