26/04/2024

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De la problématique des armées africaines

Les peuples africains qui ont vécu les traites et esclavages négriers antiques, arabo-islamiques et transatlantiques ; qui ont goûté la colonisation, les « indépendances »dévoyées et la recolonisation en cours ; ces peuples s’avèrent aujourd’hui encore loin, fort loin d’en finir avec leurs misères millénaires. Á preuve, entre autres, les problèmes que leur posent les armées mises sur pied par leurs « dirigeants » postcoloniaux : armées constituées avec les derniers propres desdits peuples. Parmi ces problèmes, je mentionnerai les trois qui me paraissent les plus essentiels :(i) les risques d’explosions d’engins de guerre comme celles qui ont eu lieu à Brazzaville il ya quelques jours seulement et qui sont encore fraîches dans toutes nos mémoires : celles qui se sont soldées par deux cents morts, mille trois cents blessés graves et cinq mille personnes sans abri ; (ii) les coups d’Etat militaires récurrents :coups d’Etat endémiques, inaugurés en Egypte en 1952 (et 1954), au Congo-Kinshasa en 1961 et au Togo en 1963 ; (iii) le caractère inutilement budgétivore de ces armées …
Il m’apparaît alors que le moment est venu pour nous de nous pencher un tant soit peu sur la problématique des armées africaines postcoloniales.

LA RAISON FONDAMENTALE DE L’EXISTENCE DES ARMÉES AFRICAINES

Á l’orée de nos « indépendances », René Dumont écrivit son célèbre « L’Afrique noire est mal partie ». Par réaction épidermique, par amour-propre mal placé, nous l’avons vivement attaqué … ; nous l’avons affublé de tous les malveillants qualificatifs … Mais bien malin celui qui de nos jours oserait mettre en question la lucidité de l’humaniste agronome René Dumont.
En effet, entre autres choses, le fait est que nous n’avons pas, jusqu’à présent, su créer des emplois pour la Jeunesse africaine en âge de travailler, qui constitue à peu près les 60% de nos populations … Il s’ensuit un chômage massif, chronique, criard, avec ses désastreuses conséquences sociopolitiques multiformes. De celles-ci, l’une est l’enrôlement de larges contingents de ces jeunes chômeurs dans des armées aussi inutiles que surdimensionnées …

UNE RAISON SUBSIDIAIRE : L’ILLÉGITIMITÉ ET L’INCOMPÉTENCE NOTOIRES DES ÉQUIPES DIRGEANTES AFRICAINES

Parvenus aux rêves du pouvoir politique par des voies plus ou moins frauduleuses, la plupart de nos roitelets postcoloniaux éprouvent, précisément du fait de leurs illégitimité et incompétence, l’impérieux besoin de se protéger, de protéger leurs régimes contre leurs propres … peuples. Et ce, sans tolérer la moindre alternance au sommet des Etats.
Á cette fin, ces roitelets s’adossent à des armadas prétoriennes et pléthoriques plus ou moins tribalisées. Et, ainsi obligés de consacrer des parts pharaoniques des Budgets nationaux à la mise en place et à l’entretien de ces armadas, nos « dirigeants » postcoloniaux se retrouvent dans l’absolue impossibilité d’assurer le strict bien-être minimal de l’écrasante majorité de nos populations. De nos populations qui ainsi croupissent dans le dénuement le plus complet. Ce qui installe, en permanence, l’instabilité sociopolitique dans nos pays … et y alimente des coups d’Etat militaires.

DES ÉPÉES DE DAMOCLÈS SUSPENDUES SUR LES TÊTES DE NOS PEUPLES

Ainsi donc, en tant que seuls corps organisés et dotés d’effrayantes armes modernes de guerre, conscientes de leur position d’arbitres de fait dans la vie politique de nos pays, déterminées à conserver coûte que coûte ce qu’elles considèrent comme des « avantages acquis » …, les armées africaines postcoloniales ressortent comme de véritables et terrifiantes épées de Damoclès suspendues en permanence sur les paisibles têtes des peuples africains. Elles peuvent faire la pluie et le beau temps chaque fois que bon leur semble … Voilà ce à quoi nous venons d’assister encore les 20 et 21 mars courant au Mali …

QUE FAIRE ?

Le Père de la nation togolaise : Sylvanus Kwami Epiphanio Olympio a été tué le 13 janvier 1963, dans un coup d’Etat militaire perpétré par un quarteron de tirailleurs demi-soldes démobilisés des guerres impérialo-coloniales menées au Viêt-Nam et en Algérie par la France. Lesquels tirailleurs étaient, de toute évidence, instrumentalisés par leurs ex-employeurs… Mais si la cause première, réelle, de cet ignoble assassinat réside dans la décision ferme de Sylvanus Olympio de doter notre pays d’une monnaie nationale propre…, son contexte, son occasion, son alibi gisent sans nul doute dans le refus – par cet illustre patriote togolais – de mettre sur pied une armée aussi inutile que pléthorique. Á ce propos, les Togolais se doivent de savoir que Sylvanus Olympio n’a jamais, au grand jamais rejeté la nécessité d’une défense nationale adéquate. Il prônait le passage obligatoire de tout jeune Togolais par l’apprentissage du maniement des armes… à toutes fins utiles…, mais pas la constitution d’une armada permanente malaisée à gérer.
Au demeurant, dans un volumineux mais peu connu ouvrage intitulé ‘’La nouvelle armée’’, l’immortel Jean Jaurès a théorisé cette conception de la défense nationale qu’il a dû puiser dans la praxis suisse en la matière.

Et j’ai le sentiment que si l’Afrique veut résoudre valablement la problématique de ses armées postcoloniales – armées qui n’excellent que dans des guerres contre nos propres peuples – elle se devra, probablement, d’en venir à cette conception jauressienne et olympienne de la défense nationale. Conception que Sylvanus Olympio avait même commencé à mettre en application avec le concours pratique du militaire togolais feu James Assila…

FEMMES ET HOMMES AFRICAINS EN ARMES, ÉPOUSSEZ LA SAINTE CAUSE DE VOS PEULES !
L’AVENIR DE NOTRE ALMA-MATER : L’AFRIQUE EN DÉPEND !

Par Godwin Tété
Lomé, le 24 mars 2012