14/10/2024

Les actualités et informations générales sur le Togo

Togo: L’Union Européenne complice de la mascarade électorale en préparation

Lentement mais sûrement, le scrutin présidentiel de 2010 se rapproche. Les Togolais seront appelés aux urnes malgré l’ambiance préélectorale surchauffée. En effet, la tension monte de part et d’autre, surtout au sein de l’opposition, à cause de la volonté manifeste du régime de verrouiller le processus. Faure Gnassingbé et le Rassemblement du Peuple Togolais (RPT) restent de marbre aux nombreux appels de l’opposition à l’organisation d’une élection libre, démocratique, transparente et apaisée.

L’illustration en date est le rejet du mode de scrutin à deux tours lors des discussions de Ouagadougou le week-end dernier, avec la bénédiction du Facilitateur Blaise Compaoré. Le Mouvement Citoyen pour l’Alternance (MCA) de Fulbert Attisso et Habia Nicodème est interdit de manifestation au motif qu’il prône la violence -on lui fait le procès de son slogan l’Alternance ou la mort, nous vaincrons- alors qu’au même moment les associations pro Faure, même celles érigées par des présumés coupables de violences en 2005 sont promues.

La volonté du pouvoir de barricader le processus est manifeste, ce qui n’augure pas d’un scrutin transparent et apaisé en 2010. Mais que pense de tout ça le sponsor principal du processus, l’Union Européenne ?

En effet, Bruxelles est le premier partenaire économique et le premier bailleur de fonds du Togo. Ce statut l’amène à financer les processus électoraux en proportion importante dans le pays, le plus souvent à hauteur de 90%.

C’est le cas encore cette année où l’Union Européenne, dans le cadre du Projet d’Appui aux Processus Electoraux (PAPE) accorde près de neuf (09) millions d’Euros au Togo, près de six (06) milliards F CFA pour l’organisation du processus électoral de 2010. La convention de financement a été signée il y a une douzaine de jours.

La gestion de cette manne est confiée au Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). C’est ce financement qui a servi à effectuer l’audit et la révision du fichier électoral et selon les informations, ces opérations auraient coûté quatre millions huit cent soixante-cinq mille soixante-neuf (4.865.069) d’Euros.

L’UFC muette sur…

C’est l’argent du contribuable européen qui a servi à ce financement et cette participation confère à l’Union Européenne un droit naturel de regard sur le déroulement du processus. Elle est en droit absolu de requérir une bonne organisation du processus. Mais elle n’use pas de cette prérogative, malgré la préparation calamiteuse qui est faite. Ce qui frise une complicité. On n’en voudra pour preuve que son mutisme face aux derniers épisodes de l’actualité relative à la préparation du scrutin.

… Révision bâclée

La révision des listes électorales commencée dans la Zone 1 le 14 décembre a été clôturée le mercredi 23 du même mois. Cette opération est un sérieux gage de transparence du scrutin, mais elle a connu des défaillances énormes. Beaucoup de kits déployés étaient en panne ou ont flanché après quelques minutes d’utilisation ; d’autres sont convoyés sans les autres accessoires nécessaires à leur fonctionnement.

Les appels des membres des bureaux lancés à leurs supérieurs hiérarchiques, nommément aux CELI sont restés sans suite. Par endroits c’est le personnel déployé qui est incompétent. Dans nombre de localités de la sous zone 1 où l’opération a été clôturée le samedi 19 décembre, le nombre d’inscrits se comptent au bout des doigts. Le bon sens aurait voulu que l’opération y soit reprise, mais le patron de la CENI l’a juste prolongée de 24 heures.

Ces irrégularités monstres ont été rapportées par l’UFC et le CAR qui ont requis même une reprise totale de la révision des listes électorales dans toute la zone. Mais rien n’y fit. Personne n’est dupe, l’opération a été sciemment bâclée pour réduire la masse électorale dans cette zone favorable à l’opposition. Mais l’Union Européenne qui a investi 06 milliards F CFA dans l’organisation du processus ne lève pas le petit doigt pour ordonner une bonne préparation.

Problématique du mode de scrutin

Le débat sur le mode de scrutin vient d’être clos à Ouagadougou. Le Facilitateur, à l’issue des discussions du week-end dernier entre le RPT, l’UFC et le CAR, a imposé le scrutin à un tour, avalisant ainsi la position du pouvoir togolais.

Blaise Compaoré pense que c’est le prix à payer pour l’apaisement du scrutin et que le mode de scrutin ne doit pas être une référence de la qualité du scrutin. Ce faisant, il chie sur l’Accord Politique Global (APG) du 20 août 2006 signé à l’issue de pourparlers intertogolais recommandés et financés par la Communauté Internationale dont l’Union Européenne. L’accord avait le mérite de décrisper le climat politique tendu créé par la montée fracassante de Faure Gnassingbé au pouvoir. Il recommande justement une série de réformes, dont le changement du mode de scrutin. Il était bien requis le rétablissement du scrutin à deux tours pour donner plus de chance à une élection présidentielle libre, crédible et apaisée.

Mais Blaise Compaoré vient de sacrifier l’APG en recommandant le maintien du tour unique. Ici non plus, l’UE ne trouve à redire. Elle semble même y avoir participé, quand on se rappelle les récentes déclarations d’un de ses représentants, son chef de délégation Patrick Spirlet : « Les deux modes de scrutin se valent » ; « L’Union Européenne n’a pas à prendre position dans ce débat. Il appartient aux Togolais d’en discuter et de parvenir à un choix ». Ce qui a eu l’effet de doper le pouvoir togolais et le Facilitateur Blaise Compaoré.

Processus Vérité, Justice et Réconciliation

L’UE ferme également les yeux sur le processus Vérité, Justice et Réconciliation bancal qui se mène. Le jugement des bourreaux de 2005 devrait créer la peur du gendarme et dissuader la violence électorale en 2010. Mais Faure Gnassingbé ne s’est pas gêné d’entreprendre le processus un peu plus tôt. Ce n’est qu’à l’orée de la présidentielle de 2010 que la Commission a été installée. La conséquence est que ces bourreaux du millier de Togolais courent toujours les rues, et rien ne les empêche donc de récidiver en 2010.

Certains nommément cités sont d’ailleurs remis en scelle. C’est le cas du fameux Major Kouloun qui installe un peu partout de pseudos Groupes de Réflexion et d’Appui au parti RPT (GRAP), en réalité des…. On devrait créer les conditions d’un scrutin pacifique, avec des décisions et des actes idoines. Mais c’est à tout le contraire qu’on assiste. C’est un adepte de la force brute qui a été parachuté à la tête de la Force Sécurité Election présidentielle 2010 (FOSEP), il s’agit du fameux Lt-Col Yark Damehane. Tout ceci n’émeut guère l’Union Européenne à appeler Faure Gnassingbé et les siens à la raison.

Recommandations de 2007 oubliées

Le bon sens est davantage choqué devant ce mutisme de Bruxelles d’autant plus qu’elle avait fait une série de recommandations à l’issue des législatives d’octobre 2007. En effet la Mission d’Observation Electorales de l’UE (MOE) avait émis dans son rapport des pistes pour améliorer le cadre légal et institutionnel, l’administration électorale, les procédures électorales et le fichier électoral. Mais Dieu seul sait si ces recommandations ont été traduites dans les faits par les gouvernants. Et aussi bizarre que cela puisse paraître, l’institution européenne n’a pas une seule fois appelé à leur matérialisation.
Il n’en faut pas plus pour voir à travers ce mutisme de l’UE une complicité tacite avec le régime Faure pour organiser une fois de plus un simulacre d’élection. Car à l’allure où vont les choses, c’est une mascarade électorale de plus qui se prépare pour 2010. Et on risque d’assister au remake des évènements d’avril 2005 : détournement de suffrage, proclamation de Faure vainqueur, protestation des populations, répression violente avec son cortège de morts.

Comme d’habitude, le premier réflexe de l’Union Européenne et de toute la communauté internationale sera de dépêcher des missions au Togo pour compter les …. morts et de demander l’ouverture d’un dialogue politique. Et c’est parti pour le scrutin suivant.

Par Tino Kossi (LIBERTE)