BBC, 17 juin 2005 — Près d’un enfant togolais sur huit est envoyé travailler loin de son domicile et de sa famille, parfois même à l’étranger. C’est le constat inquiétant que fait l’organisation humanitaire Plan International dans un rapport qu’a lu pour nous Elizabeth Blunt, de la BBC.
Pour une famille pauvre, il peut être tentant d’envoyer un enfant travailler dans une « bonne » famille, où il gagnera un peu d’argent, recevra une formation, ou une éducation. Et l’enquête effectuée par Plan international sur le terrain montre que dans les régions du Togo où la pratique est la plus répandue, elle est considérée comme parfaitement normale.
Un marché lucratif
Ces régions, ont, de tout temps, fourni des travailleurs immigrés pour les zones plus riches du Togo, ou dans des pays voisins.
Les enfants sont fréquemment envoyés vivre chez des parents plus fortunés, où ils aident aux tâches ménagères en échange du gîte et du couvert.
Mais les enfants peuvent aussi être envoyés loin de chez eux, parfois à l’étranger. Et ce que ces parents ne savent généralement pas, c’est que le marché des employées de maison et des jeunes garçons de ferme est très organisé, et rapporte gros. Plan International n’hésite pas à parler de « trafic ».
Plusieurs milliers d’enfants et de jeunes adolescents togolais sont recrutés pour alimenter ce marché à Lomé ainsi qu’au Bénin voisin, au Nigéria, et au Gabon.
Quand des représentants de Plan International ont interrogé des familles dans les petites villes et les villages d’où viennent ces enfants, ils ont constaté que plus des deux tiers d’entre elles ont envoyé un fils ou une fille travailler de la sorte.
Exploitation et viols
Il s’agit généralement de familles très pauvres, avec plusieurs enfants. Et les parents sont souvent illettrés.
Les jeunes filles et fillettes constituent la majorité de ces enfants « trafiqués ». Elles partent, d’habitude, après un accord passé entre leurs parents et un intermédiaire. Les garçons, eux, s’en vont souvent sans prévenir leurs parents, pour gagner un peu d’argent, ou obtenir une bicyclette, ou tout simplement parce qu’ils sont tentés par l’aventure.
Il est peut-être surprenant de constater que les enfants continuent de partir de la sorte, malgré le fait que d’autres sont revenus malades, malheureux, et tout aussi démunis que lorsqu’ils étaient partis. Les garçons parlent de la façon dont ils ont été exploités dans des plantations, et de nombreuses filles, quant à elles, reviennent enceintes des suites de viols, et sont parfois séropositives.
Un appel à l’action
Plan International réclame donc des mesures urgentes, notamment « une action préventive au niveau communautaire et national comprenant un programme d’éducation et d’amélioration des revenus des foyers ». L’ONG préconise une éducation gratuite et obligatoire pour tous, afin de garder les enfants – surtout les filles – sous surveillance dans un environnement scolaire.
Plan International demande aussi une action au niveau communautaire pour informer les familles des dangers qu’encourent leurs enfants.
Enfin, l’ONG souhaite voir la création d' »un cadre légal et un système judiciaire de mise en application » des mesures pour protéger ces enfants, et demande aux autorités togolaises de se montrer plus disposées à poursuivre les traficants en justice.
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