28/03/2024

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Togo : 60e anniversaire de la naissance de Tavio Ayawo AMORIN (20 novembre 1958-2018)

Au moment même où la situation politique togolaise nous confronte à une nième répétition d’une révoltante tragicomédie autour de la Constitution togolaise pour laquelle il a été assassiné, c’est le lieu de rendre un hommage déférent à la mémoire du valeureux combattant Tavio Ayawo Tobias AMORIN. Car, s’il n’avait pas été assassiné dans le combat qu’il menait pour défendre les valeurs démocratiques inscrites dans la Constitution que le peuple togolais était appelé à adopter par référendum en 1992, il aurait célébré, en ce jour du 20 novembre 2018, son vénérable 60e anniversaire. A cet hommage, doit être associée la mémoire des plus de 300 morts, cyniquement assassinés lors du traquenard tendu aux participants de la marche de soutien à Etienne GNASSINGBE EYADEMA, le 20 novembre 2004.

IL y a 60 ans, le 20 novembre 1958, naissait, à Lomé, Tavio Ayawo Tobias AMORIN, de Carlos AMORIN, son père qui était un agent de la firme commerciale britannique United African Company (UAC), filiale du groupe UNILEVER. Sa mère, Adolé née GOEH-AKUE, était une commerçante qui sera plus tard caissière à la BCEAO. Il était le dernier garçon d’une fratrie de 4 enfants dont 3 filles sont nées avant lui (Sophie, Henriane et Chantal).

Fils d’un père engagé dans le combat pour l’indépendance nationale aux côtés de Sylvanus OLYMPIO qui le nommera plus tard directeur de la féculerie de Ganavé, Tavio venait au monde près de sept mois après l’éclatante victoire des nationalistes aux élections législatives tenant lieu de référendum sur l’autodétermination du 27 avril 1958 par laquelle le peuple togolais arracha son indépendance « Ablodé ! ».
Il passa son enfance au quartier Anagokomé près du Grand Marché de Lomé, dans la maison familiale des AMORIN, Avenue Thiers à l’époque, d’où il commença sa scolarisation en 1964 à la voisine Ecole primaire catholique de Kokétimé. Brillant élève, il y achèvera ses études primaires par l’obtention du CEPE avec la mention très bien en 1970, année où il commença ses études secondaires au Collège Saint Joseph de Lomé.
Ce fut en 1977 qu’il obtint son baccalauréat avec la mention bien et partit en France poursuivre des études en maths-physiques à l’Université de Poitiers qu’il quitta pour venir s’inscrire à Paris où il étudie l’informatique et l’organisation.

Comme tout bon étudiant, il commença à affuter ses armes en politique en militant et en se formant aux côtés d’autres étudiants tant du Parti communiste que du Parti socialiste français.

Par la suite, il fera plusieurs stages notamment chez MATRA, la firme française d’armement. Au cours de cette période, il créa, pour arrondir ses fins de mois, une société de services tout à fait originale par laquelle il fournissait des croissants sur commande par simple de téléphone aux clients qui voulaient se faire livrer à domicile ou sur leurs lieux de travail. Cela lui vaudra un témoignage de reconnaissance lors d’une émission sur l’entreprenariat des jeunes sur FR3, la troisième chaîne de télévision publique française.

Par la suite, il travaille dans la capitale française chez des importateurs de produits tropicaux en qualité de responsable des achats qui décideront plus tard de l’envoyer servir dans une de leur représentation en Afrique. Mais, ne pouvant revenir dans son Togo natal du fait de la férocité de la dictature d’EYADEMA qui sévissait, ce fut à Abidjan, en Côte d’Ivoire, qu’on l’envoya.

L’éclosion d’un valeureux combattant

Ce fut de cette Côte d’Ivoire où il travaillait que Tavio AMORIN suivra les développements de la situation politique dans ce qui s’appelait à l’époque Haute-Volta jusqu’à la révolution des capitaines qui portera au pouvoir Thomas Isidore SANKARA qui le rebaptisera Burkina Faso, lui, dont la fascination le poussera à chercher à en faire la connaissance puis à en devenir l’ami.

Et, si finalement cette révolution du peuple burkinabè se termina en tragédie avec l’assassinat de SANKARA qui en incarnait véritablement l’âme vivante, elle inspira nombre de membres d’une jeunesse africaine qui se prit d’une mémorable passion pour elle au point de chercher à s’en inspirer pour en faire de même dans leur pays. Tel fut le cas de Tavio AMORIN qui, revenu dans son Togo natal en 1991 suite à l’explosion que fut le soulèvement populaire du 5 octobre 1990, fut de toutes les batailles pour chasser du pouvoir la dictature sanglante d’Etienne GNASSINGBE EYADEMA.

Son épopée commença avec les meetings de l’opposition au Stade municipal de Lomé de mai 1991 débouchant sur la grève générale illimitée jusqu’à la démission inconditionnelle et immédiate d’EYADEMA du mois de juin suivant.
Mais, ce fut surtout à l’occasion de ses percutants discours et interventions exigeant la destitution inconditionnelle et immédiate d’EYADEMA à la Conférence nationale de juillet-août 1991 que le peuple togolais fera la découverte de ce jeune révolutionnaire qui devenait spontanément un symbole pour toute la jeunesse togolaise.
On le suivit ensuite lors du combat qu’il ne cessa de mener au Haut Conseil de la République de septembre à novembre 1991 contre les coups de force à répétition de la dictature togolaise contre les institutions de la transition mises en place par la Conférence nationale.

Après l’espèce de « normalisation » qui intervint fin décembre 1991 autour de la signature du « Nouveau contrat social » il ne cessa d’apporter une inlassable contribution tout au long des premiers mois de l’année 1992 pour sauver ces institutions de la transition en allant même tenter des plaidoyers à cet effet auprès d’EYADEMA. L’assassinat de Marc ATIDEPE lors de l’attentat de Soudou, le 5 mai 1992, fut pour lui un terrible coup qui le révolta si profondément que, renonçant aux initiatives d’apaisement qu’il entreprenait auparavant, il coordonna avec rage et vigueur toutes les manifestations de protestation qui eurent lieu contre cet assassinat, en sa qualité Secrétaire général du COD II qu’il était à l’époque.

Assassiné parce qu’il défendait la démocratie !

Un peu plus de deux mois plus tard, ce sera au tour de Tavio Ayawo Tobias AMORIN d’être brutalement et mortellement frappé : le 23 juillet 1992, vers 21 H, les policiers Kossi KAREWE et Yodolou BOUKPESSI le mitraillaient alors qu’il sortait de chez l’une de ses tantes, un assassinat commandité par Etienne GNASSINGBE EYADEMA à qui profitait cette élimination physique. Parce qu’il savait qu’en faisant abattre ainsi Tavio, alors président de la Commission spéciale du Haut conseil de la République (HCR) chargé d’étudier et présenter le Projet de Constitution en cours de discussion, il portait ainsi un coup d’arrêt à toute initiative visant à lui faire quitter le pouvoir. Car, la veille, lors d’une émission sur Radio-Lomé, Tavio avait brillamment démontré et s’était vigoureusement opposé à toute candidature d’EYADEMA aux élections présidentielles à venir comme le garantissait ce projet de Constitution, en application de textes de lois en vigueur au Togo dont l’un des plus pertinents remonte à juillet 1963 : le Statut général des forces armées togolaises.
Evacué sur l’Hôpital St Antoine de Paris, Tavio AMORIN devait y rendre l’âme dès le lendemain de son admission, le dimanche 26 juillet 1992, alors qu’il n’avait que 33 ans.

Achever le combat de Tavio AMORIN pour rendre hommage à sa mémoire

Depuis lors, la mémoire de Tavio Ayawo Tobias AMORIN n’a cessé d’être trahie. Car, alors qu’il était encore entre la vie et la mort, EYADEMA, soutenu par les représentants de la « Communauté internationale », avait convoqué les partis de l’« opposition démocratique » à un « dialogue » qu’on dénomma « Commission mixte paritaire ». Au lendemain de sa mort, cette assise avalisa le coup de force d’EYADEMA en supprimant les dispositions pour lesquelles Tavio s’était farouchement battu. Par la suite, cette « Commission mixte paritaire » sera suivie par une multitude de dialogues dont le 28e, actuellement en cours, le plus rocambolesque de tous, a sombré dans une impasse qui met en danger la vie et l’avenir du peuple togolais.

Aveugles et sourds, les responsables de l’« opposition » institutionnelle togolaise n’ont jamais voulu jurer par rien d’autre que ces dialogues qui, véritables fonds de commerce pour eux, n’ont été qu’autant de marchés de dupes, aux « accords » jamais respectés par le régime RPT et RPT/UNIR. Ils n’ont essentiellement servi qu’à fossoyer l’héroïque lutte du peuple togolais qui n’a cessé de payer un lourd tribut en milliers de morts dans son incessant combat pour en finir avec la dynastie EYADEMA-GNASSINGBE depuis bientôt 30 ans.
C’est pourquoi, en cette occasion de la commémoration du 60e anniversaire de sa naissance, le Parti des travailleurs tient à rendre un hommage déférent à la mémoire du valeureux combattant Tavio Ayawo Tobias AMORIN ainsi qu’à tous les martyrs tombés dans la longue lutte du peuple pour la reconquête de la démocratie et de la souveraineté nationale au Togo.

Il proclame, à l’endroit des travailleurs, paysans et jeunes de notre pays, que la meilleure façon de rendre hommage à la mémoire de Tavio AMORIN est d’achever son combat, par leur organisation indépendante dans les quartiers, villes et villages pour en finir avec la sanglante dynastie cinquantenaire EYADEMA-GNASSINGBE. C’est, là aussi, la meilleure façon de mettre fin au cynisme de ceux qui, tout en multipliant les discours les plus hypocrites à son sujet, trahissent depuis plus de 26 ans sa mémoire, ses sacrifices et les enseignements de son combat.

Lomé, le 20 novembre 2018,
Pour le Parti des travailleurs,
Le Secrétaire chargé de la coordination,

Claude AMEGANVI