« Le rejet par le gouvernement, de mesures qui, à l’évidence, doivent contribuer à la transparence des élections et empêcher la fraude, confirme, une fois encore, le manque total de volonté du pouvoir en place, d’assainir le cadre électoral de notre pays … Dans ces conditions et à défaut de réelles avancées prenant en considérations les préoccupations légitimes, objet de constantes revendications de mesures d’apaisement et de réformes électorales formulées par l’opposition depuis de nombreuses années, l’ANC se verra contrainte de ne pas s’associer au semblant de consensus qui se dessine contre son gré. »
Tels sont les termes d’un courrier adressé par l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC), au Ministre de l’administration territoriale à la suite de la septième réunion du CNAP.
Sous l’égide du Ministre de l’administration territoriale, Une Concertation Nationale entre Acteurs Politiques (CNAP) a en effet été lancée le 19 janvier 2021 comme cadre de dialogue créé par le gouvernement pour évoquer l’organisation des élections régionales. Ces élections régionales constituent le préalable à la concrétisation des premières élections sénatoriales qui devraient finaliser la mise en place, prévue depuis le toilettage de la constitution togolaise en 2002, d’un parlement bicaméral. La réforme constitutionnelle de mai 2019 a confirmé la mise en place d’un Sénat qui doit à son tour permettre de compléter les deux sièges restés vacants de la Cour Constitutionnelle.
Optimiste, M Patrick LAWSON-BANKU, Vice-Président de l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC) et chef de la délégation de l’ANC à la table de la concertation déclarait ceci à l’issue de la réunion de lancement de ce nième cadre de dialogue « Ce que je peux dire, c’est qu’il y a une volonté de part et d’autre de parvenir à des solutions susceptibles d’améliorer le cadre électoral et d’assainir le climat politique ».
Mais les « habitudes de la maison ont la vie dure, et il est apparu très rapidement, que ce dialogue n’est en rien différent des 28 précédents. Ce qui est à l’œuvre n’est rien d’autre que la tactique habituelle du système RPT-UNIR qui consiste à jouer la montre et à tourner les acteurs de l’opposition en bourrique jusqu’à ce qu’ils quittent d’eux-mêmes la table des négociations, laissant enfin le champ libre l’organisation unilatérale des élections. Et le régime en place depuis plus d’une cinquantaine d’année pourra ainsi verser des larmes de crocodile en fustigeant aux yeux d’un G5 compatissant, la politique de la chaise vide pratiquée par l’opposition.
La technique est tellement bien huilée que le Comité d’Action pour le Renouveau (CAR) ne s’y est pas trompé. Ce parti a claqué la porte dès le 3 février 2021, à l’issue de la 3ème réunion du CNAP.
Ayant, lors de son Conseil national du 10 octobre 2020 juré qu’on ne le prendrait plus au jeu de dupe du boycott organisé, l’ANC a fait le dos rond jusqu’ici, en essayant de faire pression comme elle pouvait. Mais la fermeté du courrier en pièce jointe, adressé au Ministre de l’administration territoriale le 27 mai 2021 à l’issue de la septième réunion du CNAP semble indiquer que ce parti aussi est prêt à jeter l’éponge.
L’heure de la remobilisation de la rue serait-elle en train de sonner de nouveau au Togo ?
LA REDACTION LETOGOLAIS.COM
EXTRAIT DE LA LETTRE DE L’ALLIANCE NATIONALE POUR LE CHANGEMENT (ANC)
Le 27 mai 2021
NO 21-024/ANC/ PN-SG
Monsieur le Ministre d’Etat
Ministre de l’Administration Territoriale, de la Décentralisation
et du Développement du Territoire Monsieur le Ministre d’Etat,
Le gouvernement a pris l’initiative d’inviter des partis politiques togolais à des discussions ayant pour objectif, la préparation des prochaines échéances électorales au Togo.
L’ANC, qui depuis plusieurs années, réclame l’ouverture de discussions politiques devant permettre l’assainissement du cadre électoral, prend part à ces discussions qui se déroulent au sein de la Concertation Nationale des Acteurs Politiques (CNAP).
Malheureusement, il apparait clairement dans les comptes-rendus des débats, que le gouvernement, qui devrait saisir l’occasion de ces discussions, pour procéder aux réformes nécessaires à des élections transparentes, s’accroche aux dispositions actuelles qui lui confèrent la majorité dans les institutions en charge des élections.
Ainsi :
– la composition de la CENI retenue, (7+7+2+1), assure au pouvoir en place, comme toujours, une majorité confortable pour manœuvrer cette institution, à sa guise ;
– la double vérification que permet la biométrie intégrale, a été rejetée ;
– l’authentification du bulletin de vote, par signature, n’a pas été acceptée.
Le rejet par le gouvernement, de mesures qui, à l’évidence, doivent contribuer à la transparence des élections et empêcher la fraude, confirme, une fois encore, le manque total de volonté du pouvoir en place, d’assainir le cadre électoral de notre pays.
L’ANC, qui a saisi l’occasion de ces discussions pour réitérer clairement des préoccupations qu’elle a fait inscrire à l’ordre du jour, a vu rejeter, parce que jugées irrecevables par le gouvernement, les propositions conséquentes, visant notamment la transparence et l’équité des consultations électorales.
Il y a donc lieu de s’interroger sur les raisons réelles de la tenue des discussions en cours, si ces dernières ne doivent pas aboutir à l’assainissement du cadre électoral et à l’apaisement du climat politique.
Au demeurant, l’ANC rappelle que les discussions ne peuvent nullement occulter l’indispensable assainissement du climat politique par des mesures d’apaisement.
Dans ces conditions et à défaut de réelles avancées prenant en considérations les préoccupations légitimes, objet de constantes revendications de mesures d’apaisement et de réformes électorales formulées par l’opposition depuis de nombreuses années, l’ANC se verra contrainte de ne pas s’associer au semblant de consensus qui se dessine contre son gré.
Veuillez agréer, Monsieur le Ministre d’Etat, les assurances de notre considération distinguée.
Le 27 mai 2021
Jean-Pierre Fabre
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