14/10/2024

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Togo : Rapport général de la table ronde du GRAD

GROUPE DE REFLEXION ET D’ACTION POUR LE DIALOGUE,
LA DEMOCRATIE ET LE DEVELOPPEMENT (GRAD)

Du 26 au 27 novembre 2008, le Groupe de Réflexion et d’Action pour le Dialogue, la Démocratie et le Développement (GRAD), en collaboration avec le National Endowment for Democraty (NED), a organisé à l’Hôtel Ibis de Lomé Centre, une table ronde sur le thème « Au-delà des élections législatives : la problématique de la Démocratie, de l’Etat de droit et du redressement économique ».

La table ronde a rassemblé plusieurs participants représentant certains partis politiques, certaines organisations de la société civile, la chefferie traditionnelle, certaines confessions religieuses et des représentants de la diaspora.

Dans son allocution, le président du GRAD, Dr Victor Alipui a souhaité la bienvenue aux participants et les a remerciés d’avoir répondu très nombreux à l’invitation du GRAD. Il a émis le vœu que les différents sous-thèmes qui seront présentés puissent animer les débats desquels jaillira la lumière qui permettra d’éclairer les actions de nos acteurs politiques, des autorités togolaises et des institutions internationales qui accompagnent le Togo dans sa marche vers la démocratie, l’état de droit et le développement.

Si des efforts ont été faits dans le domaine de la liberté d’opinion, de la liberté d’expression, de la liberté de presse, et de la liberté de former des partis politiques et des associations, le président a fait remarquer que le chemin à parcourir pour la consolidation de la démocratie et de l’état de droit reste long et semé d’embûches.

Depuis plus de cinquante ans, poursuit-il, le Togo est constamment confronté à un épineux problème, celui de l’impunité qui a toujours existé tout au long de son histoire depuis l’époque coloniale jusqu’à nos jours et qui mine sa cohésion sociale.

Enfin, le président a invité les participants à ouvrir, au cours de leurs débats, de nouvelles pistes qui permettent au Togo de sortir, de façon définitive, de la longue crise dans laquelle il s’est enlisé.

A son tour, le secrétaire général, M. Assiongbon Ekoué, a présenté le GRAD comme une association régie par la loi du 1er juillet 1901 et enregistrée au Ministère de l’Administration Territoriale de la Décentralisation sous le n° 3572. Il a en outre précisé, contrairement à ce que pensent certains togolais, que le GRAD n’est pas un parti politique. Il a parlé de ses objectifs, de ses moyens, de ses ressources et de la composition de son bureau et de ses commissions.

Il a ensuite rappelé les raisons et le but de la table ronde à savoir : créer une plate-forme de discussion entre les Togolaises et les Togolais et amener les participants ayant bénéficié de ces échanges à réfléchir individuellement et collectivement sur les possibilités de sortie de crise, à mieux identifier les solutions idoines et à formuler par la suite des suggestions sur les structures à mettre en place pour parvenir à une société démocratique.

Le coordonnateur du GRAD, M. Toulassi Victor a présenté le programme des deux jours et rappelé la manière dont les travaux vont se dérouler : exposés en séance plénière, discussions générales sur les exposés et travaux en groupes sur les sous-thèmes suivants.

I – De la nécessité des reformes constitutionnelles et institutionnelles : l’Assemblée Constituante est-elle une voie obligée ?

II – Du problème de l’impunité à la réconciliation nationale

III – L’incontournable politique de redressement économique et financier et les défis d’une économie de progrès.

I – « De la nécessité des réformes constitutionnelle et institutionnelle : l’assemblée constituante est-elle une voie obligée ? »

Le premier sous-thème a été présenté par M Adama Kpodar, Professeur agrégé de droit public et de science politique, Vice-Doyen de la faculté de droit de Lomé. Le Modérateur de cette séance, M. Klousseh, ancien ministre et ancien fonctionnaire de la BCEAO, a, dans son mot introductif, rappelé la formulation du thème en relevant que l’idée de la nécessité d’une assemblée constituante renvoie à la loi fondamentale et tient compte du vécu quotidien du peuple togolais dans son ensemble. Il a invité les participants à suivre l’exposé du spécialiste.

L’orateur a précisé que la question de la réforme constitutionnelle et institutionnelle est d’actualité. Selon lui, la constitution subit l’usure du temps, comme toutes choses humaines avant de retenir que le réformisme constitutionnel, signe de l’ingénierie constitutionnelle, conduit à admettre deux conceptions de la constitution.

Une définition juridique : ensemble des normes qui traduit le désir, d’organisation rationnelle de l’Etat.

Une définition politique : valeurs et équilibre politique d’une société à un moment donné. L’opération constituante se présente alors comme un renouvellement de la fondation de l’Etat à effectuer avec le concours actif et conscient de la nation. Il a mis l’accent sur la définition et la typologie du réformisme constitutionnel. Il a rappelé que le Togo considéré à l’époque coloniale comme une colonie modèle est depuis les indépendances un laboratoire de constitutions (1960-1963) (1963-1967), (1967-1979), (1979-1991), (1991-1994) et à partir de 1992 la constitution du 14 octobre de la même année (IVe République).

Ce va et vient constitutionnel réactualise la quête permanente de la meilleure forme de gouvernement pouvant apporter au peuple togolais la stabilité politique, la paix, le développement économique et social.
Ainsi la question de la nécessité et des méthodes à utiliser pour réaliser la réforme se pose. Pour la nécessité, les erreurs graves qui ont caractérisé la révision de décembre 2002 consacre un régime hermaphrodite et crée un risque de blocage institutionnel.

Pour les méthodes, elles varieront selon qu’il s’agisse d’une réforme partielle ou totale. Parlant de l’objet de la réforme, l’orateur se réfère aux recommandations de l’APG pour distinguer:

la réforme des institutions avec

• un pouvoir exécutif responsable et mieux contrôlé,
• un pouvoir législatif renforcé
• un pouvoir juridictionnel restauré

de celle des droits et libertés qui prévoit la possibilité d’une saisine directe des individus en cas de violation des droits fondamentaux avec un mécanisme de filtrage.

Abordant enfin les techniques de la réforme constitutionnelle, le Professeur KPODAR retient par rapport :

• aux techniques juridiques
– la révision partielle prévue par les dispositions de la constitution,

– la révision totale qui est l’élaboration d’une nouvelle constitution par : i) les méthodes autoritaires, ii) les modes démocratiques

• aux techniques politiques
– les accords politiques

II – Du problème de l’impunité à la réconciliation nationale

Ce deuxième sous-thème, ayant pour modérateur M. Georges Amegandji avocat, ancien bâtonnier, est présenté par M. Tchaa Bamazi représentant le Président de la Commission nationale des Droits de l’Homme (CNDH) et M. Dan Afidegnon, membre du GRAD.

Le modérateur a d’entrée de jeu, énoncé le sous-thème. Il a fait un bref rappel de l’expérience Sud Africaine par rapport au processus Vérité – Justice – Réconciliation et a établi un lien direct avec le premier sous-thème intitulé : « de la nécessité des réformes constitutionnelles et institutionnelles : l’Assemblée constituante est-elle une voie obligée ? ».

Le premier orateur a d’abord défini l’impunité considérée comme l’absence, en droit ou en fait, de la mise en cause de la responsabilité pénale des auteurs de violations, ainsi que de leur responsabilité civile, administrative ou disciplinaire, en ce qu’ils échappent à toute enquête tendant à permettre leur mise en accusation, leur arrestation, leur jugement et, s’ils sont reconnus coupables, leur condamnation à des peines appropriées, y compris à réparer le préjudice subi par leurs victimes.
Cette démarche de clarification lui a permis de traiter dans la première partie du problème de l’impunité en établissant notamment les causes et les manifestations ou conséquences dans le contexte togolais. Ainsi M. Tchaa a déterminé comme causes de l’impunité :

– Absence de volonté politique de réprimer certains actes criminels, surtout à caractère politique ;
– Faiblesse ou même absence de mécanismes appropriés capables de redresser les torts ;
– Corruption ;
– Trafic d’influence ;
– Pratiques discriminatoires à l’égard de personnes ou groupes de personnes, etc.

Au titre des conséquences de l’impunité, le présentateur a particulièrement mis l’accent sur :

– La limitation ou négation totale des droits de l’homme et des libertés publiques ;

– La frustration des victimes et de leurs ayants droit ;

– La désobéissance criminelle et la loi de la jungle ;

– La vengeance privée ;

– Dislocation du tissu social, source de troubles sociopolitiques généralisés ;

– Le manque de confiance dans les institutions.

Pour l’intervenant la lutte contre l’impunité, préalable à la réalisation de la réconciliation nationale passe par la mise en œuvre par l’Etat de ces obligations générales de respecter, protéger et réaliser les droits de l’homme qu’il s’est engagé à garantir aux personnes vivant sous sa juridiction. Au nombre des mesures qui sont pertinentes dans une société sortant d’une crise, il a mentionné la nécessité d’une commission vérité, justice et réconciliation.

Enfin, M. Tchaa a indiqué la démarche qui à ses yeux constitue des garanties de non renouvellement des pratiques de l’impunité et la voie pour la réconciliation nationale. A cet égard, il a insisté sur l’importance de la réforme des institutions de l’Etat, la dissolution des groupements armés paraétatiques et la réforme des lois et des institutions contribuant à l’impunité.

Le deuxième orateur, M. Dan Afidegnon, après un bref aperçu historique du Togo depuis l’époque coloniale 1884 jusqu’à l’indépendance le 27 avril 1960, a brossé un tableau pas très reluisant en matière des droits de l’homme.

En rappelant que l’émancipation du Togo s’est faite en plusieurs étapes d’un processus très mouvementé, il a indiqué que le pays a connu dès le début de son existence un climat politique controversé et jalonné de violences politiques. Selon l’orateur, les différentes tentatives de réconciliation n’ont jamais abouti à cause du manque de confiance de la population. Il a, en citant quelques cas de violation massive des droits de l’homme, précisé que le principe de l’impunité a été érigé par le pouvoir comme méthode privilégié de conservation ou de conquête du pouvoir avant de proposer des pistes de réflexion pour son éradication.

Pour le long terme, il faut concentrer nos énergies sur l’éducation civique qui peut contribuer à renforcer une culture fondée sur la légalité et le respect des droits de l’homme. Elle doit concerner toutes les couches sociales de la population. L’instruction civique doit faire désormais partie : i) des programmes d’enseignement scolaire et universitaire, ii) des programmes de formation au sein des partis politiques et des associations de la société civile, iii) les programmes de formation et de recyclage au sein des forces armées, des forces de l’ordre et de sécurité.

Pour les court et moyen termes, il est indiqué de considérer comme obligatoire le respect des engagements pris ; à savoir le respect des 22 engagements et de l’APG signé par tous les principaux acteurs de la vie politique de notre pays.

III – L’incontournable politique de redressement économique et financier et les défis d’une économie de progrès

La modératrice, Mme Ekué Michèle, inspecteur des impôts et ancien ministre a d’abord relevé un certain nombre de disfonctionnements en mettant l’accent sur l’état de pauvreté du Togo, pays pauvre très endetté et sur l’approche de solutions à proposer pour une sortie de crise par les experts que nous avons invités.
Le troisième sous-thème a été présenté par trois orateurs : Mme Freitas Jacqueline le professeur Nouboukpo et le Dr Sodokin Koffi.

Le premier à prendre la parole est Mme Freitas, ancienne Directrice de l’économie. Elle remercie les instances du GRAD pour lui avoir fait appel pour animer cette séance. Elle a ensuite rappelé l’origine des programmes d’ajustement structurel au Togo à savoir, la flambée des prix des matières premières assortie d’une politique de grands travaux, suivie de la baisse brutale de leur cours, ce qui a engendré une dette élevée. Elle a parlé du déroulement de ces différents programmes aussi bien avec le Fond Monétaire International (FMI) qu’avec la Banque Mondiale.
Les conditions généralement imposées dans le cadre de ces programmes sont : la privatisation, la lutte contre la corruption, des réformes pour éviter les entraves à l’évolution économique, la suppression des subventions aux secteurs sociaux, la réduction de l’effectif dans l’administration, et le désengagement de l’Etat.

Au Togo, les points d’ancrage étaient les finances publiques où le Fonds Monétaire International intervenait dans beaucoup de domaines pour exiger la maîtrise des dépenses, l’informatisation de la comptabilité publique, la restructuration de la dette intérieure et extérieure, la privatisation des entreprises publiques, la fixation des prix dans leur ensemble sauf pour l’eau, l’électricité qui sont laissées à la discrétion de l’Etat (tout le reste devant être libéralisé). Le dernier point d’ancrage, ce sont les mesures sociales : la lutte contre la pauvreté.

Selon Mme Jacqueline Freitas, ce programme a eu comme impact la meilleure connaissance des agrégats économiques (centralisation des données statistiques pour leur conférer un peu plus de fiabilité), le renforcement des structures administratives, l’accès à l’information des services publics, un meilleur recouvrement des recettes budgétisées, une plus forte mobilisation au niveau des finances publiques, la transparence dans la gestion des finances, un meilleur contrôle des recrutements et une maîtrise de la masse salariale, etc. Tout ceci a été compromis par la longue crise assortie d’arrêt de financement extérieur. Elle n’a pas manqué de mentionner les faiblesses des programmes à savoir les conditionnalités qui souvent constituent des contraintes pour les autorités, une imposition de leur doctrine, la dégradation du niveau social, toutes autres mesures qui ont fini par déséquilibrer les pays sous programme.

Le second orateur, le Professeur Kako Nouboupko, a d’entrée de jeu mis l’accent sur l’extraversion de notre économie. Il a souligné que nos institutions actuelles sont importées. La bonne gouvernance est le produit d’un contrat social pour les hommes qui vivent ensemble. Malheureusement, nous n’avons pas de vision et nous ne faisons pas non plus la part des choses entre démocratie et croissance économique. La démocratie a un coût et nécessite aussi une bonne répartition des produits de la croissance. Nous avons beaucoup de peines à créer la valeur ajoutée puisque nous transformons très peu nos matières premières. Il va sans dire que le modèle ne soit pas adapté au développement car nous ne créons pas de richesse.

Après avoir parlé des aberrations qu’il a relevées par rapport au francs CFA à parité fixe arrimé à l’Euro (perte de l’autonomie monétaire, perte de devises, inflations importées), il a proposé que dans l’économie post ajustement structurel, il faut remettre le service de chance au service de la croissance. Il a estimé qu’aujourd’hui, nous n’avons plus besoin de la garantie de la France mais s’est demandé si nous pouvons avoir notre propre monnaie. Il a estimé que cela est possible mais au plan régional. Evoquant le problème de tarif extérieur commun, il a évoqué la nécessité d’un certain protectionnisme au niveau régional. Il a conseillé de rénover notre politique agricole en tenant compte des expériences passées, éviter la mauvaise gestion, développer les interprofessions, protéger l’agriculteur, instaurer un fonds de productivité. Pour sortir du piège monétaire, il a suggéré l’autonomie de la gestion monétaire, la reprise du contrôle social de nos institutions.

Intervenant à son tour, Dr Sodokin Koffi a fait la distinction entre politique économique et économie politique et a mis en évidence leur importance. Il a parlé de l’économie de marché et souligne ses insuffisances. Il a proposé une orientation des objectifs du développement économique et a mis en évidence les possibilités d’application. Dr. Sodokin a appelé au respect des principes qui gouvernent l’économie, à veiller aux réinvestissements en utilisant les profits. La remise en cause de nous-mêmes et de l’Etat peut permettre de réaliser des performances. Il a invité les uns et autres à faire preuve de patriotisme, il a recommandé de financer l’économie par nos propres ressources et a attiré l’attention sur le concept de secteur informel au lieu de micro entreprise. Pour ce faire, la construction du marché et le rétablissement de la confiance sont les éléments déterminants.

Les six (06) exposés qui ont développé les trois sous-thèmes ont été suivis de débats très riches et très instructifs. Aussi, les participants sont-ils revenus sur toutes les propositions faites en apportant leurs contributions et en demandant des clarifications sur les points qui leur paraissent fondamentaux.

A cet égard, et par rapport :

 au premier sous-thème, les participants ont reconnu que la constitution doit assurer le bonheur du peuple, raison pour laquelle il doit être consulté avant toute révision fût-elle partielle ou totale. Ils ont en outre rappelé que la constitution de 1992 est la seule acceptée par le peuple y compris le Président EYADEMA. Abordant la question de l’alternance, il a été indiqué de considérer comme nécessaire, la limitation des mandats étant entendu que seuls les mandats successifs doivent être limités. Les participants ont enfin souhaité que le mode de scrutin à deux tours soit adopté pour l’élection présidentielle car reflétant mieux la majorité que le scrutin à un tour qui, dans l’hypothèse où il y a par exemple dix (10) candidats, le président de la république pourrait être élu par une minorité alors que les neufs(09) autres candidats réunis constitueraient la majorité

 au deuxième sous-thème, et selon les participants, l’un des problèmes majeurs qui nourrissent la crise aux multiples facettes que vit le Togo depuis plusieurs années est l’impunité des délits et des crimes connus par les acteurs politiques. En effet, le refus de reconnaître ces violations graves des droits fondamentaux du citoyen et de les sanctionner conformément aux lois en vigueur cristallise les rancœurs et génère l’esprit de vengeance et de justice privée. Cet état de choses ne peut pas mener à la réconciliation que souhaitent tant tous les Togolais. La résolution du problème que pose l’impunité est par conséquent la clé de voûte qui doit soutenir la réconciliation.

A cet effet, il est nécessaire de créer les conditions indispensables au rétablissement de la confiance et ce grâce à un mécanisme efficace à mettre en place. Pour ce faire les éléments moraux doivent être pris en compte et une justice transitionnelle doit être appliquée.

La table ronde estime qu’une bonne administration de la justice constitue un aspect important de la démocratie qui vivifie le tissu socio-politique, économique et culturel de tout pays ; il doit en être ainsi également au Togo.

Cela étant dit, il demeure des divergences dans l’analyse et l’identification des acteurs des violences qu’a vécues le pays. Il a été rappelé que tout acte troublant l’ordre public et portant atteinte à l’intégrité physique et morale des citoyens ainsi qu’aux biens publics et privés quels qu’en soient les auteurs, les origines et les causes constitue des violations des droits de l’homme passibles de sanctions ou pénales, civiles, administratives ou disciplinaires. Pour rétablir la paix dans les cœurs, il faut accorder une valeur absolue à l’administration d’une bonne justice qui en tout état de cause doit aider à l’écriture de l’histoire du Togo.

 au 3ème sous-thème qui a permis à la table ronde de faire ressortir les éléments négatifs de la gestion de l’économie togolaise tels que l’état de délabrement avancé des infrastructures, le niveau élevé de la corruption qui gangrène le pays, l’extraversion de l’économie nationale, la fuite des capitaux, et le système bancaire sinistré. La table ronde a, en outre, proposé des pistes de réflexion pour faire sortir le pays du marasme, favoriser le redressement économique et financier, et faire évoluer l’économie dans la voie du progrès. A cet effet elle suggère la conception d’une politique budgétaire efficiente en collaboration avec le FMI.

Par ailleurs elle a reconnu la nécessité de :

– développer la filière coton et résoudre le problème de la fertilité du sol avec la possibilité de produire sur place les engrais phosphatés,

– accompagner les paysans dans les actions à mener notamment dans le domaine des cultures vivrières.

– mettre en place des structures qui absorbent la main d’œuvre constituée par les jeunes surtout dans le domaine agricole

– examiner les problèmes qui se posent dans les filières café et cacao et les résoudre rapidement

– régler le problème foncier,

– arrêter la destruction des forêts et procéder à une politique de reboisement systématique,

– trouver une solution au problème de la dette notamment le remboursement de la dette intérieure afin de permettre la relance de l’économie nationale,

– encourager la formation universitaire en dotant les universités de moyens importants en vue de former les valeurs dont le pays a besoin,

– régler les problèmes qui se posent dans la zone franche industrielle.

Ensuite trois groupes de travail ont été constitués. Leurs conclusions et recommandations sont jointes en annexe au présent rapport.
Enfin la plénière a permis à la table ronde de délibérer sur les rapports des trois groupes et d’enrichir les propositions qui y sont contenues.

La table ronde, au terme de la plénière a fait les recommandations suivantes :

– une réforme totale de la constitution avant les échéances de 2010 par une assemblée constituante est pratiquement impossible compte tenu du facteur temps ; la constituante doit plutôt s’inscrire dans une perspective à moyen terme après l’élection présidentielle ; ou, à défaut, pour contourner le facteur temps, l’application de celle de 1992 telle qu’adoptée par référendum,

– une formation civique soutenue,

– la mise en place d’une commission Vérité Justice et réconciliation comprenant en son sein des personnes de bonne moralité, de probité et d’intégrité. Elle doit être indépendante du pouvoir politique,

– l’adoption d’une politique de gestion des finances publiques conformément aux procédures et règles établies par la comptabilité publique et la loi des finances

– l’adoption d’une politique de monnaie active au niveau de l’UEMOA pour financer l’économie en prenant en compte les énormes réserves de change de la Banque centrale qui assurent un taux de couverture monétaire de 120% contre 20% prévus par les statuts ; ceci réduirait le recours à l’aide des bailleurs de fonds qui reste toujours liée

– le combat acharné contre la corruption à tous les niveaux,

– l’adoption et l’application d’une véritable politique agricole,

– des mesures pour favoriser une meilleure visibilité du secteur dit informel qui en réalité est celui de la micro entreprise,

– la réforme du système bancaire,

– l’application de la bonne gouvernance à la gestion de l’Etat, des entreprises publiques et du secteur privé,

– la mise en place d’un environnement macroéconomique approprié, juridique et judiciaire stable et transparent garantissant le développement des affaires,

– la coopération de tous les Togolais pour promouvoir le patriotisme et la confiance mutuelle comme socles du développement socio-économique et politique.

En conclusion des travaux de la table ronde, M. Victor Alipui, président du GRAD, a remercié tous les participants pour leurs contributions aux débats sur les différents thèmes présentés par nos éminents conférenciers. Ces débats ont été francs et sincères, menés dans un esprit d’ouverture, ce qui nous a permis de parvenir à des conclusions et recommandations qui, si nous nous efforçons de les mettre en œuvre permettront à notre pays de sortir de sa longue crise politique et de prendre le chemin du progrès économique, social et culturel. Il a souligné que nous sommes appelés à vivre ensemble dans l’harmonie et la cohésion sociale. A cet égard, un effort considérable est à faire pour mettre fin définitivement à l’impunité en empruntant la voie de la justice qui reste la condition de la réconciliation, de la paix et de la stabilité politique. Il a donc convié tous les participants, notamment les chefs traditionnels qui sont très proches de nos populations, à œuvrer inlassablement dans ce sens. Il a promis que de telles rencontres seront périodiquement organisées afin de débattre, hors milieux et cercles officiels, des problèmes d’intérêt national.

Lomé le 5 décembre 2008