26/04/2024

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Togo: Mise au point sur la tragédie de Fréau Jardin

Nous voici maintenant arrivés à cinq mois de l’élection présidentielle du 28 février 2010, qui devrait sonner l’heure du changement et de l’alternance politique au Togo. L’éclatant succès de la manifestation du 26 septembre, malgré la défection de dernière minute de certains, a apporté une nouvelle preuve de la vitalité des forces du changement, ouvert la perspective d’une victoire de l’opposition, dans la mesure où celle-ci est capable d’unir toutes ses forces.

Nous saluons le patriotisme des uns et des autres et rassurons le peuple togolais que notre engagement à ses côtés est inébranlable quelque soient les manœuvres de déstabilisation et d’où qu’elles viennent.

L’heure de la vérité a sonné, mais pas dans le sens où certains voudraient le faire croire.

A l’issue de la manifestation dont le terme était la Place Anani Santos (ex Place Fréau Jardin), nous, Agbéyomé KODJO, candidat déclaré à l’élection présidentielle, avons pris la parole sur cette place hautement symbolique des combats pour la liberté, devant une foule portée par la détermination de mener jusqu’au bout le combat du changement, qui nous a manifesté sans réserve son enthousiasme.

Nous avons salué la mémoire de nos martyrs et formulé de tout cœur le vœu que la vérité, rien que la vérité, puisse être faite pour faciliter le travail de deuil collectif lié à cette pénible épreuve dont nous avons été personnellement victime collatérale, et à ce jour victime expiatoire désignée.

Il n’en fallut pas davantage pour déclencher une énième fois, les attaques les plus basses et les plus viles à notre encontre relatives aux événements de 1993 sur cette même place Fréau Jardin, ceci dans le seul but de détourner le débat politique sur l’avenir de notre pays.

Nous avons à plusieurs reprises répondu publiquement de manière argumentée à des attaques similaires. Nous avons à chaque fois rendu hommage à toutes les victimes de ce terrible drame, et rappelé que nous avons eu aussi personnellement notre part de malheur en perdant un parent au cours de ces événements, que notre maison fut détruite dans notre village, de même que celle de notre père qui fut molesté au moment des faits .

Nous avertissons donc solennellement tous ceux qui s’imaginent qu’ils peuvent tenir le peuple togolais en haleine durant cinq mois avec cette affaire, qu’ils font fausse route. Cette mise au point complémentaire sera la dernière. Nos contempteurs devront dorénavant répondre à nos interpellations pour entrer dans le vif du sujet du débat électoral, pour débattre du bilan du Togo ces 5 dernières années, et, programme contre programme, de la vision que chacun porte pour son pays.

La vérité est unique et ne change pas.

Nous avons mis au défi, depuis plus d’un semestre, quiconque, appartenant à l’opposition, au RPT ou aux forces de l’ordre, d’apporter la moindre preuve de notre implication dans cette tragédie mais depuis personne n’a apporté le moindre démenti. Dans cette affaire, nous avons été les premiers à demander que tout soit mis en œuvre pour que la lumière soit faite. Si nos contempteurs n’ont trouvé qu’un bouc émissaire en notre personne dans, cette manœuvre, dilatoire à la vérité, celle-ci risque de se révéler hasardeux au regard de l’histoire.

Le seul élément qui fonde les accusations à notre encontre est l’usage fait par les assassins, de quelques véhicules de police. Ces véhicules étaient à la disposition du Commissariat Central de la ville de Lomé au moment des faits. Or les premières enquêtes faites à notre demande ont révélé que les armes utilisées par les criminels n’appartenaient pas à la police. Par ailleurs, sommé d’expliquer la présence des véhicules de son administration sur le lieu du crime, le Commissaire Central de la Ville de Lomé déclara que les criminels se sont appuyés sur un groupe de « policiers hors norme » pour disposer des voitures de police.

Nous avons noté que dans sa déclaration du 30 septembre 2009, Léopold GNININVI reconnait pour la première fois, avoir été alerté du drame qui se préparait mais l’aurait pris pour une fausse alerte (une menace du ministre de l’intérieur). Ce qui considéré comme tel dénote d’une grave légèreté et d’une irresponsabilité notoire de la part du chef de file de l’époque du CODII, vu la gravité même de l’information reçue et surtout des antécédents de violences graves durant cette période agitée de notre histoire. Ce qui suscite des questions.

Pourquoi n’a-t-il jamais révélé à l’opinion, comme il vient de le faire, le fait qu’il avait été prévenu par le ministre de l’intérieur Agbéyomé KODJO, de ce qui allait se passer le 25 janvier 1993 ? Dans quel but s’est-il tu ? Sûrement pas pour protéger Agbéyomé KODJO contre son parti, puisque sa dernière déclaration cherche plutôt à l’accabler ! Ce qui laisse à penser que les raisons de son long silence sont ailleurs.

L’analyse de son communiqué du 30 septembre 2009 met en lumière qu’il effectue une projection totale de la responsabilité de tout ce qui est arrivé sur la personne d’Agbéyomé KODJO, et s’exonère de la moindre responsabilité malgré le fait qu’il soit informé de la gravité de la situation. Léopold GNININVI indique clairement qu’il ne se reproche rien, malgré le fait, reconnu par d’autres que nous, qu’en tant que leader reconnu et écouté il aurait pu contribuer à éviter le drame !

Ce que nous affirmons ici nous ne sommes pas seuls à le dire

En effet, la lecture du livre publié par Me AGBOYIBO, « MON COMBAT POUR UN TOGO DEMOCRATIQUE » (Editions KARTHALA, Novembre 1999) est édifiante sur ce sujet. Nous avons tiré des pages 102 à 104 le texte que voici : « …Léopold Gnininvi le premier responsable de la CDPA s’était imposé comme le chef de file de la méthode dure à la création du COD II en mai 1991. Son langage a séduit la frange de la population qui ne cachait pas sa préférence pour toute manière forte d’en découdre avec le régime. C’est avec l’enthousiasme que les organisations membres du COD ont suivi son appel à poursuivre la Grève Générale déclenchée le 6 juin 1991 jusqu’à la démission du Chef de l’Etat. Et c’est en s’appuyant également sur la dynamique populaire, qu’il a réussi à faire en sorte que la Grève Générale Illimitée déclenchée le 16 Novembre 1992, ne se soit pas essoufflée avant d’avoir atteint la durée de neuf mois.

S’il ne l’a pas interrompu plus tôt c’est qu’il était convaincu qu’elle pouvait déboucher sur l’objectif déclaré : la démission d’Eyadema. Lors d’une réunion tenue par le CODII en Janvier 1993, à l’immeuble Pa de Souza je lui avais posé la question de savoir comment une grève à elle seule, pourrait entrainer le départ du Chef de l’Etat. Il a répondu que la communauté internationale sera effectivement indifférente à notre sort, tant que la grève continuera à être plate. Que voudrais-tu dire par là ? Lui ai-je demandé. J’ai compris à sa réponse qu’on allait vers des journées chaudes.

Quelques jours après, le 25 Janvier 1993, ce fut le massacre de la place Fréau, lors de la manifestation pacifique organisée par le CODII pour accueillir les Ministres Marcel DEBARGE et Helmut SCHAEFFER envoyés par la France et l’Allemagne pour aider à dénouer la crise.

Le Ministre de l’Intérieur de l’époque, Mr Agbéyomé KODJO soupçonné d’avoir commandité le massacre s’en est défendu en déclarant à plusieurs personnes avoir avant le début de la manifestation, prévenu Léopold GNININVI du drame qui se préparait. L’histoire fera connaitre un jour la vérité. Tout ce que je sais, c’est qu’il avait été décidé par le COD II que les leaders politiques se retrouvent à Hanoukopé dans la maison de Mr Edem KODJO, d’où ils devraient partir pour se rendre à la manifestation. Nous étions un certain nombre à être présents au lieu convenu : Messieurs Boukari DJOBO, Edem KODJO, Gahoun HEGBOR, Yaovi AGBOYIBO….. et puis soudain nous entendîmes des rafales de tir. Des dizaines de jeunes tombèrent morts ou blessés sous les balles. La délégation franco- allemande eut du mal à contenir son émotion au spectacle des corps transportés à l’hôpital de Tokoin. Le 30 Janvier les Bérets verts de la Garde Présidentielle, s’abritant derrière l’alibi de l’assassinat par des opposants de deux de leurs camarades, prirent d’assaut le quartier populaire de Bè laissant plusieurs morts sur leur passage. La Radio Liberté appela les populations à vider le pays.
Au total plus de 300.000 personnes partirent au Ghana, au Bénin, en Allemagne, en Belgique, et vers d’autres pays.

La communauté internationale sortit de son indifférence. Un dialogue national amorcé à Colmar le 8 Février 1993, s’est poursuivi à Ouagadougou à partir du 17 Juin 1993. Le 11 Juillet 1993 fut signé entre le Gouvernement et l’Opposition un accord qui a servi de cadre juridique à l’organisation du scrutin présidentiel du 25 Aout 1993 et des élections législatives générales de Février 1994.

Mais l’accord de Ouagadougou, avec l’usage qui en été fait, était-il véritablement le but visé par les initiateurs de la grève ? Je ne le pense pas. Si la recherche d’un pareil accord avait été leur seule préoccupation, ils n’auraient pas fait tant durer la grève. Qu’on se souvienne qu’à la suite du passage du Cardinal Etchegaray à la demande du Saint Père Jean Paul II, au Togo en Avril 1993, nous étions parvenus à négocier avec la mouvance présidentielle, dans le cadre du DIC, (Dialogue Inter Chrétien) et à faire accepter par le Chef de l’Etat un accord, au contenu meilleur à tous égards que celui de Ouagadougou et dont le respect devrait être garanti par plusieurs pays amis. France, Allemagne, Etats Unis,….

En fait Léopold GNININVI n’a signé l’accord de Ouagadougou qu’à son corps défendant. Les atermoiements qui ont entouré la levée du mot d’ordre de grève en sont un signe fort. La poursuite du mouvement n’aurait pas déplu aux Organisateurs. D’autres événements encore plus sanglants se seraient produits entrainant un bouleversement du paysage politique.

Une telle situation les aurait sans doute dispensés d’avoir, à Cotonou, des tractations pour désigner un candidat successeur à Eyadema. En réalité Léopold GNININVI a raté le coche. Il est l’un des hommes les plus talentueux de la classe politique de son époque. Il en aurait été même le plus grand s’il n’était pas porté par son esprit si fin, à vouloir trop souvent exprimé ses convictions par personnes interposées… »

A dessein nous ne faisons aucun commentaire de ce texte, afin que le lecteur fasse sa propre opinion de Léopold GNINVI à travers ces déclarations d’un de ses compagnons de lutte.

Il apparaît ainsi que l’heure de vérité a sonné : des réponses doivent pouvoir être données, à des questions légitimes : A qui a profité le massacre de Fréau Jardin ? Qui avait intérêt que le sang coule, afin d’intéresser la communauté internationale à la question Togo ? Empêcher le massacre ce jour là aurait il servi ceux qui espéraient attirer l’attention de la communauté internationale ? Pour la première fois, la boîte de Pandore sur la tragédie de Fréau Jardin va s’ouvrir publiquement, et nous ne doutons pas qu’elle nous conduira à la vérité. En reconnaissant enfin une première fois que nous l’avons averti, du drame qui se préparait, Léopold GNININVI certifie la réalité incontestable que nous avons été le seul homme politique à avoir tenté quelque chose ce 25 Janvier 1993, pour préserver la vie de nos martyrs. Maintenant, il appartient à Léopold GNININVI de devoir aller jusqu’au bout de l’épreuve de vérité comme il nous le demande, et de montrer au peuple togolais qu’elle fut sa part d’attachement au sort des ces militants dont il savait la mort programmée.

Déjà au sein des anciens membres du COD II les langues ont commencé à se délier et nous avons reçu les aveux d’un leader important qui nous disculpent des infamantes accusations dont nous sommes l’objet en nous avouant que nous avons été choisi comme bouc émissaire du fait de notre choix politique.

Dans l’exercice de la chose publique, nul ne peut s’exonérer de ses responsabilités !

Nous avons noté, que dans son communiqué du 30 septembre 2009, Léopold GNININVI réclamait : « …Au moment où les tristes évènements similaires à ceux du 25 Janvier 1993 se déroulent en Guinée Conakry et ravivent les plaies de victimes et des familles éplorées, nous attendons que la Commission Vérité Justice et Réconciliation ouvre rapidement ce dossier pendant que de nombreux acteurs et rescapés sont encore en vie… » Tous les togolais ont pu observer durant les cinq années qui viennent de s’écouler, quels trésors d’énergie ont été déployés, par le premier magistrat du pays et ses différents gouvernements, pour retarder autant que faire se pouvait la mise en place de la commission « Vérité-Justice-Réconciliation ». Ceci dans un seul but, afin que celle-ci soit incapable de produire ses premières constatations avant l’échéance présidentielle de 2010, tant certains ont à se reprocher dans les évènements tragiques qui ont endeuillé le Togo lors de l’élection présidentielle de 2005.

Nous avons été parmi les premiers à déplorer cet état de fait ainsi que les retards pris dans les travaux de cette commission qui devra aussi faire la lumière sur les événements de janvier 1993, comme d’ailleurs sur l’ensemble des événements qui ont façonné notre histoire. Mais nous rappellerons sans esprit polémique à Léopold GNININVI, qu’il a été lui-même ministre d’Etat dans les gouvernements de Faure GNASSINGBE, qu’à ce titre il partage une responsabilité collective et qu’il est aussi comptable des retards pris dans l’installation de cette commission.

Tous les togolais peuvent constater qu’il aura fallu cinq ans pour installer une « Cour des Comptes » qui vient seulement en ce mois de septembre 2009 de prendre ses fonctions. De ce retard aussi, en tant que Ministre d’Etat, Léopold GNININVI est comptable.

De la même manière, cette Cour des Comptes ne sera bien sûr pas en mesure de produire le moindre rapport sur la gestion publique du pays, avant l’élection présidentielle de 2010. Pourtant il aurait été fort utile, pour analyser les questions de gouvernance et de gestion des sociétés publiques, qu’elle puisse se pencher sur des dossiers comme la dissolution du Fonds d’Entretien Routier, celle de la SOTOCO, la gestion des Phosphates du Togo, l’Utilisation des Ressources de l’Emprunt Obligataire ou encore l’affectation dans le budget de l’Etat des recettes fiscales et douanières de la DGI et de la DGD

Une fois cette mise au point faite, voilà, entre autres, autant de sujets dont nous entendons maintenant débattre dans cette campagne électorale !

Nous verrons alors se révéler les intentions de chacun. Nous connaitrons très vite ceux qui sont sincères et ont envie de débattre de l’avenir du Togo du 21° siècle. Nous serons très vite en mesure de discerner ceux qui n’ont pas peur d’expliquer à tous nos compatriotes la teneur de leur projet et la hauteur de leur vision pour construire un pays moderne, et ceux dont le seul objectif est de maintenir le débat politique au niveau d’étiage du marigot.

Nous sommes sereins, déterminés et décidés pour mener ce travail d’explication, confiants en l’avenir de notre pays et des forces du changement qui le portent. Nous donnons rendez vous à tous nos compatriotes, pour décider ensemble de notre avenir et façonner notre destin commun.

A Lomé, le 12 Octobre 2009
Agbéyomé KODJO
Président National OBUTS
Candidat à l’élection présidentielle