20/04/2024

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Unité Africaine: Clef du développement économique de l’Afrique

Au regard des événements de la Côte d’Ivoire tout un chacun peut constater que les lignes de fractures sont bien confuses ; la rédaction Letogolais.com vous invite à vous forger une opinion sur la base de l’article écrit par Victor Alipui en juillet 1965 pour l’Union Syndicale Pan-Africaine –USPA, peu avant la tenue en août 1965 à Accra de la réunion des Chefs d’Etat de l’OUA. Il étaiT alors fonctionnaire à l’USPA

Unité africaine ! Unité africaine ! Tel est le leitmotiv lancé d’un bout à l’autre de l’Afrique après l’indépendance politique. Plus qu’une simple manifestation de volonté, l’on pourrait dire que l’Unité africaine se concrétise par les conférences panafricaines, les rencontres entre Chefs d’Etat et experts des divers Etats indépendants d’Afrique. Conférences et rencontres dont les communiqués nous révèlent toujours l’ambiance cordiale et fraternelle qui y a régné.

En effet, depuis l’indépendance du Ghana en mars 1957, un courant irrésistible d’unité traverse le continent africain. On avait vu se constituer l’Union Ghana-Guinée qui, plus tard, devint Ghana-Guinée-Mali ; la tenue à Accra de la Conférence historique des Peuples Africains en 1958 ; la création en 1960 à Abidjan de l’Union Africaine et Malgache (UAM) et, à Casablanca, le Groupe de Casablanca. En 1961 ce fut la naissance du Groupe de Monrovia qui ne fut que l’alliance des Chefs d’Etat que l’on considérait généralement comme des modérés avec ceux de l’UAM. Mais tous ces groupes, à l’exception du groupe de l’UAM (devenue en 1965 OCAM i.e Organisation commune africaine, malgache et mauricienne), devaient céder la place à une organisation beaucoup plus large et plus importante : l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA). Celle-ci vit le jour à la conférence panafricaine historique d’Addis Abéba le 25 mai 1963.

Mais ce qui frappe en dépit de cette volonté irrésistible et de la bonne compréhension qui prédominent toujours dans ces conférences panafricaines, c’est l’inexistence d’une véritable « Unité ». Pour celui qui observe l’évolution politique de l’Afrique depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, cet état de choses n’est guère surprenant.

L’Unité Africaine, la plupart des leaders politique actuels l’entrevoient ou la conçoivent sous un rapport sentimental, sans attache avec la réalité socio-économique de l’Afrique. L’indépendance politique étant acquise, pensent-ils, les rencontres entre Chefs d’Etat sont nécessaires pour élaborer une nouvelle stratégie et une nouvelle tactique de lutte pour contenir les forces progressistes en Afrique qu’ils taxent bien souvent « d’éléments subversifs ». D’autres, au contraire, considèrent l’Unité Africaine comme étant le seul moyen capable de sortir le continent du sous-développement, de le préserver contre l’infiltration et la mainmise impérialistes et néocolonialistes et de libérer les colonies encore sous domination coloniale. Les courants d’idée de cette dernière tendance divergent, car les uns ne conçoivent l’Unité que dans une perspective de coopération économique alors que les autres insistent plutôt sur l’Unité politique comme devant servir justement de cadre à cette coopération économique. Il est à souligner que jusqu’ici, aucune controverse sérieuse ni par presse ni par pamphlets n’existe au sujet de l’Unité Africaine. Le Dr Kwame Nkrumah, quant à lui, élucide d’une façon éloquente et tangible dans son livre « L’Afrique doit s’unir » son point de vue sur l’Unité Africaine.

Les faits coloniaux

Un coup d’œil rapide sur la carte de l’Afrique et l’on s’aperçoit avec indignation du premier fait colonial : l’existence d’une multitude d’Etats africains. En effet, pour une Afrique de 30,3 millions de kilomètres carrés et une population de 250 millions d’habitants, on compte 45 Etats et territoires dépendants. Et, cette balkanisation n’est, comme on pourrait le penser, le fait d’un simple hasard. Après que les Portugais, les Anglais, les Français, les Hollandais et les Danois eussent établi entre le XVe et le XVIIIe siècles sur les côtes africaines des comptoirs pour y pratiquer un commerce vil fait d’esclavage et d’échange de menus objets (coupe-coupe, fusils, tabac, eau de vie etc.) contre de l’or et de l’ivoire, la Conférence de Berlin en 1884-1885 devait complètement changer la face de l’Afrique. Les faits dominants en Europe à cette époque et qui avaient fatalement conduit à la colonisation, étaient : d’une part, les convoitises des Etats européens sur les immenses richesses d’Afrique, et, d’autre part, le fait que ces mêmes Etats européens développaient tous également leurs industries dont la production dépassait énormément le cadre de leur marché national. Il leur apparut donc nécessaire, pour éviter de graves crises économiques, de trouver des débouchés en dehors de l’Europe, en l’occurrence les terres vierges d’Afrique, d’Amérique centrale et du sud et d’Asie. Une administration spéciale fut mise sur pied dans chacune des puissances européennes pour élaborer les techniques de l’exploitation coloniale. La politique du « Pacte Colonial » bien connue fut largement pratiquée. Elle consistait en ceci que les colonies n’existaient uniquement que dans l’intérêt des métropoles à qui elles fournissaient tous les produits primaires. En revanche, les colonies devaient acheter aux métropoles, et à elles seulement, tous les produits manufacturés dont elles avaient besoin. La subordination des colonies aux métropoles fut si étroite que la liberté commerciale et industrielle leur était interdite. Et, toute velléité de développement des colonies n’était concevable que dans la mesure où elle servait les intérêts des métropoles. Par ailleurs, l’administration coloniale avait aussi mis sur pied un appareil militaire et politique qui contraignait aux travaux forcés les populations des colonies.

L’éveil du nationalisme africain

Cette politique coloniale négative devait provoquer de par ses pratiques inhumaines, l’éveil du nationalisme africain. Déjà, vers les années vingt, eurent lieu, quelques manifestations sporadiques de nationalisme africain d’ici et là, en Amérique, en Europe et en Afrique même. Ces manifestations devaient se préciser plus ou moins dans les années quarante pendant la seconde guerre mondiale sous forme de conférences panafricaines, particulièrement animées par les intellectuels africains y compris les étudiants, et les Noirs Américains. En fait, c’est après la deuxième guerre mondiale que le nationalisme africain prit une contexture nette sous forme de Mouvements de Libération Nationale dans les colonies. La lutte pour l’indépendance nationale était engagée. Face à ces mouvements de libération qui avaient pris solidement racine dans les couches paysannes et ouvrières et dans la classe moyenne des villes, l’administration coloniale a créé des partis administratifs. Par ailleurs, elle apportait son soutien aux partis politiques réformistes qui réclamaient tout simplement l’atténuation de la rigueur de la politique coloniale. Les membres de ces partis administratifs et réformistes se recrutaient parmi les fonctionnaires africains du cadre colonial, quelques intellectuels réactionnaires et assimilés, et aussi quelques riches propriétaires terriens ou planteurs qui ont fait leur fortune en liant leurs intérêts à ceux des grandes compagnies de traite. Ces partis, disons-le, et répétons-le à tous ceux qui ont tendance à l’oublier, ont été ouvertement contre l’idée de l’indépendance, voire réclamer pour leurs territoires le statut de département ou de province. Ils ont combattu à mort, aidés par l’appareil de répression colonial, les Mouvements de Libération nationale, les patriotes africains et toutes les forces progressistes africaines. Les leaders de ces partis administratifs sont aujourd’hui Chefs d’Etat dans la plupart des pays francophones indépendants. Il s’agit principalement de ceux du groupe de l’OCAM ayant comme sous-groupe le Conseil de l’Entente. Certes, ici l’on peut se demander comment ceux-ci ont pu conquérir le pouvoir politique ?

L’idée de l’indépendance avait complètement gagné les masses africaines. Le puissant processus de décolonisation avait été irréversiblement et ostensiblement amorcé par la prise du pouvoir et la proclamation de l’indépendance par les Mouvements de Libération dans certains pays africains. Les Puissances coloniales, surtout la France, réalisèrent vite que tôt ou tard les colonies se rendraient indépendantes par une révolte armée et violente, et que leurs intérêts et superbénéfices seraient manifestement mis en cause. Mieux vaut l’indépendance pour sauvegarder ces intérêts et garder l’amitié des peuples coloniaux conclurent-elles. Dans leur hâte de contenir à tout prix les Mouvements de Libération Nationale, ces Puissances proclamèrent l’indépendance dans la confusion et dans des conditions inacceptables. C’est ainsi que sans de véritables élections, sans aucune consultation régulière pour déterminer le rapport des forces entre partisans et adversaires de l’indépendance, des hommes de paille, qualifiés par les colons eux-mêmes « d’interlocuteurs valables » ont été mis à la tête des nouveaux Etats indépendants. C’était surtout le cas dans la plupart des pays francophones. Les Mouvements de Libération ont été dans ces pays soit contraints à une existence clandestine soit à une vie de maquis.

L’Unité Africaine et non un Compromis

Les Etats africains qui ont accédé à l’indépendance grâce à une lutte victorieuse contre le joug colonial ont, au lendemain même de leur libération, lancé l’idée de l’Unité Africaine. Unité Africaine dont le contenu et la forme restent encore mal définis. Pour se mettre au diapason de l’histoire et pour éviter de prêter flanc aux critiques acerbes et attaques qui pourraient éventuellement émaner des forces progressistes africaines, les Chefs d’Etat de fortune parachutés par les anciennes puissances coloniales ont pris aussi à leur compte l’idée de l’Unité Africaine. Ainsi, progressistes et réactionnaires réclament-ils pour le continent l’unité.

Que l’unité soit réalisée par les progressistes ou les réactionnaires ou les deux tendances à la fois, là n’est pas la question. L’essentiel pour nous, disent certains Africains distraits, c’est que l’Afrique s’unisse un jour.

Quel intérêt les Africains ont-ils de voir un jour l’Unité se réaliser sous l’égide des forces réactionnaires africaines ? Il est clair, selon toute logique, que si ces forces obscures cherchent à unir l’Afrique c’est moins dans l’intérêt des masses africaines que dans celui des impérialistes. Car, ayant été installés au pouvoir par les impérialistes, ils ne peuvent agir que dans le sens voulu par ceux-ci. Or, nous savons l’essence profonde du phénomène colonial. Les impérialistes ne voudront jamais perdre, pour quelque raison que ce soit, les acquis coloniaux : les matières premières achetées à des prix dérisoires, les débouchés aux produits manufacturés vendus à des prix exorbitants, les bases militaires à des endroits stratégiques, l’influence politique etc. Car leur bonheur ainsi que celui de leurs peuples y sont intimement liés. Le bonheur des impérialistes est inconcevable sans l’exploitation des pays dits « arriérés ». Il convient donc que les leaders politiques africains progressistes dans la réalisation de l’aspiration profonde des masses africaines de l’Unité Africaine mettent toujours à leur place, c’est-à-dire doivent toujours combattre les forces réactionnaires. L’Unité Africaine ne saurait être un compromis, une sorte d’Entente Cordiale entre réactionnaires et progressistes. Les réactionnaires étant ce qu’ils sont, ils ne peuvent jamais se renier. Ce n’est pas parce qu’ils gouvernent aujourd’hui confortablement des Etats indépendants qu’il faudrait les prendre pour des patriotes sincères et traiter avec eux. Hier, ennemis déclarés de l’indépendance de l’Afrique et de son émancipation, ils le sont encore aujourd’hui et le demeureront toujours. Ils pensent moins à l’Unité réelle de l’Afrique qu’à la consolidation des positions de nos exploiteurs avec qui ils ont cause liée. Les patriotes africains et toutes les forces progressistes africaines ne doivent pas par maladresse ou erreur de calcul favoriser en Afrique la création d’une « Petite ONU » qui servirait d’instrument de démagogie et de chantage pour les forces réactionnaires. L’Unité Africaine doit s’accomplir non par des slogans, la diplomatie fine et la persuasion des forces rétrogrades africaines, mais par le fer et le feu en liquidant impitoyablement jusqu’à leurs racines ces forces rétrogrades. Dans cet ordre d’idée, l’Unité Africaine ne peut pas être considérée sous un rapport subjectif, un rapport purement sentimental, mais elle doit plutôt être perçue sous un angle objectif, comme une nécessité économique.

L’Unité pour l’intégration économique

S’il est vrai que l’indépendance politique n’est qu’un moyen pour conquérir l’indépendance économique, il est moins certain et très douteux qu’un Etat africain politiquement indépendant avec tout son potentiel (ressources naturelles abondantes et variées, capitaux, etc.) puisse réellement accomplir seul son indépendance économique. Il devient donc un impératif de penser cette indépendance économique plutôt dans le cadre d’une Afrique unie.

L’Afrique, colonisée par plusieurs Puissances européennes à régime économique différent, il va de soi qu’il existe, après l’indépendance, une balkanisation économique très marquée. Les anciennes colonies britanniques ont leur système économique modelé sur celui de la Grande Bretagne ; les anciennes colonies françaises appartiennent aux organismes économiques français et font 90% de leur commerce avec la France. Par ailleurs, la circulation des biens d’un pays à l’autre est très difficile à cause des rapports coloniaux d’antan. Même là où elle paraît relativement facile, les produits et biens doivent supporter des taxes douanières exorbitantes. Un bien d’importation peut subir jusqu’à quatre taxes différentes. Car, le premier pays importateur, pour des raisons budgétaires, met un droit de douane à l’importation. Un second pays, ne pouvant commander directement en Europe ou ailleurs ces biens, les achète dans le premier pays. Ces biens pour les mêmes raisons que dans le premier cas, subissent un nouveau droit d’entrée. Et si ces biens ont à franchir quatre frontières, ils auront à supporter quatre droits d’entrée. Un autre fait colonial caractérisé, est que l’intégration économique au niveau de chaque Etat pris individuellement, n’a pas été réalisée. Les quelques centres commerciaux et industriels qu’on y trouve sont généralement localisés sur les côtes. La monoculture domine entièrement l’économie africaine. Partout existe un dualisme économique où secteur moderne et secteur traditionnel coexistent. En dehors de tous ces problèmes, un autre se pose avec acuité : la dégradation des termes de l’échange, ou en un langage économique simple, la baisse des prix des produits primaires et la hausse des prix des produits manufacturés.

Eu égard à ces faits économiques et de la conjoncture économique internationale, il est impossible d’imaginer qu’un seul pays africain réalise son développement économique. A supposer que cela soit possible au niveau de chaque Etat, celui-ci se trouverait aussi, très tôt, dans la même situation qu’étaient les Etats européens au XIXe siècle, situation qui, au demeurant, les avait contraints à chercher des débouchés extérieurs. Or les terres vierges qui avaient servi de soupapes de sécurité à ces Etats européens n’existent plus, pour permettre aux pays africains de se payer ce luxe. C’est une constatation économique que, tout développement économique qui atteint le stade de haute productivité et de haut rendement ou, bref, d’expansion économique, s’il n’existe pas un grand marché pour qu’on y écoule les produits, est menacé de crises et de dépressions économiques. Ainsi, tout le système économique qu’on aurait peut-être mis des années de dur labeur fait de sacrifice et d’abnégation pour construire, disparaît en quelque temps. Dans certains cas sur un même continent, les pays les plus favorisés et les plus développés, pour garder toujours à un niveau élevé leur expansion, maintiennent dans un état de sous-développement chronique les autres moins favorisés. L’exemple de l’Europe occidentale est assez patent à cet égard. A côté de la Suède, de l’Allemagne, de l’Angleterre, de la Hollande, de la France, de la Suisse etc. prospères, se trouvent le Portugal, l’Espagne, la Turquie, la Grèce et l’Italie sous-développés. C’est la même politique que les Etats-Unis d’Amérique pratiquent à l’égard des pays d’Amérique Latine.

L’Unité du continent africain, comme nous l’avons déjà soulignée, doit être perçue sous un angle plutôt objectif que sentimental. Plusieurs arguments militent en sa faveur. Il s’agit pour les Etats africains de réaliser une intégration économique harmonieuse au niveau de toute l’Afrique en vue d’accélérer le processus de développement économique, social et culturel de leurs populations. Cette intégration présuppose, en tout état de cause, un marché unique pour l’Afrique avec une monnaie commune. Les ressources potentielles de l’Afrique sont immenses et variées. L’exploitation d’un gisement de fer, de cuivre, de diamant, d’uranium etc. ne saurait uniquement être à la charge de la Mauritanie, du Congo, du Ghana et du Gabon. Ces pays, pris isolément, ne disposent ni de ressources humaines qualifiées ni de capitaux pour faire face aux frais qu’engendre une exploitation rationnelle. Aussi, cherchent-ils des palliatifs, des solutions d’attente qui consistent à confier entièrement à des compagnies étrangères sous un régime de contrat à long terme ou, encore, sous un régime d’économie mixte, l’exploitation de ces gisements. Le statut de certaines de ces compagnies leur donne une autonomie telle qu’elles deviennent des Etats dans l’Etat. L’exploitation du minerai de fer en République Islamique de Mauritanie confiée à un groupe américano-français la MIFERMA, et l’exploitation de la bauxite en Guinée-Conakry à FRIA, pour ne citer que ces exemples là, constituent l’illustration saisissante de ces solutions d’attente. Ceci étant vrai pour les gisements de fer, de cuivre, d’uranium ou de diamant, l’est également pour les autres ressources naturelles. Mais sous une Haute Autorité politique et économique au niveau de l’Afrique et dans une conception d’économie planifiée, les Etats africains avec le peu de capital dont ils disposent pourraient d’abord concentrer leurs efforts sur l’exploitation de certaines ressources de base et dans certaines régions afin de créer, à partir de là, des pôles de développement. C’est une absurdité, un non-sens économique que de procéder à l’exploitation d’une ressource de même nature dans le même temps et dans le même continent alors que l’on se plaint du manque de capitaux et de la dégradation des termes de l’échange. Un autre aspect du gaspillage économique que pourrait corriger l’Unité de l’Afrique, ce sont les dons et prêts faits aux Etats africains pour réaliser les mêmes projets. Une Afrique unie, recevant ces dons et prêts, saurait en faire une utilisation rationnelle en les destinant aux projets prioritaires, notamment à l’installation d’industries de base, c’est-à-dire des industries lourdes et des machines-outils indispensables à son processus d’industrialisation.

L’Unité Africaine est donc, à tous les points de vue, une nécessité vitale, la clef du progrès économique et social. A ce titre, elle ne peut être réalisée par de simples conférences, par de simples confrontations au niveau des Chefs d’Etat et experts sans une mobilisation préalable des masses africaines qui en sont intéressées au premier chef. Elle ne peut aussi se réaliser sans une idéologie et sans principes directeurs. Quand on cite l’exemple d’unité des Etats-Unis d’Amérique ou de l’Union Soviétique, il faut toujours se rappeler que ces Puissances ont réalisé leur unité autour des idées forces, autour d’une idéologie donnée. Ce sont les pionniers capitalistes, puritains et économes qui ont créé les Etats-Unis d’Amérique ; et c’est le parti communiste qui a réalisée l’Union Soviétique. Il est certes indéniable que certains leaders politiques actuels désirent sincèrement cette unité. Qu’ils s’unissent donc pour mener effectivement et efficacement le combat pour l’unité autour d’une idéologie donnée ! Alors, mais alors seulement ils auront mérité de la « Patrie Africaine ». Mais cette unité devra nécessairement passer d’abord par l’unité politique. Ce qui exclut l’idée de l’Unité Africaine par la coopération économique. D’ailleurs comment cette coopération serait-elle possible puisque nos Etats n’ont pas encore une économie digne de ce nom ? L’économie africaine est à bâtir, et elle est à bâtir au niveau de tout le continent selon des options concrètes bien arrêtées.

Victor ALIPUI

(Article écrit en juillet 1965 pour l’Union Syndicale Pan-Africaine –USPA, peu avant la tenue en août 1965 à Accra de la réunion des Chefs d’Etat de l’OUA. J’étais alors fonctionnaire à l’USPA)