Togo-Affaire Agbobli: Autopsie d’un rapport d’autopsie

IL N’Y A RIEN DANS LE RAPPORT PUBLIÉ PAR LA CNDH QUI PUISSE CORROBORER LA THÈSE DE NOYADE AVANCÉE

J’ai lu avec beaucoup d’attention le rapport publié par la CNDH suite à la nouvelle autopsie demandée par la CNDH du Togo et réalisée par un expert international commandité par la commission internationale des droits de l’homme. En tant que pathologiste ayant déjà réalisé de très nombreuses autopsies à visée scientifique dans le cadre de mes anciennes activités universitaires, je n’ai rien vu dans ce rapport qui puisse faire dire sérieusement que M. Agbobli est mort noyé d’une part, et que d’autre part son improbable noyade serait survenue à la suite d’une tentative de suicide.

En revanche, il y a dans ce rapport des choses inquiétantes qui pourraient plutôt orienter vers l’hypothèse d’un assassinat. J’en retiens 2deux essentiellement. D’abord la présence de foyers hémorragiques dans sa boite crânienne au niveau des lobes frontaux droit et gauche et aussi au niveau du lobe pariétal. Ces foyers de 4 à 5 centimètres associés à une congestion diffuse de l’ensemble du cerveau et aussi à des traces indéfinissables sur le cervelet et les amygdales ne peuvent s’expliquer dans l’hypothèse qu’on veut nous faire avaler. Un autre élément troublant est la présence de détergents dans les liquides biologiques examinés (liquide gastrique, sang, urines post-mortem).

Comment expliquer cette présence insolite de détergent (savon) dans ces liquides sans imaginer que M. Agbobli n’est pas mort là où on croit?

Enfin, on nous dit que la thèse de noyade a été retenue par défaut. Examinons même cette thèse. La noyade peut être définie comme l’envahissement des voies respiratoires par un élément liquide en l’occurrence de l’eau. Cette eau peut être de plusieurs sources. Elle peut être pure, douce, saumâtre, additionnée de produits chimiques divers (eau de Javel, acide, base, savon, etc.). Elle peut contenir des débris animaux, végétaux, des algues, des micro organismes divers qui puissent permettre d’identifier le cas échéant sa nature et son origine. Ainsi, lorsque quelqu’un se noie dans une piscine ou dans un lac ou dans la mer, l’eau que contiennent ses poumons n’est pas de la même nature. En plus de l’eau qui existe dans le poumon, on peut retrouver dans la bouche du noyé mort ou vivant des débris de toute sorte ainsi que dans sa trachée artère et dans son estomac voire dans ses intestins. Lorsque quelqu’un se noie dans l’Océan, il n’est pas idiot de penser qu’on pourrait retrouver du sable dans toutes les cavités précitées ainsi que des éléments de pollution divers à moins que le candidat à la noyade se soit muni de filtres nasaux, buccaux avant d’accomplir son geste.

Force est de constater que dans le rapport de la CNDH, il n’a été fait mention d’aucun des éléments de pollution dont nous parlons. En revanche, on nous explique que ses radios montrent une bonne ventilation, que la poche aérienne gastrique était bien visible et contenait bien de l’air et non de l’eau. L’examen microscopique montre de l’œdème dans les poumons ainsi qu’une importante congestion ce qui d’ailleurs peut laisser supposer qu’avant sa mort, M. Agbobli cardiaque et faisant une hypertension sévère comme l’attestent son rein (nephroangiosclérose) et son foie (foie cardiaque d’après le compte rendu) a eu à souffrir d’un OAP (Oedème aigu du poumon).

De tout ceci, nous pouvons retenir que les éléments que le rapport de la CNDH nous fournit ne permettent pas d’évoquer sérieusement l’hypothèse d’une noyade d’une part et que si d’aventure noyade il devrait y avoir, il faudra chercher alors le lieu de cette noyade en dehors de l’océan Atlantique.

France, 15 novembre 2008
Docteur Frédéric Atsou Galley
Anatomo-Cyto-Pathologiste
Ancien Médecin Hospitalo-Universitaire du CRHU de Lille et de la Faculté des Sciences de la Santé de Cotonou

TELECHARGEMENT
[Le rapport de la contre-expertise sur la mort d’Agbobli Atsutsé->https://www.letogolais.com/pdf/autopsie.pdf]