24/04/2024

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Charte de la transition au Burkina : Propositions des partis politiques et de la société civile

Sur la base d’un « avant-projet de charte », des représentants de l’opposition politique, des organisations de la société civile, des autorités coutumières et religieuses, ont entrepris de convenir de propositions qu’ils souhaitent voir intégrer dans la Charte devant régir la transition. Nous vous proposons aussi l’intégralité du document.

Ils sont une centaine, ces acteurs politiques, coutumiers et religieux, ainsi que ceux de la société civile, en conclave depuis la matinée du samedi 08 novembre 2014 à Ouagadougou. L’exercice consiste à examiner et à retenir ou non, des propositions déjà faites dans un « avant-projet de charte » élaboré par une instance de techniciens. Cet exercice a été suspendu en fin de matinée et a repris en début d’après-midi où une délégation des Forces armées nationales conduite par le Colonel Auguste Barry, est venue les « encourager ». Après une trentaine de minutes d’échanges, la délégation de la ‘’grande muette’’ a pris congé d’eux.

Ils ont à élaborer de façon consensuelle, un document contenant des propositions précises communes à toutes les composantes ainsi représentées. Et c’est ce document, fruit de consensus, qui devra être confronté à d’autres documents de propositions, celui de l’Armée et éventuellement celui de l’ex-majorité, pour enfin adopter la Charte de la transition. Cette séance de confrontation aura lieu le mardi ou mercredi prochain. C’est du moins, ce qu’a laissé entendre le Colonel Barry.

En attendant, l’avant-projet de charte soumis au consensus des représentants réunis de l’opposition politique, des coutumiers et religieux, et de ceux de la société civile, comporte 24 articles précédés d’un préambule qui marque l’attachement de ses auteurs à « la nécessité d’une transition politique, démocratique, civile et apaisée ». A cet effet, les valeurs de « patriotisme, d’ « inclusion », du « sens de la responsabilité », de « tolérance » et de « dialogue », de « probité », de « dignité », de « discipline », de « solidarité », de « fraternité », d’ « esprit de consensus et de discernement », ont été émises pour guider les personnalités qui seraient appelées à conduire la transition.

Un schéma institutionnel prévu

Spécifiquement, le président de la transition qui « ne saurait être une personne des Forces de défense et de sécurité à la retraite », et qui ne doit pas avoir « soutenu le régime déchu, et plus particulièrement le projet de révision de l’article 37 de la Constitution », doit être « de bonne moralité et ne pas être concerné par une instance judiciaire en cours » ; il doit être « reconnu de bonne moralité et ne pas être concerné par une instance judiciaire en cours ». Il doit également « jouir d’une bonne notoriété nationale », « avoir une parfaite connaissance du fonctionnement des institutions ».

Après tout, il « doit renoncer à se présenter aux élections présidentielles mettant terme à la transition ». Ce sont autant de conditions que pose l’avant-projet en son articles 3, et qu’il faut réunir pour prétendre à être choisi par « un collège de désignation » qui devra procéder par deux phases, l’une de « présélection » et l’autre, de « sélection » (article 8).

Ne peuvent aussi être candidats aux élections présidentielles et législatives annoncées, les membres du gouvernement de transition, ainsi que ceux de l’Assemblée nationale de transition. Des élections auxquelles ne pourront pas prendre part les Burkinabè de l’étranger (article 22).

Le gouvernement de transition est envisagé pour être fort « de vingt- cinq membres au plus, dont la répartition doit prendre en compte les femmes, la jeunesse, les syndicats et les Burkinabè de l’étranger » (article 10). Quant à l’Assemblée nationale de transition, elle est annoncée pour être « composée de quatre-vingt-dix (90) membres », à désigner à raison de « 50% pour les partis politiques et, 50% pour la société civile ».

Sécurité et réconciliation, encadrées

Un « Conseil de défense et de sécurité nationale » devant être constitué du Président de la transition, du Premier ministre, des ministres en charge de la défense, des affaires étrangères, de l’administration territoriale, de la justice, de l’économie et des finances, et la haute hiérarchie militaire, est également prévu par ledit avant-projet de charte (article 15).

En sus, une « commission de la réconciliation nationale et des réformes », subdivisée en « sous-commission vérité, justice et réconciliation nationale », « sous-commission constitutionnelle », « sous-commission réformes politiques et institutionnelles », « sous-commission réforme électorale », « sous-commission finances publiques et respect du bien public », et en « sous-commission gestion des médias et de l’information », est prévue pour faire partie intégrante de l’architecture institutionnelle de cette période transitoire. Une période dont la durée « est de douze (12) mois à dater de la validation de la charte par le Conseil constitutionnel » (article 21). C’est ainsi que se présente en grandes lignes, l’avant-projet de charte soumis au consensus des composantes opposition politique, société civile, autorités coutumières et religieuses.

Le conclave a duré jusque dans la nuit. Et contacté au téléphone peu avant 22h, Ablassé Ouédraogo de l’opposition politique, a confié que tous les 24 articles de l’avant-projet ont emporté le consensus des participants. Mais, précise-t-il, rendez-vous a été pris de se retrouver ce dimanche 09 novembre 2014 à 16h, pour l’adoption dudit projet.

Fulbert Paré
Lefaso.net

Avant Projet de la charte de la transition

PREAMBULE

Nous, peuple souverain du Burkina Faso, nous fondant sur la constitution du 2 juin 1991,

Considérant le caractère populaire de l’insurrection ayant conduit à la démission du Président Compaoré ;

Considérant le lourd tribut payé par les filles et les fils du Burkina Faso ;

Considérant le combat pour la remise du pouvoir au peuple ;

Considérant la nécessité d’une transition politique, démocratique, civile et apaisée ;

Considérant notre attachement aux valeurs et principes démocratiques tels qu’inscrits dans la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance et dans le protocole A/SP1/12/01 de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance ;

Tirant leçon de notre expérience politique et engagés à construire un véritable Etat de droit démocratique ;
Conscients de l’urgence de doter le Burkina Faso d’organes de transition afin de combler le vide institutionnel dans la conduite des affaires publiques ;
Approuvons et adoptons la présente Charte de la transition qui complète la constitution et dont le présent préambule est partie intégrante.

TITRE I : VALEURS DE REFERENCE

Article 1
Outre les valeurs affirmées par la Constitution en son préambule, la présente Charte consacre les valeurs suivantes pour guider la transition, ses organes et l’ensemble des personnalités appelées à la conduire : le patriotisme, l’inclusion, le sens de la responsabilité, la tolérance et le dialogue, la probité, la dignité, la discipline, la solidarité, la fraternité, l’esprit de consensus et de discernement.

TITRE II : LES ORGANES DE LA TRANSITION

Chapitre 1 : Du Président de la transition

Article 2
Le Président de la transition occupe les fonctions de Président du Faso et de Chef de l’Etat. Il veille au respect de la constitution et de la charte de la transition.
Ses pouvoirs et prérogatives sont ceux définis au Titre III de la Constitution.
Son mandat prend fin avec la transition.

Article 3
Outre les conditions fixées par la constitution en son Titre III, tout candidat aux fonctions de Président de la transition doit être un civil et ne saurait être une personne des Forces de défense et de sécurité à la retraite. Il doit renoncer à se présenter aux élections présidentielles mettant terme à la transition.

Il doit satisfaire aux exigences suivantes :
– Etre de bonne moralité et ne pas être concerné par une instance judiciaire en cours ;
– Jouir d’une bonne notoriété nationale ;
– Etre reconnu pour son engagement pour la défense des intérêts nationaux ;
– Avoir une parfaite connaissance du fonctionnement des institutions ;
– N’avoir pas soutenu le régime déchu, et plus particulièrement le projet de révision de l’article 37 de la Constitution.

Article 4
Le Président de la transition n’est pas éligible aux élections présidentielles et législatives qui seront organisées à la fin de la transition.

Article 5
Le Président de la transition est choisi par un collège de désignation sur une liste de personnalités proposées par les différentes composantes à raison de trois personnalités au plus par composante.

Article 6
La liste des candidats de chaque composante est déposée en trois exemplaires dont l’original au siège du Collège de désignation sous pli fermé.

Article 7
La désignation du Président de la transition se fait sur la base des critères ci-après :
– Le caractère consensuel de la personnalité au niveau national ;
– Le charisme ;
– La capacité à conduire une nation et à gérer des situations de crise ;
– La capacité à conduire avec neutralité et objectivité les élections présidentielles et législatives ;
– La bonne connaissance des relations internationales.

Article 8
La procédure de désignation comporte deux phases : une phase de présélection et une phase de sélection.
La présélection est opérée par le Collège de désignation en vue de ne retenir que trois personnalités.
La sélection est précédée d’un entretien avec chacune des trois personnalités présélectionnées sur les motivations de leur candidature.
La sélection définitive se fait par un vote à bulletin secret. Le candidat ayant obtenu la majorité absolue dès le premier tour est retenue pour être investi comme président de la transition par le Conseil constitutionnel.
Si aucun candidat ne recueille la majorité absolue, celui qui obtient la majorité simple au second tour est retenu pour être investi comme président de la transition par le Conseil constitutionnel.

Article 9
Le collège de désignation, qui prend en compte les femmes et la jeunesse, se compose comme suit :
– Quinze membres représentant les partis politiques
– Quinze membres représentant les forces de défense et de sécurité ;
– Quinze membres représentant la société civile.

Excepté les représentants des partis politiques, les autres membres du collège de désignation ne doivent pas être membres de l’organe dirigeant d’un parti politique.

Chapitre II : Du gouvernement de la transition

Article 10
Le gouvernement de la transition est constitué de vingt-cinq membres au plus dont la répartition doit prendre en compte les femmes, la jeunesse, les syndicats et les Burkinabè de l’étranger.
Il exerce les prérogatives prévues au Titre IV de la Constitution. Les portefeuilles ministériels de l’administration territoriale, des finances, de la justice, de l’économie, des affaires étrangères, des mines ainsi que les ministères de la défense et de la sécurité ne peuvent être occupés par des membres actifs des instances dirigeantes des partis politiques.

Article 11
Les membres du gouvernement doivent avoir la majorité civile et satisfaire aux conditions prévues pour la candidature à la fonction de président de transition ainsi que celles inscrits à l’article 9, alinéa 2 ci-dessus.

Article 12
Les membres du gouvernement de transition ne sont pas éligibles aux élections présidentielles et législatives qui seront organisées à la fin de la transition.
Chapitre III : De l’Assemblée nationale de la transition

Article 13
L’Assemblée nationale de la transition est composée de quatre vint dix (90) membres désignés par les partis politiques et la société civile selon la clé de répartition suivante :
• 50% pour les partis politiques et,
• 50% pour la société civile.

L’Assemblée nationale de la transition exerce les prérogatives prévues au Titre Y de la constitution. Son président est élu par ses pairs.
Le principe de large inclusion prévaut à la mise en place de l’Assemblée nationale de la Transition.

Article 14
Les membres de l’Assemblée nationale de la transition ne sont pas éligibles aux élections présidentielles et législatives qui seront organisés à la fin de la transition.

TITRE III : DES STRUCTURES TECHNIQUES DE LA TRANSITION

Chapitre 1 : Du Conseil de défense et de sécurité nationale

Article 15
• Le Conseil de défense et de sécurité nationale est constitué ainsi qu’il suit :
• Le Président de la transition ;
• Le Premier ministre ;
• Les ministres en charge e la défense, des affaires étrangères, de l’administration territoriale, de la justice, de l’économie et des finances ;
• La haute hiérarchie militaire.

Article 16
Le Conseil de défense et de sécurité nationale définit les orientations ci-après : la sécurité économique et énergétique, la programmation militaire, la dissuasion, la conduite des opérations extérieures, la planification des réponses aux crises majeures, le renseignement, la programmation de sécurité intérieure et lutte contre le grand banditisme, le terrorisme.
Il propose les réponses aux défis auxquelles les forces de défense et de sécurité sont confrontées.

Chapitre 2 : De la Commission de la réconciliation nationale et des réformes

Article 17
La commission de la réconciliation nationale et des réformes a pour but de restaurer et de renforcer la cohésion sociale et l’unité nationale.

Article 18
Elle est composée de sous-commissions dont notamment :
La sous-commission vérité, justice et réconciliation nationale :
La sous-commission constitutionnelle ;
La sous-commission réformes politiques et institutionnelles ;
La sous-commission réforme électorale ;
La sous-commission finances publiques et respect du bien public ;
La sous-commission gestion des médis et de l’information.

TITRE IV : DU ROLE DE LA COMMUNAUTE INTERNATINALE

Article 19
La communauté internationale accompagne le Burkina Faso tout au long de la période transition en lui apportant son aide et son soutien politiques et financiers pour une transition démocratique, civile, apaisée et inclusive.

TITRE V : DE LA REVISION DE LA CHARTE DE LA TRANSITION

Article 20
L’initiative de la révision de la présente Charte appartient concurremment au gouvernement de la transition et au tiers (1/3) des membres de l’Assemblée nationale de transition, à raison de 15 membres par composante.
Le projet ou la proposition de révision est adoptée à la majorité des 4/5e des membres de l’Assemblée nationale de transition.
Le Président de la transition procède à la promulgation de l’acte de révision conformément à l’article 48 de la Constitution.

TITRE VI : DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES

Article 21
La durée de la transition est de douze (12) mois à dater de la validation de la présente charte par le Conseil constitutionnel.

Article 22
Les autorités de la transition mettent en place un ministère en charge des Burkinabè de l’étranger.
Eu égard aux difficultés techniques et matérielles et des contraintes inhérentes à la période, la participation aux élections législatives et présidentielles de novembre 2015 est réservée exclusivement aux Burkinabè résidant sur le territoire national.

Article 23
Les institutions de la période de la transition fonctionnent jusqu’à l’installation effective des institutions correspondantes de la Ve République.

Article 24
Les dispositions constitutionnelles légales et règlementaires contraires à la présente Charte de la transition sont abrogées.