DECLARATION DU COLLECTIF DES ASSOCIATIONS DE LA SOCIETE CIVILE ET DES ORGANISATIONS SYNDICALES POUR DES ELECTIONS LIBRES ET TRANSPARENTES
OBSERVATIONS PRELIMINAIRES SUR LE DEROULEMENT DES OPERATIONS D’INSCRIPTION ET DE DISTRIBUTION
DES CARTES D’ELECTEUR
Dans le cadre de la préparation et l’organisation des élections générales du 24 Avril 2005 au Togo, le Collectif des Associations de la Société Civile et des Organisations Syndicales Togolaises, fait les constats, analyses et recommandations suivants relatifs à :
– l’environnement électoral ;
– le fonctionnement des commissions administratives, et des comités administratifs des listes et cartes chargés de l’inscription et de la distribution des cartes d’électeur ;
– les opérations d’inscription ;
– les opérations de distribution des cartes.
I – NOS CONSTATS
1°) De l’environnement électoral
– à Bè Klikamé (Lomé), des jeunes miliciens du RPT munis de matraques et de gourdins cloutés ont été surpris en train de distribuer des cartes en dehors des heures légales de distribution, le mardi 29 mars 2005 et en l’absence des agents officiels de distribution. Ils ont agressé le gardien et des jeunes du quartier qui ont voulu s’interposer. On dénombre plusieurs blessés dont deux cas graves. On constate également que des gourdins cloutés ont été acheminés dans plusieurs préfectures notamment dans la préfecture de Vo ;
– dans les préfectures de Vo et des Lacs, le général TIDJANI, Ministre de la défense, aurait proféré des menaces de mort contre les personnes qui ne voteraient pas pour le candidat du RPT ; il en est de même du préfet du Zio, Mr ALAGBE Bayédjé ;
– dans la région des Plateaux, le Major KOULOUM, gendarme à la retraite, à Atakpamé, principal initiateur du GRAP (Groupe de Réflexion et d’Appui au RPT) terrorise les populations de Kloto, de Wawa, d’Amou et de l’Ogou ;
– en raison de la protestation des populations à qui on a refusé l’inscription, des heurts se sont produits dans plusieurs localités notamment à Lomé, dans les préfectures du Golfe (Baguida, Avepozo…), de Vo, du Zio, de Yoto, de l’Ave, de Kloto…
CTSD – LTDH – SEST – UNSIT – SADD- CAO-TOGO – ONG AMONO – UJA-TOGO – BARREAU-TOGO- LIDE – FOSCAO – WANEP-TOGO – ACAT-TOGO – CTDH – DHT21 – ONUTA – CURLCT – PEACE CORPS FOR AFRICAN – RENAISSANCE – JUDA – GF2D – CSTT – TERRE NOUVELLE – CNSC-DIASTODE – SOLIDA – DHDCMC – CISAD – APED – COPED – NDHT – FPD – FETREN-UNSIT – ONG ENTRED – AMIS – BRACU-TOGO – PCAR-OPSRM – NDH-TOGO – AFRIQUE TRADITION – FOFCATO – MPP-TOGO – ALCADES – FSCT- AFRICA HOPE INTERNATIONALE
2°) Du fonctionnement des commissions administratives, comités administratifs des listes et cartes chargés de l’inscription et de la distribution des cartes d’électeur
– Depuis le 28 mars 2005 à Lomé, retard dans la distribution des cartes en raison de la grève de certains agents électoraux ;
– depuis un certain nombre de semaines, bien avant le démarrage des opérations de révision des listes électorales et de retrait des cartes, les commissariats ont arrêté de délivrer des pièces d’identité dans la plupart des commissariats de police sous prétexte qu’ils sont en rupture de fournitures ;
– le 28 mars, jour du démarrage des opérations, aucune liste n’a été affichée dans de nombreux centres d’inscription.
3°) Des opérations d’inscription
– la délivrance sélective de cartes d’électeur à des personnes, même détentrice de leurs pièces d’identité ;
– de nombreux électeurs munis de leurs anciennes cartes d’électeur, n’ont pas été autorisés à retirer leurs nouvelles cartes électeur ;
– les cartes d’électeurs sont distribuées dans des domiciles privés : des cas ont été ainsi signalés à Lomé (Baguida, Agbalepedo , Agoè) ; dans cette dernière localité, il est même exigé un mot de passe avant tout retrait ;
– des cas ont été également signalés dans la préfecture du Zio (Kovié, Gbafakope et Dablakope), à Kambolé (dans la préfecture de Tchamba) ;
– le Kambole, tout le matériel de révision a été acheminé au domicile du chef canton et les inscriptions et distributions se déroulent dans ledit domicile ;
– le refus d’inscrire et donc de jouir de leur droit de vote des électeurs qui n’ont pas voté en 2003 ou qui ne se sont jamais faits inscrire sur les listes électorales ;
– le refus d’inscrire des électeurs munis régulièrement de leurs pièces d’identité à Bè, Nukafu …
4°) Des opérations de distribution des cartes d’électeur
– L’insuffisance notoire et scandaleuse des cartes d’électeur vierges dans la plupart des centres de distribution ;
– les agents ne trouvent aucune réponse à ces situations qui concernent de nombreux citoyens ;
– dans de nombreuses localités, des lots entiers de cartes d’électeurs sont remis aux militants du RPT qui les distribuent de maison en maison (Baguida, Golfe, Yokélé, Kloto, Zio, Sotouboua…) ;
– dispersion dans la mise en place des cartes d’électeurs, par exemple les villages de Legbanou et Segbé dans le Kloto ont leurs cartes affectées aux villages de Légbanou- Djokope, localité située à plus de 10 kilomètres ;
– la suspension depuis le mercredi 29 mars 2005 à Kara des nouvelles inscriptions sur les listes électorales ;
– le préfet de l’Avé, Mr. ATSU-HEGBE Bamazi a retiré de force les cartes d’électeurs déjà distribués à certains citoyens et les a déchirées.
Ces constats partiels qui ne portent que sur quelques préfectures donnent un aperçu significatif de la volonté manifeste d’empêcher les citoyens d’exercer leur droit de vote et de créer les conditions d’un hold up électoral.
II- Notre analyse de la situation
1°) de l’environnement électoral
Depuis le coup d’Etat constitutionnel, le peuple togolais continue d’exprimer sa soif de démocratie et son aspiration à un Etat de droit réel. Les difficultés et les obstacles constatés dans la préparation et l’organisation des élections procèdent de l’état d’esprit du gouvernement à s’opposer par la répression et l’intimidation à la réalisation d’un environnement électoral démocratique et paisible, gage d’une stabilité sociale et politique.
2°) Du fonctionnement des démembrements locaux de l’administration électorale
Il est caractérisé par l’intrusion partisane des responsables administratifs politiques et militaires qui sèment la terreur et ce, en violation de :
– l’article 41 en son aliéna 2 qui dispose que «au sein des commissions administratives et des comités administratifs de liste et cartes siègent en qualité d’observateurs (2 ) deux représentants des partis politiques légalement constitués en raison d’un représentant pour la majorité et d’un représentant pour l’opposition» ;
– l’article 47 qui dispose «le comité administratif des listes et des cartes comprend quatre (4) membres appelés agents de révision ou de recensement électoral désignés par l’administration électorale, en raison de leur probité et de leur compétence en matière électorale (…) » ;
– le communiqué de la CEDEAO, suite à l’accord intervenu entre le pouvoir et l’opposition le 28 février 2005 sous la médiation des présidents Mamadou TANDJA du Niger, président en exercice de la CEDEAO, Amadou TOUMANI TOURE, Président de la République du Mali, accompagnés du Secrétaire Exécutif de la CEDEAO, Mr. Ibn CHANBAS. Il est à rappeler que cette délégation de haut niveau a été mandatée par le Sommet extraordinaire de la CEDEAO sur le TOGO ;
– l’Accord intervenu entre l’opposition et le pouvoir relatif au code de bonne conduite sous la médiation de la CEDEAO.
Au regard de ces dispositions de la Loi électorale et des accords suscités tous les acteurs doivent équitablement siéger au sein des commissions administratives et des comités des listes et cartes.
3°) De l’inscription sur les listes électorales
La violation de l’article 55 du code électoral qui dispose que « l’inscription sur la liste électorale est un droit pour tout citoyen togolais remplissant les conditions requises par la loi » est flagrante eu égard aux comportements des agents chargés de l’inscription des électeurs sur la liste électorale.
De même, le manquement à l’article 57 en son aliéna 2, disposant que «nul ne peut se faire inscrire sur une liste électorale par procuration. La présence physique de l’intéressé est obligatoire», est sans commune mesure.
L’entorse à l’article 65 du code électoral sur la possibilité de l’inscription par témoignage après enquête de la commission administrative est également à souligner dans plusieurs cas de figure.
4°) De la distribution des cartes d’électeur
A la lecture du code électoral et au regard de la manière dont les cartes sont mises à la disposition des électeurs, des manquements graves aux dispositions ci-après du code électoral ont été observés :
· l’article 80 qui dispose « la commission administrative délivre à chaque électeur inscrit sur la liste électorale sa carte d’électeur.»
· l’article 81 qui, lui dispose que « les comités administratifs des listes et cartes procèdent à la remise individuelle des cartes à chaque électeur, selon les modalités prévues à l’article 65 de la présente loi.»
Ces manquements graves aux lois de la République et aux principes élémentaires de la démocratie remettent en cause la crédibilité du processus électoral en cours.
III- NOS RECOMMANDATIONS
Le Collectif demande :
1- Au Gouvernement :
– le respect strict et l’application effective sur l’ensemble des dispositions pertinentes en la matière du code électoral et des accords intervenus entre le gouvernement et l’opposition en vue d’assurer l’inscription effective à l’ensemble de la population togolaise en âge de voter ainsi que le retrait des cartes d’électeur dans les conditions satisfaisantes ;
– d’assurer la distribution des cartes d’électeur jusqu’à la veille du scrutin conformément à l’article 82 aliéna 2 du code électoral
– d’assurer la poursuite de l’inscription électorale conformément à l’article 70 du code électoral qui dispose que « les citoyens omis sur la liste électorale par suite d’une erreur matérielle peuvent jusqu’au jour du scrutin, exercer un recours devant le président de la commission administrative. Le président de la commission administrative, après vérification, peut autoriser, par écrit, l’inscription de l’électeur par le président du bureau de vote. Mention est faite au procès- verbal. »
– De prendre toutes les dispositions urgentes pour assurer une réelle neutralité de l’Administration électorale et de ses démembrements locaux.
2- Aux Institutions : CENI, Administration électorale, Haute Autorité de l’Audio visuelle et de la Communication, CEDEAO
– le respect des textes et Lois en vigueur pour un assurer un exercice libre des droits civils et politiques des citoyennes et citoyens togolais à l’occasion des élections générales du 24 Avril 2005 ;
– l’exercice effectif par la CENI de ses prérogatives légales ;
– l’égalité de traitement des candidats dans l’utilisation des temps d’antenne ;
– la facilitation et à l’apaisement en vue d’un climat électoral sécurisé et apaisé ;
– le respect par tous les acteurs du Code de bonne conduite signé entre le pouvoir et l’opposition le 29 mars 2005 sous l’égide de la CEDEAO
– la non-immixtion des forces de défense et de sécurité dans les opérations électorales.
– l’interdiction d’afficher des panneaux géants du président de la République défunt avec des messages louant les mérites du pouvoir en place, messages constitutifs de véritables « campagnes électorales déguisées » interdits par le Code électoral en son article 90.
3- A l’ensemble de la population de se mobiliser pour exercer leur droit citoyen de vote par :
– l’inscription massive sur les listes électorales
– le retrait des cartes d’électeur
– le vote effectif le 24 Avril 2005.
1- Faisant siennes les conclusions de la Mission Œcuménique au Togo dans sa Déclaration en date du 02 avril 2005, le Collectif :
– invite les partis politiques de l’opposition, la mouvance présidentielle et le gouvernement togolais à « s’engager dans une dynamique de dialogue politique pour aboutir à un consensus national devant déboucher sur une transition politique et d’union nationale, qui seul, peut offrir un cadre apaisé et de confiance pour préparer de véritables élections démocratiques. Seul un tel cadre pourrait sortir les uns et les autres des enfermements dans lesquels ils se trouvent actuellement».
– «invite instamment à une réconciliation entre les Forces Armées Togolaises et le peuple togolais qui tous n’aspirent qu’à cela ; afin que dorénavant, l’Armée puisse jouir véritablement de son statut d’armée républicaine et en assumer le rôle auprès du peuple togolais ».
Le Collectif se reconnaît le droit d’observer toutes les étapes du processus de cette élection présidentielle et de veiller, au nom du Peuple souverain du Togo au respect de son libre suffrage.
Fait à Lomé, le 03 Avril 2005
Pour le COLLECTIF,
Le porte parole
Ata Messan AJAVON
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