29/03/2024

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Togo : Exigence de véritables réformes démocratiques

Note de situation au 24 Novembre 2014

Le débat sur les réformes institutionnelles et constitutionnelles est relancé au sein de la classe politique ces dernières semaines. Les nouvelles initiatives sont celles du Combat pour l’Alternance en 2015 (CAP2015) regroupant 8 partis politiques de l’opposition (ANC, CDPA, MRC, NET, PDP, PSR, SANTE DU PEUPLE et UDS), le projet de loi de révision constitutionnelle proposé par l’ADDI et le CAR, la campagne du Conseil National de la Concertation de la Société Civile (CNSC) pour recueillir 500.000 signatures en vue d’un référendum et l’appel patriotique du Groupe de Réflexion et d’Action pour le Dialogue, la Démocratie et le Développement (GRAD) pour une transition politique.

Au regard de ces initiatives, il convient de rappeler la pierre d’achoppement qu’il est indispensable de dégager pour relancer le processus de démocratisation du Togo. Les réformes nécessaires doivent en effet débarrasser le pays des résurgences de l’ère du parti unique parti-Etat en assurant l’indépendance réelle des différents pouvoirs, des processus électoraux équitables et transparents et la soumission de tous les citoyens, sans exception, à la loi. Car des réformes minimalistes ne feront que reporter la problématique, cautionner et encourager la mauvaise disposition du régime togolais à respecter ses engagements.

Synergie-Togo exhorte la classe politique et la société civile togolaises à engager avec courage un agenda politique consensuel destiné à finaliser définitivement l’ensemble des réformes constitutionnelles et institutionnelles et à faire entrer le Togo dans le cercle des nations démocratiques.
Toutes les initiatives politiques ou leurs artifices ne doivent nullement s’éloigner de ces repères ou les édulcorer.

1. Les réformes institutionnelles et constitutionnelles sont une part importante des recommandations de la CVJR

La question des réformes institutionnelles et constitutionnelles a été circonscrite dans le rapport de la Commission Vérité Justice Réconciliation (CVJR) en des termes on ne peut plus clairs : la CVJR réaffirme que « l’alternance politique est une aspiration légitime du peuple qui a le droit de confier les rênes du pouvoir au parti dont le programme politique semble prendre en compte ses attentes »… « Les réformes institutionnelles doivent notamment viser la mise en place de mesures garantissant de meilleures conditions pour l’alternance démocratique. Il s’ensuit que le mandat présidentiel devra être, à l’avenir, limité ». A cet effet, la CVJR « recommande le retour à la formule originelle de l’article 59 de la Constitution du 14 octobre 1992 : « le président de la République est élu au suffrage universel pour un mandat de cinq ans (05), renouvelable une fois ».

Cet impératif des réformes institutionnelles et constitutionnelles comme condition nécessaire à la consolidation de la démocratie, de l’Etat de droit, de la bonne gouvernance et de la réconciliation nationale au Togo n’est que le rappel des engagements pris par le régime de Faure Gnassingbé et les partis politiques de l’opposition lors de la signature de l’Accord politique global de 2006 (APG).

2. Des réformes a minima n’aboutiront pas à créer les conditions pour des élections équitables et transparentes

Le 31 octobre 2014, à la suite d’un conclave de l’opposition regroupée au sein du Collectif Sauvons le Togo et de la Coalition Arc-en-Ciel, huit partis politiques (ANC, CDPA, MRC, NET, PDP, PSR, SANTE DU PEUPLE et UDS) ont constitué une nouvelle alliance dite « Combat pour une alternance politique en 2015 » (CAP-2015). Cette alliance a désigné un candidat commun pour les prochaines élections présidentielles en se donnant comme objectif d’organiser dans les meilleurs délais, la lutte pour obtenir les réformes constitutionnelles, institutionnelles et électorales.

La désignation d’un candidat unique ne doit pas occulter la nécessité de profondes réformes en vue de remettre définitivement le Togo sur la voie de la démocratie et du développement partagé. Il convient de rappeler que malgré la présence d’un candidat unique de l’opposition en 2003, 2005 et 2010, le parti au pouvoir s’est octroyé frauduleusement une confortable victoire, avec plus 60% à chaque élection.

Le 6 novembre 2014, après avoir claqué la porte du conclave de l’opposition, le Comité d’Action pour le Renouveau (CAR) et l’Alliance des Démocrates pour un Développement Intégral (ADDI) ont annoncé l’initiative d’une proposition de loi à l’Assemblée nationale en vue d’exiger la mise en œuvre des réformes. Leurs propositions qui portent sur les articles 38, 51, 52, 53, 54, 55, 56, 57, 59, 60, 62, 79, 100 et 101 de la Constitution, se résument à la suppression du Sénat, à la limitation du mandat présidentiel (5 ans, renouvelable une seule fois), aux conditions d’éligibilité du président de la République, à l’instauration d’un scrutin à deux tours pour les élections présidentielles, à la clarification des prérogatives du premier ministre et à la composition de la Cour Constitutionnelle.

Sachant pertinemment qu’il faut au moins 1/5 des députés selon l’article 144 de la constitution pour déposer un projet de révision constitutionnelle, ces deux partis (ADDI et CAR) qui n’ont pas les 19 députés requis, ont, après avoir quitté le conclave, rendu publique une proposition de révision constitutionnelle en demandant l’appui des partis PDP et ANC qui y sont restés, pour pouvoir le déposer. La manœuvre politicienne, avait pour objectif de faire croire que les partis regroupés au sein de CAP 2015 sont hostiles aux réformes.

Le 4 novembre 2014, un projet de plaidoyer de la société civile en faveur des réformes constitutionnelles et institutionnelles a été lancé par la Concertation Nationale de la Société Civile (CNSC). Ce projet vise à collecter 500.000 signatures de pétitions conformément à l’article 4 de la constitution afin d’initier un référendum d’initiative populaire appelant la population à se prononcer sur le mode de scrutin et la limitation du nombre de mandat présidentiel.

Il convient de rappeler que les recommandations 5 et 6 de la CVJR auxquelles la CNSC se réfère ne portent pas uniquement sur les deux révisions constitutionnelles visées mais sur « la mise en place de mesures garantissant de meilleures conditions pour l’alternance démocratique »… et « de réformes en profondeur liées aux élections et aux conditions de leur organisation ». Faute des réformes en profondeur préconisées, et compte tenu du calendrier annoncé par le CNSC (campagne de sensibilisation de douze mois à compter du 1er Novembre), cette initiative du CNSC n’arrêtera pas le processus électoral en cours pour les présidentielles prévues en mars 2015. Elle risque donc de se muer en un chèque en blanc de 15 années supplémentaires au pouvoir offert à Faure Gnassingbé.
En outre, il est peu réaliste de compter sur la Cour Constitutionnelle actuelle, assujettie au régime RPT-UNIR, pour valider le projet de révision constitutionnelle et être l’arbitre d’une consultation référendaire juste, sincère et transparente. Abdou Assouma, le président de cette Cour, sitôt reconduit dans ses fonctions a déclaré le 5 octobre 2014 que « l’APG de 2006 est caduque » et que « la page des réformes est tournée depuis le vote des députés le 30 juin » par l’Assemblée nationale rejetant le projet de loi des réformes.
Cette déclaration est non seulement scandaleuse mais viole le serment prêté devant le Président de la République le 19 septembre « … de ne prendre aucune position publique et de ne donner aucune consultation sur les questions relevant de la compétence de la Cour Constitutionnelle ». L’article 144 de la constitution stipule que « l’initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au président de la République sur proposition du Premier ministre et à un cinquième au moins des députés composant l’Assemblée nationale ».

Est-il raisonnable de compter sur la magnanimité du Président de la République sachant qu’il peut prétexter que le projet de révision constitutionnelle présenté par son gouvernement a été rejeté par l’Assemblée nationale. En effet, en l’état actuel des textes, il existe entre l’article 4 de la constitution relative au référendum d’initiative populaire et l’article 144 traitant de la révision constitutionnelle, une différence d’interprétation qu’il vaut mieux ne pas laisser à l’appréciation de Abdou Assouma, qui a déjà répondu à la question avant même que celle-ci ne lui soit posée.

Le 8 Novembre 2014, le GRAD lance un appel patriotique aux Togolais afin qu’ils s’approprient son mémorandum et exigent une transition politique conduisant à une assemblée constituante pour élaborer une nouvelle constitution. « Ce nouveau contrat social s’impose à la fois pour préserver la cohésion sociale et la stabilité politique, et éviter à nouveau au Togo, notre patrimoine commun, les gémissements, les traumatismes, les grincements de dents et le deuil ».

Il semble que les gouvernants actuels du Togo ne vont pas, de leur propre gré, initier une transition politique et organiser des élections transparentes aboutissant à une assemblée constituante. A moins qu’une pression populaire équivalente à celle qui a mis fin au régime de Mr Blaise Compaoré au Burkina ne les y oblige.

3. Un retour à la feuille de route du Collectif « Sauvons le Togo »

Toujours d’actualité, la plateforme citoyenne du Collectif « Sauvons le Togo » propose « la mise en place d’une feuille de route consensuelle destinée à opérer les réformes et à organiser des élections transparentes, équitables, en vue de l’ancrage de l’État de droit ». Cette feuille de route n’est pas uniquement l’émanation des composantes actuelles du CST; d’autres partis et organisations de la société civile avaient participé à son élaboration, même s’ils n’ont finalement pas souscrit à la fondation du mouvement.

Dans le contexte de crise de confiance entre les principaux acteurs de la classe politique, un retour vers la feuille de route consensuelle du CST s’impose. En effet, elle décline de manière exhaustive les réformes institutionnelles et constitutionnelles conformes à l’esprit et à la lettre des recommandations 4 à 8 de la CVJR relatives aux réformes politiques, notamment celles devant garantir « le principe républicain de la séparation … et de l’équilibre entre les pouvoirs » et l’organisation d’élections transparentes et équitables au Togo.

4. Conclusion

Synergie-Togo appelle la classe politique et la société civile togolaises à un sursaut patriotique pour transcender leur divergence et s’inscrire dans une démarche unitaire autour d’une feuille de route consensuelle.

Synergie-Togo recommande à tous les membres de la Diaspora togolaise d’unir leurs efforts pour soutenir la lutte du peuple togolais.

Fait à Paris le 25 novembre 2014
Pour Synergie-Togo,
La Présidente,
Brigitte Améganvi
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À propos de Synergie-Togo : Association sans but lucratif, Synergie-Togo, créée à Paris en 2008, a pour objectif de contribuer au développement économique, social et culturel du Togo. L’association a pour mission de sensibiliser les membres de la diaspora togolaise quant à leurs responsabilités vis-à-vis de leur pays d’origine. Elle sert également de cadre de réflexion et d’actions mobilisant les compétences et expériences diverses en vue de la promotion des valeurs de solidarité, de démocratie et des droits humains.