COMITE D’ACTION POUR LE RENOUVEAU (CAR)
POSITION DU CAR à propos DES REFORMES A APPORTER AU CODE ELECTORAL
Le présent Document comporte :
– d’une part, les observations du CAR sur le projet de loi portant modification du code électoral
– d’autre part, les propositions du CAR portant modification du code électoral
– I – OBSERVATIONS SUR LE PROJET DE LOI PORTANT MODIFICATION DU CODE ELECTORAL
Les modifications objet du projet de loi concernent 41 articles du Code Electoral. Les observations du CAR portent sur 11 des articles modifiés ou abrogés.
1- Article 3
a.) Contenu de la modification : Le projet de loi ajoute à l’alinéa unique de cet article, un second alinéa libellé comme suit : « Toutefois, les activités de supervision se font conjointement avec le ministère de l’administration territoriale ».
b.) Observation : L’alinéa 2 nouveau viole l’indépendance conférée à la CENI par l’article 3 en vigueur et le premier tiret de l’article 11 du Code Electoral tant pour l’organisation que pour la supervision des consultations électorales et référendaires.
Le Code Electoral ne prévoit le concours de l’Administration Territoriale que pour les opérations d’organisation des consultations, et ce dans des cas expressément spécifiés à l’article 12.
Le nouvel alinéa 2 de l’article 3 instituant l’ingérence du Ministère chargé de l’Administration territoriale dans la supervision des consultations électorales est contraire à la lettre ainsi qu’à l’esprit de l’alinéa unique actuel et constitue comme tel un recul ouvrant la voie à tous les abus.
Le CAR ne saurait donc l’admettre.
2- Article 11
a.) Contenu de la modification : Dans la version actuelle du Code Electoral la désignation ainsi que la formation des observateurs nationaux figurent à l’article 11 concernant les attributions exclusives de la CENI. Dans le projet de modification, ces opérations sont transférées à l’article 12 concernant les attributions conjointes de la CENI et du Ministère chargé de l’Administration territoriale.
b.) Observations : De l’exposé des motifs du Projet de Loi, il ne ressort aucun passage montrant que lors des élections législatives d’octobre 2007, la CENI a révélé des carences dans la désignation et la formation des observateurs nationaux et qu’il lui faut à l’avenir le concours de l’Administration Territoriale en la matière.
La modification proposée n’est donc pas justifiée et doit être en conséquence écartée.
3- Articles 15 et 17
a.) Contenu des modifications : Ces deux articles qui régissent la composition de la CENI ont subi une série de modifications :
– le nombre des représentants des partis politiques est ramené de 15 à 9 ;
– la répartition de ces représentants des partis politiques entre le pouvoir et l’opposition est laissée à la merci de l’Assemblée Nationale ;
– la désignation des représentants tant du pouvoir que de l’opposition relève désormais du bon vouloir de l’Assemblée Nationale ;
– le terme opposition est laissé imprécis
b.) Observations : Les modifications apportées aux articles 15 et 17 appellent les observations ci-après :
(i) Il est acquis à la lumière des observations formulées par le CAR au sujet de la modification de l’article 3 que la proposition du Gouvernement visant à partager entre la CENI et l’Administration Territoriale les opérations de supervision des élections doit être rejetée. Cela étant, la CENI ne peut, comme par le passé, assurer efficacement la plénitude de ses attributions que si elle dispose d’un nombre conséquent de représentants des partis politiques, notamment pour la constitution des équipes paritaires de contrôle des opérations électorales dans les différentes régions du pays.
(ii) Dans le contexte institutionnel actuel caractérisé par l’existence d’une majorité et d’une opposition parlementaire issues des élections législatives d’octobre 2007, il est inapproprié de faire de l’amalgame entre les représentants des partis politiques au sein de la CENI. La confusion est d’autant plus inadmissible que le projet de loi a utilisé les termes ‘’majorité’’ et ‘’opposition parlementaire’’ pour la composition des CELI, des Comités de Listes et des Bureaux de vote (articles 28, 49 et 50).
(iii) Il est anormal que le Projet de Loi respecte le principe de la parité entre le pouvoir et l’opposition pour la composition des CELI, des Comités des Listes et Cartes et des Bureaux de vote (articles 28, 49 et 50) mais refuse d’appliquer le même principe à la configuration de la CENI.
(iv) Il est tout autant anormal que le Projet de Loi reconnaisse à la Société Civile et au Gouvernement le droit de désigner leurs représentants au sein de la CENI alors que s’agissant des partis politiques, c’est l’Assemblée Nationale contrôlée par le pouvoir qui est habilité à choisir leurs représentants en leur lieu et place. La discrimination a de quoi choquer.
(v) Enfin, tout comme il est précisé aux articles 28, 49 et 50 concernant les CELI, les Comités des Listes et Cartes et les Bureaux de vote, il faut indiquer clairement à l’article 15 que l’opposition y visée est l’opposition parlementaire.
Compte tenu des observations qui précèdent et de la proposition de modification formulée par le CAR au point II.2, il convient de reprendre l’article 15 du projet comme ci-après :
« La CENI est composée de 15 membres :
– 6 membres désignés par la majorité,
– 6 membres désignés par l’opposition parlementaire,
– 2 membres désignés par la société civile,
– 1 membre désigné par le gouvernement, sans voix délibérative.
Les membres sont désignés en raison de leur compétence en matière électorale et de leur probité ».
4- Article 18
a.) Contenu de la modification : L’article 18 du projet prévoit qu’au cas où il doit y avoir remplacement d’un membre de la CENI pour cause de démission, de décès ou d’empêchement, il y a lieu de recourir, en cas de vacance de l’Assemblée, à une session extraordinaire, au lieu de pourvoir au remplacement par la CENI
b.) Observations : La modification apportée à l’article 18 n’est qu’une conséquence de la compétence dévolue de façon anormale à l’Assemblée nationale pour la désignation des représentants des partis politiques à la CENI.
Elle est à rejeter.
5.) Article 24 :
a.) Contenu de la modification : Cet article prévoit entre autres modalités de renforcement du Secrétariat Administratif de la CENI, le recours à des « Agents d’Appui ».
b.) Observations : Le CAR estime que le recours aux Agents d’Appui ne peut s’avérer nécessaire qu’en période préélectorale et électorale impliquant la mise en place de la CENI. Aussi est-il plus indiqué que ce soit la CENI elle-même qui en exprime le besoin et en assure la gestion.
Il convient en conséquence de supprimer le passage en question dans le Projet de Loi.
6.) Article 61
a.) Contenu de la modification : Le Projet de Loi abroge cet article qui prévoit les modalités d’inscription des Togolais résidants hors du Togo sur les listes électorales et de l’exercice de leur droit de vote.
b.) Observations : Le CAR considère que l’abrogation de cet article est de nature à fermer aux Togolais majeurs résidant à l’étranger, la possibilité de s’inscrire sur les listes au Togo, par l’intermédiaire des représentations diplomatiques et consulaires, et de voter le moment venu.
7.) Article 62
a.) Contenu de la modification : Le projet remplace la disposition actuelle prévoyant que les listes électorales « font l’objet d’une révision annuelle placée sous la responsabilité et la direction de la CENI » par un nouveau libellé suivant lequel les listes électorales font ‘’ l’objet de révision dont les modalités sont fixées par décret pris en conseil des ministres ‘’.
b.) Observations : Le nouveau libellé de l’alinéa 2 de l’article 62 entretient du flou au regard de l’article 12 du Code Electoral aux termes duquel : la CENI procède, avec le concours du Ministère chargé de l’Administration Territoriale et d’autres services de l’Etat :
– à la révision des listes électorales…
Il est donc exclu que la révision des listes sans spécification d’échéance puisse s’effectuer sans être placée sous la responsabilité et la direction de la CENI.
Et comme tout porte à y croire, si c’est pour des raisons liées à la non permanence de la CENI, que le flou est voulu, il vaut mieux supprimer l’alinéa 2 en question et s’en tenir à la révision prévue à l’alinéa 3 pour les élections en perspective : « Avant chaque élection générale, une révision peut être décidée par décret en conseil des ministres sur proposition de la CENI ».
8.) Article 70
a.) Contenu de la modification : Le projet abroge cet article qui stipule que : « Les omis sur la liste électorale par suite d’une erreur purement matérielle peuvent, jusqu’au jour du scrutin, exercer un recours devant le président de la CELI. Le président de la CELI, après vérification, peut autoriser, par écrit, l’inscription de l’électeur par le président du bureau de vote. Mention en est faite au procès verbal. »
b.) Observation : Cet article permet, entre autres avantages, aux citoyens à qui des cartes d’électeurs ont été délivrées mais qui ne retrouvent pas leurs noms sur les listes électorales de faire réparer l’omission, au vu de leurs cartes.
L’abrogation envisagée est contre-indiquée.
9.) Article 81
a.) Contenu de la modification : Le projet restreint aux seuls citoyens résidant dans les zones rurales la possibilité de suppléer le défaut de pièces d’identité par des témoignages pour la délivrance des cartes d’électeurs.
b.) Observation : La modification ne se justifie point dans la mesure où dans les zones urbaines comme dans les zones rurales, les pouvoirs publics ne se sont pas à ce jour conformés à la disposition de l’APG prescrivant la délivrance obligatoire des cartes d’identité à tous les citoyens.
Elle ne saurait donc être retenue.
10.) Article 82
a.) Contenu de la modification : Le projet abroge l’article 82 qui stipule : « Les cartes doivent être entièrement délivrées au plus tard 72 heures avant l’ouverture de la campagne électorale »
b.) Observation : Les raisons de l’abrogation de cet article méritent d’être clarifiées par rapport à l’obligation d’avoir des listes électorales dûment arrêtées et déposées dans les bureaux de vote à la date du scrutin.
11.) Article 88
a.) Contenu de la modification : Le projet de Loi porte de 08 heures à 24 heures le délai minimal dans lequel, la tenue d’une réunion sur la voie publique doit être notifiée au Préfet ou au Maire, à l’avance.
b.) Observation : Rien ne justifie que le délai minimal de 08 heures qui a jusqu’ici fonctionné à la satisfaction de tous, soit remis en cause ou moment où la police et la gendarmerie nationales sont mieux formées et plus outillées.
II- PROPOSITIONS DU CAR PORTANT MODIFICATION DU CODE ELECTORAL
Ces propositions sont au nombre de six.
1. Modification du passage de l’article 15 relatif au nombre des représentants du Gouvernement au sein de la CENI
Pour les dernières élections législatives, il était normal que le Gouvernement d’Union Nationale comprenant la mouvance présidentielle et l’opposition ait deux représentants au sein de la CENI. Il ne peut en être autant pour le Gouvernement actuel formé par une majorité incarnée par la mouvance présidentielle.
Il convient en conséquence, de ramener à un le nombre de représentants du Gouvernement.
2. Modification visant à compléter l’article 97 du Code électoral
Le CAR propose que l’article 97 soit complété par un second alinéa libellé comme suit :
« Il (le bulletin unique) est en outre signé au jour du scrutin par deux membres du bureau de vote choisis l’un parmi les représentants de la majorité, l’autre parmi les représentants de l’opposition ».
3. Modification du passage de l’article 122 relatif à la délivrance des résultats des bureaux de vote aux délégués des candidats
Suivant le libellé en vigueur de ce passage de l’article 122 : « le président délivre copie signée des résultats affichés aux délégués des candidats qui en font la demande. »
La remise d’une copie des résultats des bureaux de vote aux délégués est une garantie fondamentale pour le contrôle par les candidats de la conformité des résultats affichés. Elle doit être d’office et non subordonnée à une quelconque demande. La formulation actuelle du passage en question a donné lieu à des abus dans le passé.
Le CAR propose qu’elle soit reprise comme ci-après : « Le président délivre copie signée des résultats affichés aux délégués des candidats ».
4. Modification de l’article 131 concernant les procurations à des fins de vote
L’authentification des procurations à des fins de vote, telle qu’elle s’effectue sous forme de légalisation de signature sur la base de l’actuel article 131 du code électoral a donné lieu à de pires abus.
Il importe de faire en sorte qu’à l’avenir, elle relève de la compétence des CELI.
Il y a lieu de reformuler en conséquence l’article 131 comme ci-après: « Les procurations données par les personnes visées à l’article 129 ci-dessus doivent être authentifiées par les CELI ».
5. Modification de l’article 158 concernant la répression de la pratique de corruption des électeurs
Le Code électoral a prévu en son article 157 que « quiconque, par dons, libéralités en argent ou en nature ou par promesse de libéralités, aura influencé ou tenté d’influencer le vote d’un ou plusieurs électeurs, soit directement, soit par l’entremise d’un tiers, quiconque par les mêmes moyens aura déterminé ou tenté de déterminer un ou plusieurs électeurs à s’abstenir, sera puni d’une peine d’un (01) à cinq (05) ans d’emprisonnement et d’une amende de cent mille (100 000) à un million (1 000 000 ) de francs CFA. »
L’article 158 organisant les modalités de mise en œuvre de l’article 157, s’est révélé inefficace dans les faits.
C’est pourquoi, le CAR propose qu’il soit repris comme suit :
« En application de l’article 157 ci-dessus, tout citoyen peut, à tout moment, saisir d’une plainte, le ministère public. En cas d’indices pertinents, les auteurs seront obligatoirement poursuivis en procédure d’urgence devant un tribunal correctionnel à créer, en vue de la répression de la corruption en matière électorale.
Tout citoyen qui y a intérêt peut également citer directement les auteurs devant ledit tribunal correctionnel en se constituant partie civile.
En cas de condamnation, les intéressés sont déchus de leurs droits civiques pour une durée de cinq (05) ans y compris la perte du mandat afférant au scrutin concerné. »
6. Modification des passages des articles 191 et 192 concernant l’affectation des sièges gagnés par une liste aux élections législatives
L’article 191 en vigueur a adopté pour l’affectation des sièges gagnés, le mode de scrutin de ‘’liste bloquée’’ : « les députés sont élus au scrutin de liste bloquée à la représentation proportionnelle ».
En application de cette disposition, l’article 192 dispose que « les candidats sont déclarés élus selon l’ordre de présentation sur la liste » et « qu’en cas de démission, de décès ou d’acceptation d’une fonction déclarée incompatible avec la fonction de député, les sièges vacants sont occupés suivant l’ordre de présentation aux électeurs ».
Ces dispositions ont révélé dans leur mise en œuvre, des difficultés dans le passé.
Le CAR propose pour cela que les articles 191 et 192 soient modifiés comme suit :
Article 191 (alinéa 1er) : « Les députés sont élus au scrutin de liste ouverte, à la représentation proportionnelle… »
Les autres alinéas sont sans changement.
Article 192 : « Chaque liste comporte le double du nombre de sièges à pourvoir par circonscription électorale.
Les noms des candidats devant siéger pour chaque liste au titre des sièges qui lui sont attribués, sont notifiés à la Cour Constitutionnelle par les partis politiques, les groupement de partis politiques ou les têtes de liste des candidats indépendants.
En cas de démission, de décès ou d’acceptation d’une fonction déclarée incompatible avec la fonction de député, il est pourvu aux sièges vacants, suivant la même procédure. »
Le vote a lieu dans le cadre des préfectures et de la commune de Lomé comme circonscription électorale.
Fait à Lomé, le 09 février 2009
Pour le CAR
Le Président National,
Me Dodji APEVON
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