25/04/2024

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Togo: Manifeste des artistes et entrepreneurs culturels togolais

Pour interpeller le Président de la République sur le sort du ministère de la culture.

Monsieur le Président,

Nous, artistes : plasticiens, écrivains, danseurs, chorégraphes, musiciens, hommes de théâtre, entrepreneurs culturels…, réunis par un même rêve pour le Togo, celui de paix, de réconciliation, de fraternité, mais aussi de développement culturel, tenons à vous exprimer notre souci, quant à la place qui se sera faite à la culture et à la promotion des arts dans le programme du prochain gouvernement.

Inutile de rappeler l’ignorance et l’indifférence que les gouvernements qui se sont succédés à la tête de ce pays ont eu à afficher à l’égard des artistes et de leurs métiers. Bien qu’il ait toujours été créé un ministère de la culture dans tous ces gouvernements, soit les ministres qui géraient ce portefeuille se sont illustrés par leur méconnaissance des affaires culturelles, soit les moyens qui ont été alloués à ce département ont été plus qu’insignifiants. Sinon comment expliquer que, dans un pays au carrefour des plus grands événements culturels sous-régionaux, on n’ait pas à ce jour construit une salle de représentation digne de ce nom, un Musée d’envergure internationale, une École des Beaux-Arts, un Conservatoire des Arts et Métiers, même pas un seul théâtre municipal, et qu’il ne s’est pas créé des commissions d’octroi d’aide à la création et à la circulation des œuvres d’artistes ? Comme si le métier artistique n’avait aucune valeur aux yeux de nos gouvernants !

Il n’est pas normal que le Togo demeure un désert culturel. En effet, tout près de chez nous, dans les pays voisins, la considération qui est faite à la culture et à la promotion des arts doit nous inspirer : partout il existe des maisons de la culture ou l’équivalent. On peut citer entre autres le Salon International de l’Artisanat de Ouagadougou et le Festival Panafricain du Cinéma de Ouagadougou au Burkina Faso, la Maison de la culture et le MASA en Côte d’Ivoire, Le National Theatre au Ghana, la Biennale des Arts à Dakar, présidée par le Président de la République du Sénégal ! Sans compter les nombreux prix nationaux, les décorations nationales, qui sont autant de signes reconnaissance des artistes, pour leur contribution au rayonnement mondial de leurs pays !

Au Bénin voisin, le ministère de la culture octroie non seulement des aides aux artistes et aux groupes d’artistes mais finance également, de façon considérable, un grand festival qui fait la fierté de ce pays : le Festival International du Théâtre du Bénin. Au Burkina Faso, l’Etat apporte son soutien à la culture en octroyant des aides sous diverses formes aux artistes et aux entrepreneurs culturels : subventions, dons de terrain, appuis moral et technique, etc…

Monsieur le Président,

Les artistes pensent que l’heure est venue pour le Togo de devenir un Etat normal en ayant des ministères qui fonctionnent à plein régime. Et au ministère de la culture, les artistes veulent avoir affaire à un ministre compétent qui soit au fait des difficultés du métier d’artiste ; un ministre qui écoute les artistes, qui les rassemble et non les divise ; un ministre qui fasse des propositions au conseil des ministres et exige des moyens pour leur réalisation.

Nous voulons des administrateurs capables de gérer la culture, et il appartient à l’Etat de doter le secteur d’un budget à la mesure des ambitions du ministère, car il a été prouvé dans les pays précités que l’investissement de l’Etat dans le domaine de la culture n’a jamais été en pure perte.

Le Togo a traversé de difficiles périodes au cours desquelles les libertés et initiatives culturelles ont beaucoup été éprouvées. Par conséquent, une observation rigoureuse de la crise des mentalités nous permet d’affirmer ceci : là où la politique divise, seule la culture peut rassembler.

La vraie innovation que nous attendons dans le domaine serait la création d’un Conseil national pour la Culture et les Arts, sur le modèle du National Commission of Culture ghanéen, une structure indépendante du Ministère de la Culture, en lien avec les artistes, qui fera des propositions pour un redressement du paysage culturel togolais et s’occupera de la gestion des chantiers importants en partenariat avec le Ministère de la Culture.

Parmi les priorités de cette commission d’experts, on peut citer le dossier du financement des initiatives culturelles privées, et la construction d’un complexe culturel où tous les Arts seraient représentés. Par ailleurs, il faut absolument mettre en place un système de subventions minimum de la culture, afin de soulager l’État des demandes et critiques incessantes des artistes pas toujours au fait de la complexité des questions budgétaires. Dans un Togo où les politiques seraient ambitieux et crédibles auprès des partenaires internationaux et des entreprises locales, la levée de fonds pour le financement de la culture pourrait être une épine enlevée du pied de l’État, qui en récolterait l’usufruit de façon méritée.

Monsieur le Président,

La communauté des artistes et entrepreneurs culturels togolais ne s’est jamais exclue du débat qui a consisté à remettre le Togo sur les rails. A sa manière, et à des niveaux divers, elle a participé à la politique de réconciliation. Nous souhaiterions que les propositions formulées dans ce manifeste soient versées dans les priorités du programme de l’Assemblée Nationale.

A l’heure où toutes les forces vives apportent leur contribution à un véritable redémarrage politique, les artistes se mettent aux côtés des autorités pour leur apporter tout leur soutien et être de véritables partenaires.

Vive la culture pour un Togo nouveau !

Respectueusement vôtre.

Les signataires.